Àl'heure où l'environnement s'invite partout, il aurait été inconcevable de ne pas le voir entrer à l'hôpital, lieu par excellence qui se doit d'être exemplaire, tant l'environnement apparaît comme une composante essentielle de la santé humaine. Lors du lancement, en février 2007, du plan d'investissement Hôpital 2012, Xavier Bertrand, alors ministre de la Santé, avait d'ailleurs annoncé la couleur : « Je souhaite qu'aucun nouveau projet de construction ne soit financé s'il omet la dimension environnementale. » Depuis, une circulaire du 12 décembre impose aux hôpitaux la signature d'un contrat d'assistance à maîtrise d'ouvrage sur la qualité environnementale afin d'atteindre des objectifs de performance sur au moins quatre des quatorze cibles de la démarche HQE (cibles 1, 2, 4 et 7, voir p. 31).
Bien que les hôpitaux ne soient pas obligés de faire appel à la HQE pour répondre à ces exigences, le ministère de la Santé, la Mission d'appui à l'investissement hospitalier ( MAINH), la Caisse des dépôts, l'Ademe et le CSTB se sont lancés en septembre dernier dans la création d'un référentiel HQE propre aux établissements de santé. Six mois plus tard, la version 1 voyait le jour. Sept établissements ont participé à son élaboration : les hôpitaux d'Alès et d'Angers, le centre hospitalier Sud Francilien, la polyclinique de Pontivy, le centre médico-social de Vitry-sur-Seine, la clinique de Beaumont-sur-Oise et le centre d'accueil pour autistes « La clé des champs », dans les Yvelines. Afin d'intégrer les spécificités de l'hôpital à la HQE, une solution alternative était envisageable, explique Jean-Louis Plazy, de l'Ademe : « On pouvait ajouter des cibles ou alors maintenir les cibles existantes en adaptant le niveau d'exigence. En effet, un hôpital n'est pas un bâtiment comme les autres. Il fonctionne 24 heures sur 24, consomme davantage d'eau chaude, doit être chauffé de façon à tenir compte des personnes fragiles, reçoit plus de visiteurs, et notamment des personnes malades ou à mobilité réduite. C'est finalement la deuxième solution qui a été adoptée. » Par ailleurs, ces bâtiments ont déjà, du fait de leur certification par la Haute Autorité de santé (lire encadré), des niveaux d'exigence relativement élevés en matière de déchets ou d'eau, par exemple.
Hautes exigences
« Même si la certification HAS concerne le fonctionnement des hôpitaux et non la qualité du bâti, ses exigences sont convergentes et parfois supérieures, sur certains points, aux cibles de la HQE », explique Pierre Savin, à la MAINH. Sur d'autres points, en revanche, elles peuvent s'avérer en contradiction. Pierre Boussemart, à l'hôpital de Douai, cite l'exemple de l'eau chaude sanitaire : « À cause du risque de légionelles, il était difficile, coûteux et finalement pas très écologique d'utiliser l'énergie solaire », car cette énergie n'aurait pas suffi pour atteindre la température au-delà de laquelle elles meurent.
Techniquement, deux innovations distinguent la certification HQE Hôpitaux de celle concernant les bâtiments tertiaires. « Nous avons d'abord établi un zonage entre les zones de soins et les zones d'hébergement, explique Patrick Nossent, président de Certivéa. En effet, pour des raisons sanitaires de renouvellement de l'air, entre autres, les zones de soins consomment énormément d'énergie et sont d'ailleurs exclues de la réglementation thermique. »
Pour ces zones, aucun seuil n'a été fixé, mais pour obtenir la certification, il faudra tout de même faire des efforts et le prouver. Un tel dispositif pourrait d'ailleurs être intégré aux futures certifications HQE, pour les plates-formes logistiques, par exemple, dans lesquelles les zones de stockage et celles de bureaux ne peuvent répondre aux mêmes exigences. Autre innovation, la certification HQE Hôpitaux fixe pour la première fois des seuils d'émission de polluants atmosphériques. En ligne de mire notamment : le formaldéhyde. Là aussi, un tel niveau d'exigence présage de ce que seront sans doute les certifications HQE de demain.
Mais certains établissements de santé n'ont pas attendu pour se lancer. L'un des premiers est le centre hospitalier d'Alès. « C'est à la suite d'une proposition de l'équipe de direction que la démarche HQE a été engagée en 2001, explique Isabelle Martin, directrice adjointe. Puis, en 2002, nous avons répondu à un appel d'offres de l'Ademe et du CSTB. Bien qu'il ne concernait pas un bâtiment tertiaire, notre projet a été retenu comme pilote. »
Alès pionnier
Le centre d'Alès, qui ouvrira ses portes en 2010, a notamment choisi d'apporter à son bâtiment une inertie thermique importante, permettant d'atteindre des niveaux de performance supérieurs de 15 % à ceux de la RT 2000 (soit ceux de la RT 2005 aujourd'hui), ou encore de prendre en compte les gros orages qui frappent la région cévenole en traitant les eaux pluviales et en végétalisant le site. Le choix des matériaux de revêtement des sols a été pensé à la fois pour répondre aux exigences environnementales, mais aussi aux contraintes d'entretien et de maintenance propres à un hôpital. En définitive, ce ne sont pas moins de sept cibles de la HQE qui obtiennent un niveau « très performant » (cibles 4, 6, 7, 8, 12, 13 et 14) et deux un niveau « performant » (cibles 9 et 11). Pionnier, l'hôpital d'Alès souhaite partager son expérience. C'est dans ce but qu'il organisait en juin 2006 une journée d'information. Deux autres hôpitaux également engagés dans la démarche HQE étaient présents : celui de Douai, dont l'ouverture est prévue avant la fin de l'année, et celui d'Orléans, dont l'appel d'offres sera lancé cet automne. Les travaux devraient commencer l'année prochaine, pour une livraison prévue en 2014.