Les travaux de remodelage des épis, longues langues enrochées barrant la Loire souvent perpendiculairement, entre Chalonnes et Bouchemaine sur une dizaine de kilomètres en aval d'Angers, ont-ils atteint leur objectif ? Effectués à l'automne 2009, ils ont consisté à raccourcir et abaisser ces épis, qui ne représentent qu'une partie des 700 épis construits entre Angers et Nantes pour permettre la remontée des bateaux en chenalisant la Loire (1).
L'opération vise à faire migrer une partie des sédiments retenus entre les épis vers le chenal et ainsi à remonter la ligne d'eau d'étiage de 25 à 35 cm ; elle sert aussi à refaire fonctionner partiellement les annexes hydrauliques plus ou moins déconnectées du fleuve, surtout en été. Cela contribue à favoriser la biodiversité, reconstituer les frayères, lutter contre le déchaussement d'ouvrages d'art (quais, piles de pont...) et faire remonter le bouchon vaseux (2), source de surmortalités piscicoles. Ce programme fait partie du 3e Plan Loire (2007-2013), coordonné par le préfet de la Région Centre.
LA PRUDENCE EST DE RIGUEUR
Voies navigables de France (VNF), maître d'ouvrage de l'opération, reste très prudent quant aux résultats : « Un suivi est engagé sur cinq ans : VNF étudie la ligne d'eau, l'université de Tours suit la remobilisation des sédiments et la DREAL Pays de la Loire les vitesses et débits, explique Sylvain Bron, chargé d'opération chez VNF. Ces relevés ont commencé, mais il faut attendre deux crues de période de retour de deux ans (3 100 m3/s) et deux étiages (200 m3/s) pour conclure. Il y a des secteurs où l'on observe visuellement une remobilisation des sédiments, mais ces derniers se sont peut-être redéposés sur un secteur aval. Un bureau d'études fera la synthèse pour une présentation au comité de suivi scientifique en juin 2011. »
LES ASSOCIATIONS S'INTERROGENT
Au Comité Loire pour demain (CLD), qui regroupe 33 associations, 318 riverains et 24 communes riveraines, on s'impatiente : « Sur quelles bases sont données les conditions de débit du suivi ? Il s'agit plus de repousser aux calendes grecques les opérations utiles qui doivent concerner tout l'estuaire. En attendant, l'objectif premier du Plan Loire de rehausser la ligne d'eau et qui date de quinze ans [Ndlr : énoncé dès le premier plan de 1995-1999] n'est pas atteint », déplore le président de l'association, Jacques Birgand. « À cette multiplicité d'acteurs (agence de l'eau, Région, État, Établissement public Loire, Voies navigables de France, Fonds européen de développement régional, notamment), nous préférerions un préfet coordonnateur qui tranche », poursuit-il, redoutant que l'État ne finisse par couper les crédits. Alain Fagat, adjoint au maire de La Possonnière, voit l'expérimentation en cours comme un point de départ et milite pour une solution de l'aval à l'amont. Le débat n'est pas donc prêt d'être fini.