En réseau d'assainissement, des bactéries sulfato-réductrices sont susceptibles de se développer dans les effluents en phase anoxie et de générer du sulfure d'hydrogène (H 2S) à partir des sulfates. Ce gaz, toxique et mortel à partir d'un certain seuil, pose des questions cruciales de sécurité dans un milieu confiné où interviennent des opérateurs. Si les exploitants sont souvent sollicités par les collectivités pour des problèmes d'odeurs, « la nuisance olfactive de l'H2 S ne représente que la partie émergée de l'iceberg, juge Christophe Renner, expert traitement de gaz et valorisation chez Veolia. La sécurité sanitaire des agents est notre priorité. Sans compter les dégâts potentiels provoqués sur les canalisations par ce gaz très corrosif. »
Certains réseaux sont plus exposés que d'autres. Plus le temps de séjour des effluents y est long, plus la température augmente et plus le dégazage de l'H2 S est important. Les réseaux très longs sont donc les plus sensibles. Tout comme les réseaux des villes balnéaires et touristiques, souvent surdimensionnés pour gérer le flux estival et où se développent des odeurs à partir de la mi-saison et en hiver quand les temps de séjour des effluents s'allongent. Plus globalement, la baisse de consommation en eau potable en France se traduit par une charge polluante plus concentrée dans les effluents et un risque accru de dégazage en réseau. Pour Christophe Renner, cette tendance va générer une augmentation globale des émissions de sulfure d'hydrogène.
Pour maîtriser ce phénomène, les exploitants jouent sur plusieurs tableaux. Des traitements par injection de produits chimiques agissent soit en curatif comme le chlorure ferrique en détruisant le gaz formé, soit en préventif avec des sels de nitrate qui bloquent sa production par réoxygénation des effluents. Veolia vient de boucler un travail de trois ans sur la modélisation de la production de sulfures en réseau en fonction des chutes d'eau, du temps de séjour des effluents, des doses de réactifs injectés. Idem chez Saur qui utilise les résultats de sa modélisation pour déterminer la localisation de capteurs en réseau (H2 S, humidité, tem-pérature). « Nous pourrons ainsi piloter plus finement les traitements préventifs en réseau », précise Julie Josset chez Saur. Cette surveillance en continu des odeurs n'en est qu'à ses prémices. Elle requiert la mise en œuvre de capteurs robustes et autonomes, qui ont un coût. Mais le smart water est en route.