Les délégués de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), réunis à Paris, ont clos le programme de recherche consacré à l'eau par l'organisation depuis deux ans. Nourri par l'expérience de terrain des participants, ce programme a essentiellement porté sur le financement des services d'eau au niveau mondial et sur leur tarification. Première constatation, le financement est notablement insuffisant. Faute de moyens, la qualité des services se dégrade et les consommateurs sont de moins en moins disposés à payer. C'est un parfait cercle vicieux que l'OCDE aimerait aider à briser tout en apportant sa contribution au forum mondial d'Istanbul.
DES DONNÉES D'ANALYSE INCOMPLÈTES
Le constat de départ est sévère. Plus encore que d'un manque d'argent, les services d'eau souffrent d'une mauvaise gestion. Leurs coûts de fonctionnement devront impérativement être réduits. Or statistiques et données d'analyse manquent pour y parvenir. Il faudrait de même augmenter les sources principales de financement dites trois T : les tarifs, les taxes et les transferts... Mais comment justifier cette hausse sans chiffrage précis des besoins ?
L'enjeu est grave. En 2008 et selon un rapport conjoint de l'Unicef et de l'OMS, près d'un milliard de personnes n'ont toujours pas un accès adéquat à l'eau potable, et 2,5 milliards à des installations d'assainissement appropriées. La Banque mondiale l'affirme : si la tendance actuelle se poursuit, les objectifs du Millénaire - réduire
de moitié, d'ici à 2015, le nombre de personnes privées d'accès à l'eau - ne seront pas atteints. Sauf sans doute en Chine.
Alors que la crise financière mondiale pourrait d'abord frapper les plus nécessiteux, comme l'a souligné Angel Gurria, secrétaire général de l'OCDE, les participants à la synthèse avaient choisi d'adopter un optimisme paradoxal et volontariste : « Depuis dix ans, s'est ainsi réjoui Loïc Fauchon, président du Conseil mondial de l'eau, la cause de l'eau a progressé. Trois sommets réunissant des chefs d'État ont été organisés ainsi qu'une exposition universelle. À Istanbul, 40 à 50 % du temps sera consacré au politique, 150 délégations ministé-rielles sont attendues, et les villes, à l'initiative de celle d'Istanbul, seront invitées à adhérer à un Urban Water Consensus destiné à souligner leur engagement au service de l'eau. »
La cause de l'eau progresserait si chacun prenait conscience, à partir de cas concrets, des bénéfices qui y sont associés en matière
de santé, d'éducation et de développement économique, a d'ailleurs rappelé le prince d'Orange Willem-Alexander des Pays-Bas, président du Conseil consultatif sur l'eau et l'assainissement auprès du secrétaire général des Nations unies. Une prise de conscience que l'OCDE recommande d'abord de favoriser, sans s'illusionner pour autant sur le fait que celle-ci ne suffira pas. Pour inciter les « ministères des Finances » à la générosité, les délégués sont persuadés que le secteur de l'eau devra se réformer. Non seulement lui faudra-t-il se soumettre à une planification financière stricte, mais encore devra-t-il enterrer les débats idéologiques et arbitrer les conflits d'usage.
DES PLANS D'ACTION PROMETTEURS
Le débat public/privé, note le rapport de synthèse, n'a pas lieu d'être. Il convient plutôt de s'intéresser aux moyens concrets de rendre les services nécessaires au meilleur rapport qualité/prix. Dans la même optique, il faut trouver les moyens les plus efficaces de répartir des ressources en eau de plus en plus rares.
Cela demandera une coordination plus efficace avec d'autres politiques : finance, énergie, agriculture, tourisme et gestion foncière notamment.
Autant d'objectifs, aussi généreux que généraux, néanmoins fort prometteurs s'ils se traduisent effectivement en plans d'actions, assortis de calendriers précis et contraignants pour atteindre des résultats chiffrés.