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EAU

La guerre contre les odeurs est déclarée

LA RÉDACTION, LE 1er DÉCEMBRE 2008
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Quel peut être le rapport entre le changement climatique et les problèmes d'odeurs dans les réseaux d'assainissement ? La hausse des températures sans aucun doute. Au Siaap, on enregistre désormais des plaintes liées au développement d'odeurs, même en hiver, les températures moyennes des effluents avoisinant depuis quelques années 15 °C sur l'année. La diminution des consommations en eau potable est également un facteur aggravant, qui conduit à générer moins d'eaux usées. Ces dernières étant donc plus concentrées et leur temps de séjour dans les réseaux rallongé, le développement d'H2S en est exacerbé. Les exploitants de station prennent le problème très au sérieux : pour répondre aux plaintes de riverains de plus en plus fréquentes, les frais d'exploitation battent des records. Suivant la nature du traitement, ces coûts peuvent représenter entre 2 et 10 centimes d'euros le mètre cube d'effluent traité. Sur un réseau de collecte qui achemine la moitié des effluents arrivant à la station d'épuration, les besoins de traitement peuvent donc se révéler très coûteux. « Le problème des odeurs dans les réseaux est un vrai sujet de gestion patrimoniale », reconnaît Frédéric Blanchet, responsable unités réseaux à la direction technique de Veolia Eau. Dans les zones littorales, il est encore plus préoccupant du fait de la présence d'effluents riches en sulfates et de la structure même des réseaux, souvent surdimensionnés pour accueillir la population estivale. SOLUTIONS CURATIVES OU PRÉVENTIVES Pour faire face aux problèmes des odeurs dans les réseaux, les solutions peuvent être, soit préventives, avec le nitrate de calcium principalement, soit curatives avec le chlorure ferrique. Le premier empêche la formation d'H2S lorsqu'il est injecté en amont de l'apparition des odeurs, tandis que le chlorure ferrique permet d'éliminer ce composé quand celui-ci est déjà formé dans les réseaux. L'ajout de nitrate de calcium correspond à un procédé biologique préventif, et ce produit est non toxique pour l'organisme. Il ne colore pas les boues et n'est pas soumis à la réglementation du transport des matières dangereuses. Son principe de fonctionnement consiste à favoriser une certaine population de bactéries « friandes » de nitrates. Ces bactéries dénitrifiantes bloquent alors le processus de formation d'H2S car elles empêchent la production de sulfures. « Le nitrate constitue le principe actif qui va être consommé par les bactéries. Il en résulte une production d'azote gazeux qui s'échappe dans l'atmosphère à la fin du refoulement », explique Mathieu Amar, directeur commercial division traitement des eaux chez Yara, fabricant du procédé Nutriox. Le dispositif pour ce produit inodore, qui doit être injecté le plus en amont du réseau pour apporter l'oxygène nécessaire, est installé au niveau des postes de refoulement. Malheureusement, son installation nécessite une certaine place, pour permettre par exemple la livraison des produits par camion. De fait, tous les postes ne peuvent être équipés, notamment dans les rues étroites des centres historiques où les réseaux unitaires sont anciens. Tout dépend de la structure même du réseau. Pour faciliter l'utilisation de ce produit, Yara propose un système de dosage automatisé, avec pompe d'injection et armoire de commande pour le contrôle. Le dosage s'effectue à partir de paramètres fixes comme la longueur de refoulement, le diamètre de la canalisation et la qualité des eaux, et sur des variables comme la température des effluents, le débit et la concentration d'H2S au point d'injection. Lors d'épisodes pluvieux, il n'est donc pas nécessaire d'injecter les mêmes concentrations, car l'eau de pluie nettoie naturellement le réseau. Le point clé avec ce réactif porte donc essentiellement sur le dosage. Surtout lorsque les concentrations de nitrates de calcium sont trop élevées, car les graisses sont transformées et les effluents deviennent alors plus mousseux. SOLUTIONS ALTERNATIVES EN PHASE DE TEST Automatiser tous les postes représente un coût supplémentaire. En outre, les exploitants pointent du doigt la complexité du paramétrage. Au Siaap, le nitrate de calcium est utilisé depuis quinze ans, mais ce qui a changé, c'est le volume de produits injectés. « Avec la diminution des consommations et la hausse des températures, nous sommes obligés d'utiliser ces réactifs toute l'année. Aujourd'hui, les sels de nitrates représentent le premier poste de réactifs au Siaap », regrette Michel Riotte, conseiller scientifique et technique au Siaap. Le syndicat travaille donc à optimiser l'utilisation de ce procédé. « Aujourd'hui, nous devons livrer une véritable guerre contre les odeurs », poursuit-il. Des solutions alternatives sont actuellement testées, « en complément des nitrates de calcium », ajoute Jean Krier, ingénieur hydrologue au Siaap. Les chlorures ferreux offrent l'avantage de rester dans le réseau et de ne pas produire de boues comme les chlorures ferriques. Ils ont une action immédiate sur les sulfures (action anti-odeurs) pour donner des sulfures ferreux qui, à l'entrée de la station d'épuration, vont se retrouver en partie en fer ferrique, ce qui va aider à la précipitation des phosphates de fer. En France, l'utilisation du chlorure ferreux est assez récente. Ses propriétés ont fait leur preuve pour le traitement de l'hydrogène sulfuré dans les réseaux, en concurrence directe avec le traitement préventif à partir de sels de nitrate. Mais il est également efficace dans la déphosphatation et la coagulation. Mais comme les chlorures ferriques, ils posent un problème au niveau de la coloration des effluents. « C'est l'un des inconvénients de ce produit. Cela dit, la réglementation n'a pas d'exigence au niveau de ce paramètre », soutient Jean Krier. Des essais ont été réalisés sur le réseau de Clichy CAB, où les premiers résultats se sont révélés très concluants. Début 2009, le Siaap devrait commencer à lancer les premiers tests au niveau d'Achères. MÉTHODES NOUVELLES OU ARCHAÏQUES D'autres produits existent. Les chlorures ferriques ont un effet corrosif, mais qui porte surtout sur le point d'injection, et qui s'atténue par dilution dans l'eau. Son utilisation, si elle est accompagnée de canalisations plastiques au point d'entrée ou de protection des bâches, peut donc se montrer efficace. La production de boues inhérentes à la précipitation de sulfates de fer nécessite cependant des curages plus fréquents. Le fabricant de produits chimiques Kemira vient de lancer un produit associant nitrate et fer. Grâce à sa formulation, l'Anaerite 263 de Kemira permet d'obtenir un effet à la fois préventif et curatif en un seul point d'injection. Il allie l'abattement de l'H2S et la prévention de la septicité en maintenant des conditions anoxiques. Même s'il est plus cher à l'achat, l'Anaerite 263, selon le fabricant, requiert des doses deux à cinq fois inférieures au nitrate de calcium lorsque le point d'injection est situé très en amont. Les postes de désodorisation avec brumatisateurs peuvent également être installés, comme les dispositifs plus simples de désodorisation fonctionnant sur pile (voir encadré). Mais ces postes coûtent cher, et nécessitent également de la place. Le Siaap a par exemple choisi d'installer des ventilateurs au niveau des émissaires de transport sur une vingtaine de kilomètres pour éviter de mettre des puits de désodorisation, qui sont beaucoup moins pratiques au niveau de l'exploitation. D'autres techniques peuvent également être pratiquées, même si elles restent minoritaires : l'injection d'oxygène ou l'injection air. Cette technique pose des problèmes au niveau des points hauts, car l'air peut se concentrer et ne pas redescendre. Cette solution est donc efficace sur de courtes distances et sur des profils adaptés. Des solutions archaïques existent aussi. En Bourgogne, le maître d'oeuvre d'un réseau d'assainissement collectif révélait sans aucune gêne une des solutions pour remédier aux problèmes d'odeurs au niveau des postes de relevage proches de maisons secondaires : le technicien de la commune ouvrait un léger filet d'eau potable de manière à alimenter en continu le réseau et éviter les eaux stagnantes ! Il est vrai cependant que l'efficacité de l'eau pour lutter contre les odeurs est reconnue. En 2007, L'École nationale supérieure de chimie de Rennes, avec le soutien de l'Ademe, a mené une étude sur l'efficacité chimique, la toxicité et la formation éventuelle de sous-produits nocifs des produits neutralisants d'odeurs (produits soufrés comme l'H2S, mais aussi produits ammoniaqués, acides gras volatils, etc.). Un banc d'essai a été installé pour l'occasion, pouvant être utilisé pour différentes configurations (pulvérisation, brumisation ou atomisation). Il en ressort d'abord que les produits commerciaux sont en général des mélanges complexes contenant plus de quinze composés organiques détectables. Au niveau de certains polluants comme les soufrés, la comparaison des performances obtenues avec les produits commerciaux à celles obtenues avec l'eau est pour le moins déconcertante. Même si des efficacités supérieures à l'eau sont rencontrées, « elles restent néanmoins faibles, inférieures à 50 % », rapporte l'étude. LA RÉFLEXION PRÉCÈDE LA CONCEPTION Pour répondre aux problèmes relatifs aux odeurs, les riverains sont aussi sollicités. Le Siaap, par exemple, est doté d'un jury de nez composés de nombreux bénévoles. Suez Environnement dispose de son programme Nose développé en 2006 avec son laboratoire dédié à l'olfactométrie (voir Hydroplus n° 164, p. 44), et la Société d'exploitation du réseau d'assainissement de Marseille (Seram) dispose d'une nouvelle cellule odeur (voir p. 35). Tous ces investissements supplémentaires et les difficultés pour choisir les solutions les mieux adaptées ont mis en évidence le besoin d'une réflexion plus approfondie sur une meilleure gestion qualitative de l'effluent, lors de la conception des ouvrages. Des sections plus adaptées, des conditions de pentes plus fortes, mais aussi le fait de prévoir l'installation de systèmes de protection des bâches des postes de refoulement, de privilégier le relèvement au refoulement, de surdimensionner les postes de refoulement dans la prévision d'installer un système de traitement : ce sont autant de solutions à envisager. Pour les fabricants de regards en béton, « la présence d'H2S est d'abord un problème de conception du réseau ». Ils ont dans leur offre de nombreuses solutions comme le revêtement époxy, mais qu'ils ne proposent qu'en cas de restauration du réseau et non comme solution de prévention (voir Hydroplus n° 171, p. 36). « Nous favorisons la mise en place de postes de pompage en ligne, qui évitent la stagnation dans les bâches », commentait Daniel Villessot, directeur scientifique de Lyonnaise des eaux (voir Hydroplus n° 157, p. 36). La problématique odeur se fait désormais « sentir » avant même la mise en eau des ouvrages. À cela, s'ajoute la difficulté pour les exploitants d'une tendance à un éloignement de la collecte des effluents. En moyenne, les traiteurs d'eau préconisent que ces effluents ne séjournent pas plus de deux à trois heures dans les conduites de refoulement ; au-delà, les nuisances olfactives sont immédiates. « À titre d'exemple, en France comme ailleurs en Europe, des temps de séjour de douze à vingt-quatre heures sont parfois observés », note cependant Frédéric Blanchet. Alors, quels traitements faut-il choisir ? Les sels de nitrates semblent appréciés de la majorité des exploitants. Même si, on le dit peu, les sels de nitrates en se transformant, produisent un peu de NOX, un gaz à effet de serre. La solution la plus sage est sans doute celle proposée par Frédéric Blanchet : « L'eradication des problèmes passe souvent par un panachage des solutions. »


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