Voici une affaire qui a fait beaucoup de bruit : le marché de délégation du service public de l'eau et de l'assainissement de la Ville de Montauban (Tarn-et-Garonne), qui avait été remporté par Veolia Eau, a été annulé par le tribunal administratif de Toulouse. L'attribution du marché avait été décidée le 21 décembre par vote du conseil municipal, qui avait choisi entre les candidatures de Veolia Eau, Saur et Suez Environnement. Après la gestion des déchets de la ville, le groupe Veolia Environnement se voyait ainsi confier la gestion des services publics de l'eau et de l'assainissement - jusqu'à présent exploités en régie publique - sous la forme d'un contrat de régie intéressée fixé pour une durée de neuf ans, avec démarrage au 1er février 2010.
BAISSE DES PRIX
Grâce à ce contrat, la Ville affichait une baisse de 6 % du prix de l'eau et de 10 % de la taxe d'assainissement pour l'année 2010. Les investissements devaient s'élever à 30,4 millions d'euros sur les neuf ans du contrat, dont 8,7 millions d'euros supportés par l'opérateur (remplacement de branchements, installation de systèmes de télérelève).
Mais Suez Environnement s'est estimé injustement écarté et a porté plainte en référé. Le tribunal administratif de Toulouse a décidé de lui donner raison le 5 janvier en annulant la décision du choix du délégataire. D'après ce tribunal, pour fonder son choix, le pouvoir adjudicateur a pris en compte des promesses de création d'emplois qui, dans leur majorité, « résultent de l'implantation de structures sans lien direct avec le contenu de la délégation de service public ». En effet, si les trois candidats avaient proposé un nombre équivalent d'une quarantaine de salariés pour faire tourner la nouvelle régie intéressée - contre 60 personnes qui travaillent dans l'actuelle régie publique -, ils ont été amenés au cours des négociations à proposer un nombre de créations d'emplois annexes dans le cadre de l'implantation locale d'un pôle environnemental. Ce nombre était de 232 emplois pour Veolia Eau et de 220 pour Saur, tandis que Suez Environnement avait proposé une fourchette comprise entre 150 et 260 emplois.
Pour la mairie de Montauban, le juge « [a retenu] à tort que l'engagement annexe de création d'emplois aurait été déterminant. Si tel avait été le cas, il est clair que c'est Suez qui aurait été choisi puisque, sur ce point, son offre était supérieure », indique un communiqué. De son côté, Isabelle Kocher, directeur général de Lyonnaise des eaux, estime que « cette décision est importante parce qu'elle va dans le sens du respect de la concurrence et de l'égalité entre les candidats ». L'affaire n'est pas terminée, puisque la Ville de Montauban a fait appel devant le Conseil d'État, mais il semble assuré que la création d'emplois qui ne concerne pas directement un service d'eau ne puisse pas faire partie d'une réponse à un appel d'offres de DSP, d'autant qu'elle rappellerait des pratiques proscrites du type droit d'entrée.