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ÉNERGIE

[Tribune] PPE : Sortir de la pensée unique électrique

PUBLIÉ LE 9 MAI 2018
BERNARD AULAGNE, PRÉSIDENT DE COÉNOVE
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[Tribune] PPE : Sortir de la pensée unique électrique
Cette semaine, le président de l’association Coénove, Bernard Aulagne, revient sur l’importance de donner une place au gaz et aux énergies renouvelables dans le débat de la PPE. Selon lui en effet, "le mix énergétique de la France ne se résume pas à son seul mix électrique".

La PPE
(Programmation Pluriannuelle de l’énergie) qui vise à décliner les objectifs de la Loi de Transition Energétique, doit être révisée d’ici la fin de l’année 2018 et fixer les grandes orientations pour les périodes 2019-2023 et 2024-2028. Au-delà des contributions d’experts, les Pouvoirs Publics ont souhaité organiser un large débat public, ouvert depuis le 19 mars dernier.

Ce débat public est assurément une chance pour notre pays. Il nous donne l’opportunité de réfléchir prospectivement et collectivement à ce que nous devons mettre en œuvre pour atteindre les objectifs ambitieux de la Loi de Transition énergétique. Mais pour que ce débat public soit une chance, encore faut-il qu’il soit mené avec objectivité. Sur ce point, le dossier du maître d’ouvrage, réalisé pour lancer le débat et mis à la disposition du public début mars, laisse perplexe : dès les premières pages, le décor est planté et se résume à une réflexion sur la transformation profonde ... du mix électrique français, sans aucune mention des autres composantes du mix énergétique du pays, pourtant indispensables à sa sécurité d’approvisionnement. Lancer un débat sur un sujet aussi sensible en donnant d’emblée une vision aussi partielle et partiale de la réalité pose question sur l’objectif de la consultation.

Certes, cette confusion (entretenue ?) n’est pas nouvelle : depuis le lancement du programme électronucléaire des années 70, la France est bercée au son d’une douce musique vantant les mérites de la fée électricité... en occultant la réalité. Il est temps d’ouvrir les yeux et de sortir de cette pensée unique qui réduit systématiquement les questions énergétiques à leurs seules composantes électriques.

Non, le mix énergétique de la France ne se résume pas à son seul mix électrique. À cet égard, l’analyse des deux précédents hivers est révélatrice. Premier enseignement : le mix énergétique de la France est très thermosensible ; le rapport de l’appel de puissance entre l’été et l’hiver est de 1 à 4. Pour satisfaire aux besoins du pays lorsque la température baisse, on a besoin d’énergies puissantes, stockables et rapidement mobilisables, ce que ne sont ni le nucléaire, ni le solaire ni l’éolien. Deuxième enseignement : aux jours les plus froids de ces hivers, l’électricité, quelle que soit son origine, n’a couvert que 30% de la puissance nécessaire... et pourtant, les messages invitant les particuliers à réduire leur consommation d’électricité, ponctuaient chaque bulletin météo. Cela montre la saturation du réseau électrique et ses limites dans un mix énergétique où l’électricité ne représente pourtant qu’une part minoritaire de la puissance nécessaire pour le pays.

Dans le même temps, discrètement (trop ?), l’énergie gaz a permis de couvrir près de 50 % des besoins, avec un réseau non saturé et à l’abri des conditions météorologiques. Si la décarbonation du mix énergétique de la France est un enjeu important pour les prochaines années, elle doit se faire en veillant en permanence à assurer la sécurité d’approvisionnement du pays et dans des conditions économiques acceptables. Telle est donc la situation aujourd’hui... Quelle transition énergétique voulons nous pour aller vers moins de consommations, moins d’émissions de gaz à effet de serre, plus d’énergies renouvelable  La sobriété et l’efficacité énergétique via la diminution des besoins dans l’ensemble des secteurs économiques sont une vraie priorité. Concernant le secteur du bâtiment en particulier, l’enjeu est plus que jamais la rénovation énergétique du parc de logements pour l’amener en 2050 au niveau BBC Rénovation ... ainsi que cela est écrit dans la loi de Transition Énergétique. Mais, il ne suffit pas d’inscrire un objectif dans la Loi pour l’atteindre ... Le chemin est encore long, nous sommes très loin du rythme affiché de 500 000 logements rénovés chaque année ... Des mesures concrètes et inscrites dans la durée sont donc indispensables et le Plan rénovation publié récemment va dans le bon sens.

La deuxième voie concerne l’accélération du développement des énergies renouvelables, de toutes les énergies renouvelables... Car, les énergies renouvelables ne sont pas qu’électriques. L’énergie gaz, tout en gardant ses atouts de puissance et de stockabilité, est résolument entrée dans sa grande mutation vers les gaz renouvelables. Issus de la méthanisation dans un premier temps, filière porteuse d’avenir pour la profession agricole et composante essentielle de l’économie circulaire, puis du développement de powertogas et de la méthanation, ces gaz récupéreront, stockeront et réutiliseront la production excédentaire des énergies renouvelables électriques, illustrant la nécessaire complémentarité des énergies...

Un objectif figure déjà dans la Loi : 10% de gaz consommé en France en 2030 sera d’origine renouvelable. Compte tenu des potentiels estimés par L’ADEME dans son étude « 100% gaz renouvelable en 2050 » et des récentes initiatives prises par les Pouvoirs Publics (GT méthanisation), nous proposons de le porter à 30%. On le voit, verdir le mix énergétique de demain tout en assurant la sécurité d’approvisionnement, ne passe pas forcément uniquement par l’électrification massive des usages. Le verdissement du gaz est une vraie opportunité, du fait, de plus, de ses impacts positifs sur la filière agricole et le développement de l’économie circulaire.

Alors, puisque, comme le Ministre a jugé bon de le rappeler le 12 avril dernier, « ce n’est pas EDF qui doit faire la politique énergétique de l’Etat », sortons de la pensée unique électrique et ne nous privons pas des apports de toutes les filières (dont le gaz) à la décarbonation du mix énergétique du pays. La lutte contre le réchauffement climatique est un engagement que nous devons aux générations futures, ne pas les laisser se débrouiller avec des déchets dont nous ne savons que faire l’est tout autant.
Bernard Aulagne, président de Coénove
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