La maison Pietra cultive un véritable état d'es-prit, que ce soit dans ses locaux ou son chantier de Bourogne, près de Bel-fort. Le récupérateur trace sa voie de façon discrète de-puis 76 ans. Suivant cette éthique, Pascal Pietra, qui représente la troisième génération, entretient la mémoire de ses ascendants. L'esbroufe, les premiers rangs : très peu pour le dirigeant qui préfère le sens du travail bien fait, « hérité des anciens ».
Dans le bureau de Pascal, des petites touches représentatives du climat de l'entreprise sont posées çà et là : le portrait de ses grands-parents fondateurs, Arthur et Angèle, l'acte d'enregistrement du 22 mars 1937 au registre du commerce exposé dans son cadre de verre, la photographie de son père, Claude, disparu il y a trois ans. Sa mère, encore active, assure une présence dans l'ombre mais très précieuse.
Même la célèbre statuette des trois petits singes de la sagesse qui se cachent respectivement le visage, la bouche et les oreilles n'est pas anodine : « Elle représente parfaitement la sagesse que mon père nous a inculquée et conseillée », explique Pascal. Parmi les valeurs clés, il y a la relation au client. « Nous n'avons jamais négligé les petites quantités. Notre histoire se confond avec celles des autres PME locales, certaines ont commencé par une tonne par mois récupérée à la main et ont bien grandi. Internet a du bon, mais il a aussi un peu rompu ce genre de relations. » Autre objet posé dans le bureau du dirigeant, la vieille clé insérée dans sa serrure, clin d'œil au premier métier de serrurier d'Arthur, avant qu'il ne se lance dans la récupération, en carriole, de chiffons et autres peaux de lapins.
Une intuition qui ne s'est pas démentie
Claude reprend le flambeau dans les années 1960. Il accentue le développement dans la récupération des métaux et ferrailles et procède au déménagement du chantier d'Audincourt, près de Montbéliard, pour s'installer à Bourogne. L'implantation au milieu des champs en 1995 s'avérera une vraie intuition. Le lieu offre l'espace pour un très beau site de 3,5 ha entièrement bétonné, où chaque famille de matière est bien à sa place. Surtout, toute une zone industrielle se développe autour. Parmi les nouveaux voisins, on compte l'usine d'incinération du territoire de Belfort. « Les déchets à incinérer n'ont que quelques mètres à parcourir, c'est écologique. » La relation de proximité a franchi un nouveau palier il y a trois ans lorsque Pietra a investi dans un broyeur de déchets (DIB, bois, encombrants, etc.). « Un vrai pari de diversification qui permet la valorisation énergétique plutôt que l'enfouissement. »
L'actuel dirigeant de l'entreprise de vingt-six salariés a appris une autre chose au côté de son père : « La transmission est l'un des aspects les plus difficiles d'une entreprise. » Mais à 44 ans dont 28 de… « maison », il n'y songe pas.