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Arrêt Olivet : 500 cont rats remis en cause

LA RÉDACTION, LE 1er FÉVRIER 2011
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Le 8 avril 2009, lorsque le conseil d'État a présenté ses conclusions dans l'affaire « Commune d'Olivet », cela a fait l'effet « d'une bombe à retardement dans le paysage de la délégation de service public (DSP) », selon l'expression de Stéphane Baudry, directeur associé du cabinet Calia Conseil. La haute juridiction a en effet considéré que les dispositions limitant la durée des contrats de DSP des lois Sapin, du 29 janvier 1993, et Barnier, du 2 février 1995, s'appliquaient aux contrats signés avant l'entrée en vigueur de ces mesures. Ce que le conseil d'État souhaitait avant tout, c'était de mettre fin à des contrats de très longue durée générant de véritables rentes de situation. Mais sa décision a entraîné une large déflagration : l'avenir des contrats d'eau et d'assainissement conclus avant le 4 février 1995 (date d'entrée en vigueur de la loi Barnier) et dont le terme contractuel est postérieur au 4 février 2015 (date à laquelle la durée maximale de vingt ans imposée par cette loi sera atteinte) n'est plus tout à fait garanti. Ces conventions ne seront pas automatiquement caduques au 5 février 2015, mais le Conseil d'État dit « qu'elles ne pourront continuer à être régulièrement exécutés que si elles sont justifiées dans leur durée ». Si ce n'est pas le cas, il faudra prévoir l'organisation d'une solution opérationnelle pour 2015 : le calendrier est donc relativement serré (lire encadré p. 27) et les collectivités concernées doivent rapidement prendre la mesure des enjeux. LA COLLECTIVITÉ DÉCISIONNAIRE « Dans cette affaire, c'est la collectivité qui est décisionnaire. Elle doit préparer le dossier en se rapprochant de l'opérateur. Puis, le cas échéant, elle doit saisir le directeur départemental des finances publiques (DDFIP, l'ex-trésorierpayeur général) pour lui exposer les éléments justifiant une validation de la durée », prévient Béatrice Arbelot, déléguée générale de la Fédération professionnelle des entreprises de l'eau ( FP2E). Si la collectivité ne fait rien et qu'il y a poursuite « de fait », l'insécurité juridique sera considérable ; n'importe qui pourra déposer un recours pour faire cesser l'exécution du contrat, et le service d'eau ou d'assainissement ne sera alors plus assuré. « Et si le contrat s'éteint du fait de l'inaction de la collectivité, alors que les justificatifs de durée existent, elle s'expose à un recours indemnitaire du délégataire », ajoute Béatrice Arbelot. PANORAMA DES CONTRATS D'après l'estimation des délégataires, 500 contrats sont concernés. Quelques dizaines seulement correspondent à des contrats de très longue durée tel celui, de 99 ans, signé par la commune d'Olivet. On peut citer le contrat d'eau de la ville du Touquet, signé en 1958, prolongé en 1997 par un avenant jusqu'en 2038. Le reste est constitué essentiellement de contrats de trente ans, conclus entre 1985 et 1995. Contractuellement, certains arrivent à terme quelques mois après l'échéance, tandis que d'autres la dépassent d'une bonne quinzaine d'années : cet élément fait fortement varier le niveau de l'enjeu mais, pour autant, l'étude des conditions de maintien ou d'interruption de tous ces contrats doit être diligentée avec le même soin, afin d'en assurer une sécurité juridique. « Certains sont des contrats d'affermage classiques, avec ou sans renouvellement, n'exigeant aucun investissement significatif du délégataire : pour ceux-là, une durée de plus de vingt ans est manifestement injustifiée. D'autres sont des contrats de type concessif, pour lesquels les conséquences sont plus délicates à évaluer », précise Régis Taisne, adjoint au chef de service de l'eau à la Fédération nationale des collectivités et des régies concédantes ( FNCCR). PLUS OU MOINS MOBILISÉES Plusieurs grandes collectivités se sont déjà saisies du sujet. Toulouse, la communauté urbaine de Bordeaux (CUB), le Syndicat de l'eau potable du bassin cannois, Dunkerque Grand Littoral, Toulon Provence Méditerranée ont engagé une négociation avec leur délégataire ou sont sur le point de le faire, dans le cadre ou en parallèle de la renégociation quinquennale. « La communauté urbaine de Bordeaux a lancé une série d'études juridiques, économiques et techniques afin de définir un mandat de négociation fixant les enjeux de la révision quinquennale pour la période 2011-2016. Puisque le terme de l'application de cette révision interviendra après février 2015, il convient avant de démarrer la négociation avec Lyonnaise des eaux, de mesurer les conséquences de la jurisprudence Olivet sur ce contrat finissant contractuellement en 2021 », souligne Yves Roquelet, responsable du centre de l'inspection générale et de l'audit à la CUB. Les deux questions sont liées, car le réajustement du contrat doit prendre en compte simultanément tous les éléments ayant un impact financier, y compris la durée. « À Toulon, la négociation a duré plusieurs mois et a été assez compliquée car, à l'origine, le contrat portait à la fois sur l'eau et sur l'assainissement, témoigne Gilles Vincent, vice-président de Toulon Provence Méditerranée. Aujourd'hui, ces deux compétences relèvent respectivement de la ville et de la communauté d'agglomération, toutes deux évidemment présentes à la table des négociations. On s'oriente aujourd'hui vers une poursuite jusqu'au terme contractuel initial du contrat, en 2019, moyennant une sensible réduction des tarifs. » POSITION DIFFICILE À GÉRER D'autres grosses collectivités n'ont pas encore engagé de travaux préliminaires sur le sujet, c'est le cas notamment du Grand Dijon, dont au moins deux contrats, en eau potable, sont concernés. On sait par ailleurs que la situation sera difficile à gérer pour les nombreux petits syndicats et communes autonomes touchés, car ils disposent de peu de moyens pour se doter d'une assistance à maîtrise d'ouvrage. Dans le Lot-et-Garonne, une réunion organisée, en décembre, par le préfet a établi qu'il y avait douze contrats affectés, dont un d'une durée de soixante ans, tous opérés par Veolia Eau. Le préfet a enjoint les collectivités à prendre une décision d'ici la fin de l'année. APPROCHE COMPTABLE La priorité, pour chacune de ces collectivités, est de conduire un audit approfondi de la convention aux plans financier, juridique et technique pour évaluer son « espérance de vie ». Poursuivre le contrat n'est envisageable qu'à condition que les investissements pris en charge par le délégataire, dans le contrat initial ou par voie d'avenants, ne soient pas amortis à la date fatidique. C'est là le point clé, car cette notion d'amortissement est sujette à différentes interprétations. Avec un raisonnement comptable pur, on pourrait considérer par principe que, la durée d'un contrat étant généralement calée sur la durée des amortissements, le délégataire aura forcément dans sa comptabilité des valeurs résiduelles non amorties si le contrat s'interrompt avant son terme. Or une telle vision, exclusivement comptable, ne saurait rendre compte de la réalité économique des amortissements : c'est ce que précise une autre décision du Conseil d'État, l'arrêt Maison Comba, rendu le 11 août 2009. Il semble donc plutôt qu'il s'agira de déterminer si le contrat, au cours de sa vie, a atteint ou non un équilibre économique global ayant permis d'amortir les investissements. Ce qui implique d'apprécier s'il a offert au délégataire un niveau de rentabilité « acceptable ». L'exercice est difficile, parce que l'appréciation de l'équilibre économique global ne se fonde sur aucune définition précise et qu'en outre, s'agissant de contrats anciens, la collectivité dispose souvent de peu de données techniques et financières dans ses archives. En effet, plus les contrats sont vieux, plus leur rédaction est évasive (du type « le délégataire investit » et « le délégataire s'engage à assurer le renouvellement », sans aucun détail sur les programmes ni les montants). DES PIÈCES MANQUANTES Les avenants plus récents sont plus diserts, mais pas forcément suffisants pour apprécier l'économie réelle du contrat depuis le début. Il n'y a généralement pas de comptes d'exploitation prévisionnels, alors que ceux-ci sont l'outil donnant une vision claire de la rentabilité attendue du délégataire. « Et les comptes rendus financiers sont fréquemment inexistants avant 1995. De toute façon, leur consolidation n'est pas suffisante pour approcher l'économie globale du contrat, car ils comprennent des charges calculées, lissées sur la durée », détaille Stéphane Baudry. Tout cela place la collectivité délégante dans une position de faiblesse pour la négociation qui va s'ensuivre. Il lui faut donc arriver à rebâtir un tableau des flux de trésorerie, en retrouvant les montants précis et les dates des investissements réellement effectués par le délégataire : c'est le but de l'audit. « Pour la partie prospective de la simulation, des hypothèses doivent être posées sur l'évolution des assiettes de facturation, des charges de fonctionnement ou de la politique patrimoniale. L'établissement d'un tel tableau financier, rétrospectif et prospectif, permet de calculer l'économie du contrat à différentes dates possibles d'interruption », poursuit Stéphane Baudry. Sur cette base, la collectivité pourra engager les discussions avec le délégataire. ACCORDS ET DÉSACCORDS Par essence, les opérateurs sont intéressés à ce que les contrats se poursuivent. Pour autant, ils sont bien obligés de concéder que certains contrats ne pourront pas continuer. « C'est clair et net : les contrats dont la durée a simplement été un élément de négociation à l'origine, et qui ne supporteront plus d'amortissement des investissements en février 2015, seront interrompus d'un commun accord entre le maître d'ouvrage et le délégataire, confirme Marc Reneaume, directeur de Veolia Eau pour la France. D'ailleurs, Veolia Eau a récemment convenu avec certaines collectivités de l'arrêt de leur contrat à cette date, puisque, effectivement, tous les investissements seront amortis. » Dans l'année qui vient, on devrait donc, en toute logique, voir certaines collectivités prononcer la caducité de leur contrat en février 2015, date à laquelle le délégataire « sortira en douceur », à moins qu'il ne soit reconduit dans le cadre du nouvel appel d'offres. Un consensus en sens inverse, c'est-à-dire en faveur d'une poursuite jusqu'au terme contractuel ou, au moins, jusqu'à un terme intermédiaire, de contrats lourdement concessifs sur lesquels il reste à l'évidence des investissements non amortis, pourra aussi se présenter. Mais on va sans doute assister, dans un grand nombre de cas, à des divergences d'appréciations sur le fait qu'il reste ou non des investissements à amortir. L'avenir du contrat se discutera alors âprement. Des collectivités joueront sans doute la carte d'une potentielle interruption, tout en sachant qu'elles se contenteront des concessions que le délégataire fera pour obtenir un accord sur la poursuite. Elles adopteront une telle stratégie, soit parce qu'elles estimeront ne pas avoir suffisamment d'éléments solides pour exclure le maintien du contrat, soit par crainte des poursuites indemnitaires que pourrait, malgré tout, intenter le délégataire. UNE PARTIE DE POKER Un exemple est déjà connu : celui de Toulouse, qui a obtenu de Veolia Eau, son délégataire depuis 1990, une diminution du tarif de l'eau de 25 % ainsi que la promesse de nouveaux investissements. Moyennant quoi, la collectivité a annoncé sa décision de poursuivre le contrat jusqu'à son terme contractuel, en 2020. « C'est le choix de la raison », a commenté Pierre Cohen, maire de Toulouse, dans une communication à la presse, en précisant que la collectivité s'épargne ainsi un contentieux qu'elle a chiffré entre 9 et 40 millions d'euros d'indemnités. Quelques voix s'élèvent néanmoins pour signaler les risques d'un tel compromis, qui vise à mettre à la charge du délégataire de nouveaux investissements, de nouvelles obligations d'exploitation ou à baisser sa rémunération de manière significative. « En réduisant la marge bénéficiaire globale, ces options rendent économiquement justifiable la poursuite. Mais, par nature, c'est une reconnaissance implicite que le contrat était, en fait, suffisamment rentable pour en réduire la durée », décrypte un expert financier. « Que se passera-t-il si la chambre régionale des comptes diligente un contrôle et constate que les investissements étaient bel et bien amortis ? », s'interroge Régis Taisne. Les contrats ainsi maintenus pourraient aussi faire l'objet de recours de la part d'associations ou d'usagers, et il appartiendrait alors au juge de trancher sur la légitimité du choix d'une poursuite. Pour autant, interrompre le contrat n'est pas moins risqué, et on peut se demander si des collectivités feront ce choix contre l'avis de leur délégataire, au risque d'affronter un contentieux indemnitaire qui prendra des années. À Montbéliard, la communauté d'agglomération a annoncé sa volonté d'arrêter, en 2015, le contrat de trente ans signé en 1992 avec Veolia Eau. Dans le cadre de la renégociation quinquennale en cours, la collectivité souhaite purger le prix de l'eau du droit d'entrée qui le grève encore. L'AVIS DU DDFIP Le 7 décembre dernier, une instruction fiscale de la Direction générale des finances publiques a apporté quelques précisions sur les conditions de l'examen, par le DDFIP, des justificatifs de poursuite. Elle souligne notamment qu'il aura à « tenir compte » dans son appréciation contemporaine du contrat « d'éléments que le droit en vigueur n'admet plus, comme le versement de droits d'entrée ou la reprise des annuités d'emprunts ». Cette mention laisse perplexe certains experts. « Il semble difficile d'imaginer une justification d'une poursuite, au-delà de 2015, qui se baserait sur des droits d'entrée, alors que ceux-ci n'ont, dans la plupart des cas, pas servi à financer la politique de l'eau », estime Stéphane Baudry. Le DDFIP devra ensuite apprécier l'adéquation entre les prestations prises en charge par le délégataire et la durée de l'amortissement économique. Une tâche difficile, compte tenu de la complexité de l'équation financière des contrats. D'autant que l'instruction fiscale ne propose pas de critères d'appréciation de la durée « opportune » d'une convention de DSP de plus de vingt ans en cours d'exécution.


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