La disponibilité des différents acteurs de l'eau - fonctionnaires, universitaires, utilisateurs agricoles, professionnels du tourisme, associations environnementales... - à entrer dans un processus participatif dépend de trois facteurs principaux : la culture du pays, l'état démocratique de la société et la pression environnementale sur l'état des ressources. Ainsi, en Jordanie, pays où l'eau est rare, les acteurs sont « très motivés et informés des enjeux liés à l'eau », résume Philippe Ker Rault, de l'université de technologie de Delft aux Pays-Bas. Ce chercheur vient d'achever sa thèse sur la participation du public dans la gestion de l'eau en Turquie, en Syrie, au Liban et en Jordanie. Il a notamment demandé aux acteurs quelle devrait être l'attitude de l'autorité compétente pour favoriser la participation. En Syrie et au Liban, les autorités ont été qualifiées d'autoritaires, donnant éventuellement une information sur les projets dans le domaine de l'eau, mais n'envisageant pas la discussion ; une attitude plus ouverte y est souhaitée par les diverses parties prenantes.
Autre question : quels sont les freins à la participation ? Au-delà des entraves souvent évoquées (manque d'argent, incompétence de la population...), trois types d'obstacles réels se sont dégagés : l'autorité ne veut pas organiser de concertation, souvent par peur de voir son pouvoir traditionnel mis à mal ; elle s'avoue incompétente pour mener à bien de telles actions ; un manque de communication entre les différents échelons administratifs empêche toute concertation.
UN MOYEN ET UNE FIN
Influencer la décision finale n'est un motif de participation prédominant qu'en Turquie ; en Syrie, l'échange de vues sur l'eau est largement plébiscité ; en Jordanie, les participants voulaient donner leur opinion et échanger, mais aussi éviter les conflits. « Il m'est apparu que la "participation" est plus un processus sur la durée qu'un processus permettant d'atteindre un objectif unique, comme une décision. La participation structurante est un moyen et une fin en elle-même. Dans les pays que j'ai suivis, j'ai noté une aspiration publique,
une maturité et une volonté d'exprimer son point de vue », conclut le chercheur.