Vous animez, en compagnie du Cler, le réseau Rappel. Quelle est sa vocation ?
Mobiliser les professionnels de tous types qui interviennent sur le sujet : animateur des Espaces info énergie, opérateurs des réseaux Pact et Habitat et développement, collectivités, qui ont très souvent un rôle moteur, etc. Sa création date de septembre 2007. Informel, il compte aujourd'hui un peu de plus de 700 membres. L'adhésion est individuelle, afin de ne fermer aucune porte dans les collectivités.
Vous travaillez sur la question de la précarité énergétique depui s plus de vingt ans. Comment a-t-elle émergé au plan national ?
Je voudrais d'abord rappeler que l'enjeu est sanitaire avant d'être financier ou énergétique ! Le développement de moisissures dans un logement mal chauffé peut provoquer de l'asthme. Dès les années 1990, la Grande-Bretagne a attaqué le sujet sous cet angle. En France, les premières actions de « lutte contre l'exclusion par la maîtrise de l'énergie », comme on disait à l'époque, date de la fin des années 1980. L'Ariège, qui créa en 1994 un dispositif pour aller au domicile des ménages en situation d'impayés d'énergie, fut un des précurseurs. L'Ademe a organisé en 1999 les premières rencontres entre acteurs de terrain. Au plan national, le rapport Pelletier de janvier 2010 a donné une première définition de la précarité énergétique et ébauché quelques pistes qui ont notamment conduit à l'amélioration des tarifs sociaux de l'énergie et à la mise en place d'Habiter mieux.
Ce programme lancé par l'Agence nationale de l'habitat (Anah) en 2011 tient-il toutes ses promesses ?
Quand il peut être appliqué, il fonctionne globalement bien. Mais, il ne répond qu'à 5 ou 10 % des situations, celles des propriétaires-occupants, qui ne sont pas les plus précaires. Le dispositif a été élargi aux bailleurs, mais rien ne les oblige à louer un logement énergétiquement décent. En 2014, la suspension temporaire, à la suite de l'épuisement des crédits, puis la reprise du programme ont mis les opérateurs en difficulté et dans l'incertitude. Une solidification du dispositif et une volonté politique affirmée sont nécessaires.
Que préconisez-vous pour renforcer l'action publique ? Il faut aller chez les gens, comprendre pourquoi ils sont en difficulté et trouver des réponses simples. La méthodologie Slime développée par le Cler apporte une solution. Tout comme les fonds sociaux d'aide aux travaux de maîtrise de l'eau et de l'énergie (Fsatmee) qu'il aurait fallu généraliser. Je l'avais proposé lors du Grenelle. Cela aurait pu apporter une réponse aux locataires. Le conventionnement que propose l'Anah aux propriétaires contre des loyers maîtrisés ne change pas la situation des ménages qui vivent dans ses logements… Il faudrait également renforcer le fonds de solidarité logement (FSL) en trouvant de nouvelles ressources financières et en harmonisant les critères d'attribution, aujourd'hui différents dans chaque département. Former beaucoup plus de travailleurs sociaux aux enjeux énergétiques paraît, enfin, indispensable. l