Une récente étude de l'association Robin des Bois a souligné l'importance des pollutions des eaux intérieures françaises par les hydrocarbures (cf. Hydroplus n° 179, p. 3) et rappelé la menace que font peser les « citernes vétustes ou abandonnées qui fuient dans les entreprises, les établissements publics et chez les particuliers ». Cet état de fait est illustré par la confusion qui règne autour des cuves installées chez les particuliers. « Les fuites de cuves à fioul représentent un gros problème national, témoigne Robert Ogier de RO-EX Pollution-Intervention, société qui intervient pour circonscrire et éliminer les pollutions. La majorité de nos interventions est liée à des cuves fuyardes... vieillies, mais toujours en exploitation, et qui rompent à cause de mouvements du sol, par exemple, ou juste après un remplissage suivant une période de vide estival. »
préoccupante Corrosion
Le parc français en activité est estimé à 4,2 millions de cuves par l'association professionnelle Chauffage Fioul, qui promeut l'utilisation performante du fioul domestique. Parmi celles-ci, 1,5 million ont plus de vingt ans d'âge. Ce sont donc des cuves à enveloppe unique, sans système d'alarme en cas de fuite. D'après Aristide Belli, directeur technique chez Chauffage Fioul,
« ces cuves sont protégées de la corrosion extérieure par un revêtement spécial. La corrosion intérieure est plus préoccupante. Lorsque du fioul est consommé, de l'air et donc de l'humidité entrent dans la citerne par effet de vases communicants. Cette humidité se condense et de l'eau apparaît. Si la cuve est régulièrement utilisée, cela n'est pas trop problématique car le niveau de fioul varie ; en outre, le fioul contient des antioxydants qui protègent de la corrosion. Les problèmes surviennent quand la cuve cesse d'être exploitée et qu'elle n'est pas neutralisée. La corrosion peut alors se développer, provoquant une fuite ».
Les cuves à fioul tombent en désuétude lorsqu'un utilisateur change de mode de chauffage, passant par exemple au gaz. Normalement, ces cuves inutilisées doivent être neutralisées : vidangées, curées puis remplies de sable ou de béton. Cette neutralisation doit être financée par le client. Depuis le 25 janvier 2005, une nouvelle loi est entrée en vigueur, déclarant que l'installateur du nouveau mode de chauffage doit s'assurer que la neutralisation a bien eu lieu. « Si une cuve n'est pas neutralisée et qu'elle fuit, l'installateur pourra être poursuivi », note Aristide Belli, qui regrette que les professionnels tardent à prendre conscience de leurs responsabilités. Beaucoup craignent de perdre leurs clients en imposant des frais supplémentaires. Au total, près de 3 millions de cuves sont ainsi tombées en désuétude et auraient dû être neutralisées. Personne ne sait combien l'ont réellement été.
Les conséquences environnementales d'une fuite peuvent se révéler très graves, car les cuves fautives sont enterrées. Les écoulements sont donc souvent repérés tardivement. Très vite, les hydrocarbures peuvent atteindre des points de captage, des élevages piscicoles, des zones de baignade... Et il sera parfois difficile de remonter jusqu'à la source de cette pollution.