Leur caractéristique est connue : les productions photovoltaïque et éolienne dépendent des conditions météos. Mais les conséquences de cette intermittence sont multiples. Pour la gestion du système électrique en particulier, se pose une double question : comment rendre cette électricité disponible en fonction de la demande et comment l'intégrer facilement au réseau ? Pour y répondre, les batteries sont souvent citées en exemple comme complément idéal aux centrales renouvelables. Derrière cette solution, se cachent plusieurs cas de figure que les démonstrateurs de smart grid tentent aujourd'hui d'apprivoiser.
En fonction de leur lieu d'installation, les batteries peuvent en effet jouer différents rôles. Les démonstrateurs Nicegrid et Issygrid, par exemple, visent à créer des quartiers équipés en énergies renouvelables et réseaux intelligents. « Nous installerons des batteries au niveau du poste source assurant la liaison entre le réseau RTE et ERDF, ce qui permettra d'agir en amont et d'offrir à ERDF, l'opérateur du réseau de distribution, la possibilité d'aligner l'offre sur la demande », promeut Michaël Lippert, responsable marketing des systèmes de stockage chez Saft, fournisseur de batteries pour Nicegrid. Objectif analogue du côté d'Issygrid : « Nous mettrons une batterie sur un poste de distribution public, ce qui évitera le risque de montée en tension du réseau en cas de forte production photovoltaïque », témoigne Servan Lacire, directeur innovation et technologies de Bouygues Énergies & Services.
Mais dans les deux cas, d'autres batteries seront aussi installées directement dans les bâtiments où sera produite l'élec-tricité photovoltaïque. « Nous permettrons alors à l'occupant de minimiser sa facture électrique, poursuit Servan Lacire. Il pourra, d'une part, stocker l'électricité photovoltaïque lorsque celle du réseau sera peu chère, puis la consommer lorsque le prix d'achat de cette dernière augmentera. D'autre part, avec les batteries, l'occupant sera capable d'effacer ses pointes de consommation, et ainsi souscrire à un abonnement plus petit, donc moins cher. » En ce qui concerne l'éolien, où les enjeux sont peu ou prou identiques, le projet Venteea devrait voir le jour l'année prochaine (lire EME n° 14). En partie financé par les Investissements d'avenir, il vise notamment à tester un stockage d'une puissance de 2 MW pour faciliter l'intégration sur le réseau de l'énergie éolienne produite dans l'Aube.
Dans chacun de ces démonstrateurs, plusieurs critères de performance doivent être pris en compte au moment de choisir la meilleure technologie pour la batterie : rendement, nombre de cycles, durée de vie, capacité à stocker et restituer l'énergie en un temps et pour une quantité donnés. Selon Bouygues Énergies & Services, l'interface de pilotage chargée de gérer au mieux ces paramètres est également essentielle. « C'est pourquoi nous travaillons à la mise en place d'un système intelligent qui puisse anticiper les besoins en stockage, en fonction de l'historique des utilisations, et qui puisse ensuite le piloter », relève Servan Lacire. Côté coût, à quel retour sur investissement les porteurs de projets doivent-ils s'attendre ? « Il faut compter environ 1 000 euros le kilowattheure de stockage inst allé, estime Michaël Lippert. Soit un retour sur investissement d'une dizaine d'années. » Ce délai devrait diminuer au fur et à mesure du développement du marché, mais aussi avec l'utilisation de batteries de « seconde vie », comme celle installée sur le poste de distribution dans le cadre d'Issygrid. « Nous avons monté un projet commun avec un constructeur automobile pour récupérer les batteries de véhicules électriques qui ne sont plus assez performantes pour l'automobile, mais qui pourraient convenir pour le stockage des énergies renouvelables », indique Servan Lacire. Des exemplaires installés au siège de Bouygues Construction devraient ainsi être opérationnels en fin d'année. L'objectif est de s'assurer qu'elles résistent à différentes contraintes d'usage et d'évaluer leurs performances. l