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Principe de précaution et autorisations d'urbanisme

PUBLIÉ LE 1er OCTOBRE 2013
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Le principe de précaution s'applique aux activités qui affectent l'environnement dans des conditions susceptibles de nuire à la santé des populations concernées. L'article L. 110-1-II-1° du Code de l'environnement le définit comme le principe « selon lequel l'absence de certitudes, compte tenu des connaissances scientifiques et techniques du moment, ne doit pas retarder l'adoption de mesures effectives et proportionnées visant à prévenir un risque de dommages graves et irréversibles à l'environnement à un coût économiquement acceptable. » Dans un premier temps, le principe d'indépendance des législations a conduit la juridiction administrative à écarter le principe de précaution (CE, 20 avril 2005, Société Bouygues, Telecom, n° 248233 ; voir aussi CE, 20 novembre 2005, Ville de Nice, n° 262105). Dans une deuxième étape est intervenue la Charte de l'Environnement, issue de la loi constitutionnelle n° 2005-205 du 1er mars 2005, dont l'article 5 dispose : « lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution, à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin d'éviter la réalisation du dommage ainsi qu'à la mise en œuvre des procédures d'évaluation des risques encourus ». Cette Charte de l'Environnement ayant, dès lors, valeur constitutionnelle s'impose aux autorités administratives. Le Charte de l'Environnement Depuis un arrêt du Conseil d'Etat (CE, 19 juillet 2010, Association du quartier les Hauts de Chaiseul, n° 328687), le principe de précaution résultant de l'article 5 de la Charte doit être pris en compte par l'autorité administrative lorsqu'elle prononce l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation d'urbanisme. L'autorité administrative doit donc exercer un contrôle lors de l'instruction de la demande d'autorisation. Le Conseil d'Etat rappelle les principes dégagés dans l'arrêt du 19 juillet 2010 dans des arrêts du 30 janvier 2012 (CE, 31 janvier 2012, Société Orange France, n° 344992) : « les dispositions de l'article 5 de la Charte de l'Environnement ne permettent pas, indépendamment des procédures d'évaluation des risques et des mesures provisoires et proportionnées susceptibles, le cas échéant, d'être mises en œuvre par les autres autorités publiques dans leur domaine de compétences, de refuser légalement la délivrance d'une autorisation d'urbanisme en l'absence d'éléments circonstanciés faisant apparaître, en l'état des connaissances scientifiques, des risques, même incertains, de nature à justifier un tel refus ». En application du principe de précaution, l'autorité compétente peut, soit refuser l'autorisation d'urbanisme, soit l'assortir de prescriptions, notamment sur le fondement de l'article R.111-15 du Code de l'urbanisme qui prévoit que le permis de construire, ou la décision prise sur la déclaration préalable de travaux, doit respecter les préoccupations définies par l'article L.110-1 du Code de l'environnement. Les antennes-relais de téléphonie mobile En pratique, la prise en compte du principe de précaution se heurte à de nombreuses difficultés liées à l'identification des risques. La justification de la prise en compte du principe de précaution est d'autant plus difficile que la composition du dossier ne prévoit pas de pièce susceptible de permettre à l'administration d'apprécier l'existence du risque et la pertinence des mesures envisagées par le pétitionnaire pour en limiter les effets à un niveau acceptable. Mais la principale difficulté est que le refus du maire de délivrer une autorisation d'urbanisme ne peut se fonder sur le principe de précaution en l'absence d'éléments attestant l'existence d'un risque de nature à justifier une telle décision (CE, 30 janvier 2012, Société Orange France, n° 344992). Elle s'est principalement posée pour l'installation d'antennes de radiotéléphonie mobile. Ainsi : aucun élément circonstancié du dossier ne prouvant l'existence d'un risque pour le public d'être exposé aux champs électromagnétiques, la Société Orange France est fondée à soutenir que le maire de la commune de Noisy-le-Grand ne pouvait légalement opposer à la déclaration préalable le motif tiré de l'article 5 de la Charte de l'Environnement (CE 30 janvier 2012, Société Orange France, n° 344992) ; s'agissant d'une antenne de radio téléphonie mobile fixée sur le pylône implanté pour les services de l'Etat : dans la mesure où les requérants auraient voulu invoquer le principe de précaution pour soutenir le caractère nocif pour la santé des personnes des ondes électromagnétiques utilisées par les services de police, de gendarmerie et de secours, il aurait fallu qu'ils apportent des précision sur la gamme de fréquences des ondes en cause et apportent des éléments scientifiques de nature à justifier ces risques et effets pour que la cour puisse examiner le bien fondé dudit moyen (CAA Marseille, 4 octobre 2011, ASL du lotissement de Pierrefeu, n° 09MA01848) ; à propos d'une antenne-relais de 30 mètres de hauteur à environ 30 mètres d'une maison d'habitation et à proximité immédiate d'un haras : il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des études scientifiques les plus récentes en la matière (rapport du 14/10/2009 de l'AFSSET - depuis devenue ANSES - et travaux du groupe d'experts commun aux trois académies nationales de médecine, des sciences et des technologies de décembre 2009) que les risques de téléphonie mobile, distincts des effets de l'utilisation en elle-même d'un téléphone mobile, seraient de nature à affecter de manière grave et irréversible l'environnement et la santé. Par suite, en accordant le permis de construire litigieux, le maire n'a pas méconnu le principe de précaution prévu par les dispositions de l'article 5 de la Charte de l'Environnement et de l'article L. 110-1 du Code de l'environnement (CAA Nantes, 3 février 2012, Baudoin, n° 10NT01244). En revanche, s'agissant de la suspension de l'exécution d'un arrêté d'opposition à la réalisation des travaux d'édification d'une station de téléphonie mobile, le Conseil d'Etat considère que le moyen tiré de la méconnaissance du principe de précaution garanti à l'article 5 de la Charte de l'Environnement est de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté (CE, 27 février 2012, Commune de Dardilly, n° 347063). Le principe de précaution s'applique aux activités qui affectent l'environnement dans des conditions susceptibles de nuire à la santé des populations concernées. C'est pour cela qu'en jugeant que les champs radio-électriques émis par les relais de téléphonie mobile porteraient atteintes à la santé humaine n'est pas de nature à faire regarder les dispositions de l'article 5 de la Charte comme ayant été méconnues, le tribunal administratif a entaché son jugement d'une erreur de droit (CE, 8 octobre 2012, Commune de Lunel, n° 342423). Eoliennes et hydrocarbures La jurisprudence sur l'implantation d'éoliennes est tout aussi stricte. La référence au principe de précaution est inopérante s'agissant de la création d'une zone de développement de l'éolien car elle n'emporte, par elle-même, aucun effet concret. L'appréciation de ces exigences relève seulement de l'autorité d'urbanisme à l'occasion de l'examen des demandes de permis de construire (CAA Lyon, 22 mai 2012, Association Horizon, n° 11LY02166). Bien que des requérants aient fourni des exemples d'incidents survenus dans des parcs éoliens, ceux-ci ne sont pas fondés à prétendre que le permis en litige serait entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard du principe de précaution (CAA Marseille, 19 juillet 2013, Société Nouvelles Energies Dynamiques (NED), n° 11MA00431). A l'avenant, la « note de doctrine régionale sur le développement de l'éolien et l'environnement » du pôle régional environnement et développement durable de la Direction régionale de l'environnement de Cham-pagne-Ardennes, à laquelle les requérants se référent, est dépourvue de caractère réglementaire, une étude sur les chiroptères, jointe à l'étude d'impact, estimant, par ailleurs, que les éoliennes auront un impact qui peut être évalué comme négligeable sur les populations de chauve-souris mais recommandant, par application du principe de précaution, d'éloigner les éoliennes des boisements d'une distance de 100 mètres. Par suite, les requérants n'établissent pas que le Préfet de la Marne aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des circonstances de l'espèce (CAA Nancy, 26 juin 2012, SCEA de Mentarah et autres, n° 11NC01208 : implantation de deux éoliennes dans une ferme éolienne existante sur le territoire de la commune de Saint Amand Sur Fion). Enfin, s'agissant de l'autorisation d'exploiter un dépôt d'hydrocarbures, la Cour administrative d'appel de Versailles estime que les risques ont été suffisamment quantifiés et que les mesures pour y remédier sont suffisantes pour prévenir la réalisation d'un dommage grave et irréversible à l'environnement. Il ne résulte pas de l'instruction que, en l'état des connaissances scientifiques sur les risques pouvant résulter, pour les habitants des communes concernées et l'environnement naturel, du fonctionnement d'un dépôt d'hydrocarbures et, compte tenu des mesures mises en œuvre pour limiter les effets du projet sur l'environnement, que le Préfet de l'Essonne ait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article 5 de la Charte de l'Environnement (CAA Versailles, 16 juillet 2012, Commune de Grigny, n° 10VE03178). Au total, l'absence d'une procédure et d'une méthodologie adaptée permettant l'identification des risques incertains mais plausibles fait obstacle à la pleine efficacité de la mise en œuvre du principe de précaution devant la juridiction administrative.
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