Les industriels en sont conscients : l'énergie a cessé d'être bon marché. Il est donc rentable d'optimiser ses installations de production et d'utilisation. Cela passe avant tout par un bon diagnostic. L'Ademe propose des aides aux industriels pour leur « permettre d'identifier les gisements d'économies d'énergie et de mettre en oeuvre rapidement des actions de maîtrise des consommations rentables économiquement ». Elle finance jusqu'à la moitié des diagnostics d'efficacité énergétique, pour un montant maximum de 15 000 euros, à condition qu'ils soient effectués par des entreprises extérieures qui suivent le cahier des charges qu'elle a défini1.
Les actions avec un temps de retour immédiat sont généralement liées au comportement des salariés. Celles dont le temps de retour est inférieur à trois ans doivent conduire à des économies de 10 à 20 %. Enfin, celles qui offrent les plus longs temps de retour dégagent des économies supérieures à 20 %.
Optimiser son installation énergétique, c'est avant tout mesurer. Mesurer les performances des chaudières, turbines et autres équipements, bien sûr. Mais surtout mesurer l'usage de l'énergie : y a-t-il vraiment besoin d'air à une telle pression ? La chaleur ne se perd-elle pas en route ? Quels sont les taux de fuites ? Ensuite, on regarde si la puissance produite est adaptée à l'usage. On peut aussi améliorer les équipements de production eux-mêmes.
« La plupart des industriels n'ont pas le temps d'optimiser, ils considèrent que tant que leurs équipements fonctionnent, tout va bien, observe Pascal Lesage, responsable du développement des activités d'optimisation énergétique chez Bureau Veritas. Pourtant, il existe toujours des possibilités d'optimiser les « utilités » (vapeur, froid, air comprimé...) et de les adapter aux besoins. Dans certains réseaux, l'air est comprimé à 10 bars, alors que 2 bars suffiraient. Enfin, il faut chasser toutes les pertes : une petite fuite d'air comprimé, c'est 150 euros par an, une fuite de vapeur, 1 000 euros ! » Ainsi, la société Ineo, filiale de GDF-Suez, s'est attaquée aux fuites d'air comprimé chez l'un de ses clients. « Nous avons mis trois mois pour détecter et réparer 547 fuites et isoler 12 portions de tuyaux inutilisés (bras morts), décrit Vincent Bryant, responsable du département efficacité énergétique chez Ineo. Le débit des trois plus grosses fuites était d'environ 135 mètres cubes par heure. Cette recherche a eu un coût de 32 000 euros, mais les économies sont estimées à 97 000 euros par an. »
Premier fabricant de cercueils, les Pompes funèbres générales (PFG) ont, de leur côté, remplacé une veille chaudière au fioul par deux au bois. « En été, nous pouvons en arrêter une. Nous économisons ainsi 10 % de l'énergie par rapport à une chaudière unique », indique Frédéric Bajard, directeur de l'industrie, des achats et des approvisionnements et de la logistique chez PFG.
Une fois la consommation optimisée, on peut s'intéresser aux équipements de production de l'énergie. L'investissement est souvent conséquent, mais le jeu en vaut la chandelle. « Les technologies et les matériaux des turbines à gaz évoluent rapidement, indique Olivier Gueydan, directeur du secteur énergie de Siemens France. Ainsi, changer les ailettes d'une turbine peut augmenter le rendement de 5 %, et jusqu'à 10 % pour une turbine ancienne. C'est une opération coûteuse, qui implique un arrêt et un démontage de l'installation. Son retour sur investissement varie de quelques années à une ou deux décennies, selon le prix du gaz et de l'électricité. »
Certains équipements de production présentent aussi des dysfonctionnements. « Nous avons développé des outils de mesure de la performance sur les gros moyens de production et pouvons ainsi mettre en évidence certains défauts, indique Pascal Lesage. Ainsi, dans une usine d'incinération, nous avons repéré une vanne fuyarde : une partie de la vapeur passait à côté de la turbine, donc ne produisait pas d'électricité. »
Pour que l'optimisation soit durable, de plus en plus d'industriels font installer des systèmes de suivi en temps réel de leurs consommations d'électricité, de gaz, d'eau, de chaleur, couplés à des appareils de mesure de la température ou des conditions climatiques. Ils demandent parfois des alarmes pour prévenir lorsque la consommation dépasse un certain seuil, preuve de fuites ou de dysfonctionnements. « L'instrumentation d'un site revient à environ 6 000 euros par an », estime Pascal Lesage.