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EAU

Les risques sur l'eau e n cours d'évaluation

LA RÉDACTION, LE 1er NOVEMBRE 2010
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«Aujourd'hui, on n'en est plus à discuter de la réalité du changement climatique, en tout cas en ce qui concerne les conséquences sur l'eau, même s'il persiste des incertitudes sur "où, quand et comment" les effets se feront sentir largement», souligne Jean-François Donzier, directeur général de l'Office international de l'eau ( OIEau). Une observation qui résume parfaitement la situation en France. Une première étape est désormais franchie, celle de la prise de conscience, mais les décisions sont lentes à venir, faute de certitudes sur les risques attendus. Dans les zones plus vulnérables, les effets sont déjà ressentis, réchauffement des rivières, modification des régimes hydrauliques des cours d'eau, périodes de sécheresse, inondations, hausse du niveau de la mer sont déjà visibles - et les élus commencent à mettre en place des mesures concrètes. Ailleurs, c'est-à-dire sur la majorité du territoire français, il faudra passer par une étape intermédiaire : celle des études qui servent ensuite de support à la décision politique. C'est en montagne que les questions liées à gestion de l'eau et des risques liés au changement climatique ont progressé le plus rapidement. « Les signes de l'évolution du climat y sont plus clairs, avec une hausse des températures deux fois plus élevées que la moyenne mondiale », rappelle Jean-François Donzier. Les collectivités locales ont donc déjà mis en place des mesures de protection, même si, trop souvent, cela se fait à la suite d'événements majeurs. « Il faudrait désormais passer d'une gestion du jour d'après à la gestion du jour d'avant », soulignait Valerio Segor, responsable du service des aménagements hydrauliques et glissements de terrain de la région autonome Vallée d'Aoste lors des États généraux sur l'eau en montagne qui se sont tenus à Megève en septembre 2010. « C'est triste à dire, mais il est nécessaire d'avoir une crue tous les dix à vingt ans pour que l'intérêt et les moyens restent présents », ajoute-t-il. LE PARTAGE DES USAGES Malgré ce constat pessimiste, l'ensemble des interventions montrait que, dans le massif alpin, de nombreuses actions se mettaient en place pour gérer de façon concrète les risques liés à l'eau. Le pays de Faverges a ainsi pu prévenir et gérer sans conséquences majeures la survenue d'une crue torrentielle décennale (lire encadré p. 32). De tels événements ne constituent cependant qu'une partie des conséquences du changement climatique, et les discussions ont largement porté sur le partage des usages car, si l'eau est abondante en haut des massifs montagneux, les quantités en sont cependant finies. La modification du régime de précipitations au cours de l'année et l'abaissement de la limite pluie/neige ont des conséquences importantes sur la gestion de la ressource. Il faut de l'eau pour les agriculteurs, pour la production d'électricité, pour l'accueil des touristes et pour les activités de loisirs indispensables à la santé économique de ces régions. « Si les touristes ne viennent pas, nous aurons assez d'eau pour tout le monde », rappelle avec humour Sylviane Grosset-Janin, maire de Megève. Dans tous les cas, la gestion concertée, impliquant à la fois les élus, les techniciens, les scientifiques et la population, a démontré son efficacité. DES CONSÉQUENCES À L'AVAL La hausse des températures en montagne a des conséquences jusqu'en plaine et même jusqu'à l'embouchure des fleuves. Le dérèglement du système nivo-glaciaire, avec la fonte des glaciers et la réduction de l'enneigement, modifie en effet profondément le régime des cours d'eau sur tout leur parcours. « S'il y a moins de neige en hiver, la pluie s'écoule vers la plaine à une période où il y a déjà beaucoup d'eau, avec un risque accru d'inondations, explique Jean-François Donzier. La fonte des neiges libère ensuite moins d'eau au printemps et, si la fonte des glaciers compense un peu cette diminution pour l'instant, on observera cependant des étiages de plus en plus marqués. » L'adaptation au changement climatique doit donc être envisagée sur l'ensemble d'un bassin versant pour assurer la disponibilité de la ressource pour tous les usages depuis l'amont jusqu'à l'aval. « Il faudra par exemple redéfinir le rôle de l'hydroélectricité : si l'on réclame plus d'eau en été pour faire fonctionner les climatiseurs, les cours d'eau supporteront-ils le pic d'usage de l'hiver suivant ? », souligne-t-il. Le réchauffement des cours d'eau, outre son influence sur les écosystèmes, remet en question le refroidissement en basses eaux des centrales nucléaires et thermiques et la quantité d'électricité qu'elles peuvent fournir. La navigation fluviale pourrait aussi être remise en question ainsi que l'irrigation agricole ou encore l'alimentation en eau potable des grandes villes. Le concept d'hydrosolidarité semble ainsi prendre une nouvelle importance face au changement climatique. « On a longtemps parlé de solidarité amont-aval, mais, désormais, c'est une partie de l'arrière-pays qui a soif, souligne François Prévost, responsable du développement rural à la Société du Canal de Provence (SCP). Les petites communes du Verdon ont ainsi du mal à financer le maintien de la qualité de leurs rejets dans la rivière et nous avons mis en place un accord de partenariat avec le parc national, avec notamment un accompagnement sur la part d'autofinancement qui reste à la charge des communes. » Depuis 2008, un budget de plus de 300 000 euros par an, financé par les recettes de l'eau de la SCP, y est consacré, et un autre accord de partenariat est envisagé dans le parc national du Luberon. UNE BOÎTE À OUTILS D'une manière générale, les participants aux États généraux de Megève reconnaissent que la DCE fournit une boîte à outils appropriée, notamment si l'on prend en compte les directives filles sur la prévention des risques, et si l'on y ajoute des stratégies de prévention de la sécheresse et des conséquences du changement climatique. À part en Flandres et en Hollande où la hausse du niveau de la mer renforce le sentiment d'urgence, il faudra cependant attendre la deuxième vague d'application, à partir de 2015, pour voir des mesures spécifiques se mettre en place. La plupart des agences de bassin ont cependant déjà lancé de nombreux projets d'études à réaliser d'ici là afin de bien cibler les mesures à mettre en oeuvre. « Le Sdage comprend déjà des éléments qui seront utiles pour atténuer les conséquences du changement climatique, comme les économies d'eau et la gestion quantitative des ressources, souligne Pascal Billault, hydrogéologue à l'agence de l'eau Loire-Bretagne. UN SUJET ENCORE NOUVEAU Il nous faudra cependant convaincre les partenaires socio-économiques pour aller plus loin et nous aurons besoin d'arguments solides, notamment pour convaincre les agriculteurs.» Une étude a ainsi été demandée à Météo-France pour évaluer les conséquences sur les ressources en eau grâce à un modèle qui prend en compte toutes les eaux de surface et les eaux souterraines. «Il s'agit pour nous d'un sujet encore nouveau, même si nous avons déjà pu établir, à partir de nos réseaux de surveillance, quelques constats sur l'augmentation de la température des cours d'eau. Le Rhin, qui est pourtant un fleuve glaciaire, a ainsi pris 3 °C en quarante ans », souligne Patrick Weingertner, directeur du département planification, étude et milieux à l'agence de l'eau Rhin-Meuse. Dans ce bassin, le changement climatique pourrait surtout accélérer certains phénomènes déjà existants pour lesquels des mesures sont déjà en place, comme l'arrêt de la délivrance de permis de construire dans les zones inondables. « À l'heure actuelle, nous sommes concentrés sur les questions liées aux pollutions, notamment agricoles, avec les fuites de nitrates vers les cours d'eau et les nappes souterraines qui ont des conséquences sur la qualité de l'eau disponible. Nous allons d'ailleurs étudier l'influence potentielle du changement climatique sur ces questions », précise Patrick Weingertner. VIGILENCE ET PROTECTION Un certain nombre d'études prospectives sont déjà en cours à l'échelle transfrontalière, mais également sur le territoire national, afin d'évaluer les conséquences prévisibles sur un fleuve comme le Rhin. La région Lorraine a également engagé une large étude sur l'évaluation des conséquences de divers scénarios d'évolution climatique. En Artois-Picardie, une étude a déjà été réalisée sur les retombées éventuelles du changement climatique sur les ressources en eau, les précipitations et le cycle court de l'eau dans la région, dans le cadre des trois scénarios du GIEC. « Le scénario moyen, le plus probable à nos yeux, pourrait notamment provoquer une compétition plus grande pour la ressource en eau, alors qu'aujourd'hui, il est très rare que nous ayons des arrêtés de sécheresse et des problèmes d'inondations », indique Delphine Martin, directrice de la planification à l'agence de l'eau Artois-Picardie. Si l'étude ne donne pas d'indications précises sur les mesures à prendre, elle appelle quand même les responsables politiques à rester vigilants. Certaines collectivités du bassin s'intéressent au risque spécifique de submersion marine, notamment dans les zones de polders, avec des risques d'inondation, mais également de contamination des eaux souterraines dans une zone où la ressource en eau est déjà l'une des plus faibles d'Europe. « Dans le district international de l'Escaut, on constate clairement les différentes stratégies appliquées par les trois pays concernés. Le plan digue français, déjà en place pour un coût de 8 millions d'euros, a une vocation uniquement de protection des populations. En Belgique, les stratégies portent sur la protection des personnes et de l'environnement, en fonction des coûts relatifs au risque, pour un budget total d'un peu plus d'un milliard d'euros d'ici à 2030, a souligné Arnould Lefebure, au cours des États généraux de Megève. Les Pays-Bas envisagent la question à plus long terme et prennent les questions de protection des personnes et de l'environnement, mais incluent également les perspectives de développement économiques dans leur programme delta qui, à échéance 2050, pourrait coûter 100 milliards d'euros ». En France, à l'échelle nationale, les agences de bassin ont également le regard tourné vers un projet ambitieux du ministère de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de la Mer (MEEDDM) actuellement en cours de réalisation et qui devrait fournir un éventail de propositions d'ici deux ans (lire encadré p. 34). En attendant les données de ces études, tout le monde semble s'accorder sur la mise en place à court terme de mesures dites « sans regret ». LIGNE DE CONDUITE Les économies d'eau sont au premier rang de ces actions et, avant tout, la chasse aux fuites, encore trop présentes sur l'ensemble des réseaux de distribution en France. Les pratiques agricoles peuvent également être modifiées, en choisissant par exemple des cultures moins gourmandes en eau dans les régions où les ressources se réduisent. Encore très peu pratiquée en France, la réutilisation de l'eau issue des usines de traitement des eaux usées pourrait être plus largement déployée. Une meilleure gestion des espaces naturels permettrait de recréer des éponges naturelles, comme les zones humides ou les champs d'expansion, qui constituent des réserves d'eau en période hivernale ou permettent de retenir l'eau en altitude. SUBVENTIONS EN PLACE Dans les bassins les plus concernées, notamment en Adour-Garonne et Rhône-Méditerranée et Corse (RMC), la réflexion est déjà bien avancée et diverses approches à long terme sont envisagées. L'agence de l'eau Adour-Garonne a ainsi déjà mis en place des subventions pour la création de lacs collinaires, le conseil général d'Aquitaine et la communauté urbaine de Bordeaux ont mis en place des mesures de préservation de la nappe et, à Saintes, une concertation a eu lieu pour mieux partager l'eau entre l'irrigation agricole et l'ostréiculture. L'agence de l'eau Rhône-Méditerranée et Corse, de son côté, met en place de nombreuses mesures d'économies d'eau et des stratégies de gestion de la sécheresse et de la pénurie d'eau, notamment en mobilisant de nouvelles ressources avec, par exemple, la reconnexion de bras morts de cours d'eau pour alimenter le bassin aval. La difficulté principale, à l'heure actuelle, reste cependant de sensibiliser toutes les parties prenantes à la notion de risque attendu en l'absence de signes concrets et d'un sentiment d'urgence. De grandes périodes de sécheresse, comme en 2006-2007, suivies d'années très pluvieuses comme en 2009 et 2010, ne mettent pas en évidence une tendance visible ou inéluctable. « Le changement climatique n'est pas un phénomène instantané, ni linéaire. Il faut rappeler que les Hollandais ont eu ce débat il y a cinq ans à propos des portes de Rotterdam et que, l'hiver dernier, ils les ont fermées deux fois », insiste Jean-François Donzier. En France, le débat ne fait finalement que commencer, avec des idées qui descendent de la montagne et remontent les estuaires pour gagner peu à peu la plaine...


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