Des scientifiques et cliniciens de l’Université de Strasbourg, du Centre national de recherche scientifique (CNRS) et des hôpitaux universitaires de Strasbourg, ont mené une étude qui met en évidence « la présence de micropolluants dans le système nerveux central de patients atteints de maladie à Corps de Lewy (MCL) », seconde cause de démence neurodégénérative. « L’implication des pesticides est maintenant clairement démontrée dans le développement de la maladie de Parkinson. La maladie à Corps de Lewy, seconde cause de démence neurodégénérative après la maladie d’Alzheimer (MA), est une affection dont les mécanismes sont très proches de ceux de la maladie de Parkinson », précisent les chercheurs. Au départ, les scientifiques ont donc cherché la présence de pesticides dans le système nerveux de patients atteints de MCL. Ils ont prélevé par ponction lombaire, le liquide céphalo-rachidien (LCR) de patients atteints de MCL et de MA. « Les petites molécules présentes dans le liquide céphalo-rachidien, ont été analysées par chromatographie couplée à la spectrométrie de masse, technique d’analyse permettant la détection et la quantification des micropolluants », est-il détaillé. Mais les taux de pesticides présents dans le LCR des patients atteints de MCL ne se sont pas révélés anormaux.
PUBLICITÉ
« En revanche, un plastifiant, le phtalate de bis(2-éthylhexyle) ou DEHP, a été détecté à des concentrations significativement plus élevées dans le LCR des patients atteints de MCL », soulignent les chercheurs. « Le DEHP, comme d’autres phtalates, est une molécule omniprésente dans notre environnement », ajoutent-ils. Il est notamment utilisé comme plastifiant, et se retrouve dans les matériaux de construction et d’ameublement, ainsi que dans de nombreux produits ménagers, emballages alimentaires, produits cosmétiques, jouets ou encore dans le matériel médical. « Ce micropolluant était déjà connu pour ses effets toxiques sur les systèmes endocrinien et reproducteur. Des effets nocifs sur le système nerveux central ont été soupçonnés, en particulier au cours du développement neuropsychologique des enfants (troubles neurocognitifs et autistiques) », indiquent les scientifiques. « Cette étude ouvre la voie à des recherches sur des substances toxiques apparues après 1920, comme le DEHP, qui pourraient favoriser le développement de la MCL, une maladie décrite tardivement dans les années 1960 et 1970 », concluent-ils.

Figure : Distribution de DEHP dans le liquide céphalo-rachidien de patients atteints de la maladie d’Alzheimer (MA) ou de maladie à Corps de Lewy (MCL). A : cohorte démence + troubles cognitifs légers (TCL), B : cohorte démence. * p < 0,05 *** p < 0,01.