Le tri des emballages plastiques, pour être ef ficace, fait appel à une combinaison de moyens hu mains et matériels. Les équipements mécaniques (trommels, séparateurs ba listiques, aérauliques, à disques…) sont placés en amont des machines à cap teurs optiques, de plus en plus nombreuses dans les centres automatisés. « Dans le domaine du tri optique des emballages, il n' y a pas d'évolutions techniques majeures récentes », analyse Da niel Zimmerlin, responsable commercial France de Titech (Tomra Sorting Solutions). La plupart des séparateurs opti ques en France associent des capteurs Vis (la technologie de la lumière visible reconnaît la couleur des matériaux) et NIR (la spectroscopie pro che infrarouge qui reconnaît les matières), ce qui permet une bonne séparation des plastiques traditionnellement présents : tri des PET par couleurs, PEHD et ELA (bri ques alimentaires). Pas de révolution donc, mais on note chez le fabricant norvégien une amélioration récente sur ses machines phare Auto sort. L'entreprise a présenté en 2012 sur le salon Ifat Entsorga à Munich, son cap teur de nouvelle génération Titech autosort 4, « le premier système basé sur la spectroscopie proche infrarouge qui ne nécessite pas de lampes externes. Celles-ci sont remplacées par une technologie dite “flying beam” : des rayons lumineux à balayages qui se concentrent précisément sur la zone du convoyeur en cours d'analyse. Résultats ? Une réduction de la consommation énergétique (-70 %) et moins de maintenance », explique ton chez Tomra Sorting So lutions.
« Côté nouvelles résines, les machines Titech existantes sont capables de répondre aux besoins du marché », af firme Daniel Zimmerlin. La première machine dédiée au tri des barquettes a pris place fin 2012 au centre de tri du SMVO (Syndicat mixte de la vallée de l'Oise, Villers SaintPaul), l'un des 50 sites pilotes retenus par EcoEm ballages dans le cadre de l'expérimentation sur l'exten sion des consignes. Ce cen tre, récemment modernisé, est géré par Esiane, filiale de Sita (Suez Environnement).
« Grâce à neuf machines Autosort installées dans différentes configurations, on peut sortir toutes les résines, y compris les nouvelles (…) Nous n'avons pas modifié nos machines, on a juste introduit le référentiel qui permet de trier avec efficacité ces nouveaux objets (…) », assure Daniel Zimmerlin.
Le tri des films en question
Le tri automatique des films demeure une préoccupation importante pour les centres de tri, qui craignent pour la plupart l'arrivée de ce gise ment difficile à capter et per turbateur pour le tri optique. Titech va expérimenter dans le cadre de Recyfilms (voir page 22) la possibilité de trier les films polyéthylène dans la fraction des plats et ce « par une combinaison de moyens mécaniques et optiques », résume Daniel Zimmerlin. Unique constructeur français de machines de tri optique, Pellenc Selective Technolo gies (PST) a déjà bien pro gressé sur la question. La PME de Pertuis (Vaucluse) est très impliquée dans plu sieurs projets sélectionnés par Eco-Emballages. Sa so lution de tri automatisé des plastiques souples, testée dès 2010 avec le centre de tri BS Environnement à Nî mes, a été validée. « Nous utilisons une de nos machines phare, la Mistral (technologie proche infrarouge) équipée de capteurs SPIN de haute précision pour la détection des PE, PET, PEHD et munie d'une extension mécanique, le turbosorter, qui vient plaquer les films pour éviter leur envol », rappelle Florence Ali berti, responsable communi cation de la société.
Depuis juillet 2009, PST tra vaille également dans le ca dre d'un vaste projet de R et D « Tri + », étalé sur 45 mois avec différents partenaires, « entreprises et laboratoires, tous français, à l'aura internationale pour certains », précise Florence Aliberti. Financé par Oseo Innovation (9,2 millions d'euros pour l'ensemble des partenaires, le complément de 11 millions d'euros étant ap porté par autofinancement), ce programme vise à mettre au point de nouvelles générations de machines. « Concrètement, rappelle Florence Aliberti, il s'agit d'améliorer l'existant et d'explorer de nouvelles technologies de tri et surtri ». Soutenu par le pôle de compétitivité Optitec, le programme porte à l'origine sur sept nouvel les technologies, dont quatre sont déjà disponibles. Deux d'entre elles concernent di rectement le tri et la valorisa tion matière des emballages plastiques. C'est le cas de la Mistral Dual Vision qui com bine la spectroscopie dans l'infrarouge et la spectros copie couleur, deux technolo gies brevetées qui « travaillent ensemble sur le même pixel et croisent les informations du signal avec précision sur la nature du matériau et sa couleur. La spectroscopie visible permet une distinction claire entre bouteilles cristal et azurées, par exemple. Cette nouvelle machine de tri peut donc constituer des familles de matières en combinant type de résine et couleur. Dans un centre de tri, elle pourra isoler trois fractions de plastiques comme, par exemple, le PET clair, le PET foncé et le PEHD en un seul passage. D'autres applications sont également concernées comme les DEEE par exemple », détaille Flo rence Aliberti.
Aux côtés de ces deux géants, les machines Redwave, fa briquées par l'Autrichien BT Wolfgang Binder depuis 1993 et distribuées en France par la société parisienne Pronix Automation, parviennent à se faire progressivement une petite place dans l'Hexago ne avec plusieurs machines commercialisées. Elles utili sent également une combi naison de différents capteurs (infrarouge de précision et identification des couleurs) pour trier les matières. Trois machines NIR sont en cours d'installation au centre du Smettral (Côtes d'Armor) géré par SitaOuest. Deux de ces Redwave vont trier en casca de les différentes catégories de plastiques selon un sché ma qui se diffuse de plus en plus dans les centres les plus automatisés : une première machine ternaire sépare le gisement en trois flux, avant que ces trois flux ne soient à nouveau séparés par un second trieur optique. « Nos machines sont capables de reconnaître et de trier les nouvelles résines », souligneton chez Pronix Automation.
Plastiques des DEEE et des VHU
Dans ces deux domaines, l'un des principaux enjeux demeure toujours et encore la possibilité de trier effica cement et à des coûts non rédhibitoires les plastiques noirs. La technologie proche infrarouge marque ici sa limite puisque le carbone absorbe la lumière et ne la restitue pas. Les fabricants de machines travaillent donc au déblocage de ce verrou technologique.
Chez Titech, Daniel Zimmerlin promet pour 2013 « d'importantes avancées : un premier prototype de machine capable de traiter les plastiques noirs devrait être installé cette année en France », assuretil. S'il ne veut pour l'heure rien dévoi ler de la technologie utilisée – on sait juste que ce n'est pas du LIBS (Laserinduced breakdown spectroscopy), car ce serait trop cher – « cette machine prend sérieusement tournure depuis maintenant deux ans », précise-t-il. Une autre préoccupation concerne l'identification et le tri des plastiques contenants des retardateurs de flamme, bromés ou chlorés, dont la plupart sont interdits par la législation européenne(1) . Pa rallèlement à la technique par flottaison avec coupures densimétriques, plébiscitée par les rares professionnels qui, en France, trient de fa çon poussée leurs résidus de broyage, une poignée de fabricants propose le recours au tri optique, en particulier le XRT, rayon X par transmission. Le XRT détecte la matière au niveau de l'atome, donc re connaît un matériau dont cer taines molécules contiennent des atomes de brome. C'est le cas de la machine X-Tract développée par Titech, dont plusieurs modèles auraient été vendus à l'étranger et trois machines en France. Plus ré cemment, PST a lancé, dans le cadre de Tri +, sa machine XRT, la X-Pert, implantée chez Derichebourg Environnement et dont deux exemplaires se raient en commande chez un autre acteur important. « X-Pert sait détecter la présence de produits toxiques comme le chlore ou le brome dans les plastiques issus des DEEE (…) Elle permet aussi le tri entre les métaux denses et légers (cuivre et alu) que l'on retrouve dans les flux de VHU », résume Florence Aliberti. De son côté, BT-Wolfgang Bin der, fabricant des Redwave promeut la technologie de la fluorescence X (XRF) qui offre « des potentiels intéressants dans la séparation des matières opaques et des plastiques bromés à partir des résidus broyés ». « Il y a des attentes fortes et des projets en France, mais ceux-ci sont pour l'heure confidentiels », indique-t-on chez Pronix. Cette technologie a été développée en coopé ration avec Olympus ANI Sys tems, un des spécialistes du développement des systèmes rayons-X portables et trouve déjà des applications dans la récupération du verre usagé et des différents métaux. Plu sieurs études pointent cepen dant du doigt les limites de ces différentes technologies qui peuvent détecter la pré sence des additifs bromés, mais sans toutefois connaî tre le type précis de ces pro duits…
Parmi les technologies qui font l'objet de recherches, la LIBS arrive en bonne place, mais si elle a donné des ré sultats prometteurs en labo ratoire, elle n'a pas encore connu, à notre connaissance, de transposition concluante à l'échelle industrielle au ni veau des déchets. Quant au système de traceurs intro duits dans les polymères afin d'en faciliter le tri (ces mar queurs pourraient être détec tés par tri spectrométrique : fluorescence X ou UV), ils sont au cœur du programme de recherches Triptic (Traceurs répartis pour l'identification des polymères et tri industriel en cadence) lancé en 2010 et qui devrait s'achever fin 2013. nKG