S'adapter à la variabilité. C'est l'enjeu crucial auquel doit faire face toute installation de métha nisation. Durant son fonction nement, ses intrants varieront très probablement en quantité et/ou en qualité. Un projet pilote vise à affiner les connaissances sur ce sujet. « À partir de la mi-2016, nous pourrons tester in situ un ou plusieurs intrants dans un digesteur pilote et étudier les interactions », annonce Grégory Lannou, directeur de l'association Biogaz Vallée. L'ob jectif est d'éviter de mettre en péril l'équilibre biologique d'une unité dès qu'un intrant contient un élément néfaste. Cet outil, qui sera construit dans le cadre d'un projet de démonstrateur porté par Biogaz Vallée, répond à un contexte national particulier.
En effet, de nombreux pays, comme l'Allemagne, ont favorisé les cultures réservées à la valorisation énergétique. « Ils avancent de façon très empirique, en testant et en observant ce qui fonctionne. Une fois l'optimum trouvé, les réglages sont définitifs, explique Grégory Lannou. En France, la méthanisation est multi-intrants. » La variabilité est surtout marquée pour les 23 méthaniseurs territoriaux et les 185 installations agricoles. Les fermes peuvent être agrandies, subir des variations saisonnières, par exemple lorsque les vaches pâturent, ou encore avoir recours à des intrants extérieurs. Les fluctuations peuvent aussi surve nir quand un contrat d'approvi sionnement n'est pas renouvelé. Comme ils sont signés pour trois ans en moyenne, l'exploitant doit s'informer en permanence des ressources disponibles à proxi mité et bien anticiper.
Quand un nouvel intrant potentiel est identifié, « il peut être utilisé directement s'il ne contient aucun toxique et représente moins de 20 % du total des intrants », assure René Moletta, président de Moletta Méthanisation et ancien cher cheur à l'Inra . Dans le cas contraire, il subit une batterie de tests : potentiel méthanogène, présence d'inhibiteurs bacté riens ou encore de soufre. Son coût de traitement est ensuite évalué afin de proposer un prix d'achat. Dernière étape : signer un avenant avec la banque si l'intrant faisait l'objet d'un contrat d'approvisionnement. « Puis, l'intrant doit être introduit progressivement sur quinze jours à un mois. C'est essentiel », explique René Moletta. Si ces points sont respectés, la modi fication d'intrants ne posera pas de difficulté d'un point de vue technique.
Mais la bataille sur les déchets « a déjà démarré, avertit l'ancien chercheur. Certaines installations tournent au ralenti. Les zones frontalières sont problématiques, par exemple près de la Belgique. Comme le prix d'achat de l'électricité issue de la cogénération y est plus intéressant, les déchets sont aspirés vers ce pays. » D'où l'im portance, si possible, d'intégrer les fournisseurs de déchets au capital des projets ou, pour les installa tions agricoles, de viser l'autono mie d'approvisionnement.