La société française Drakar Fluides Technologies propose un procédé innovant de traitement de l'eau, mis au point et fabriqué par Bernoulli System AB, en Suède. « Le filtre Bernoulli concerne les eaux brutes naturelles, qui ont de plus en plus d'applications dans le milieu industriel, mais qui ne peuvent être utilisées telles quelles, explique Bernard Delhoume, directeur de l'entreprise. Il s'agit d'une préfiltration qui élimine les matières en suspension, micro-organismes, algues, etc. ». Ce filtre à décolmatage automatique diffère des techniques classiques par contre-courant ou autre action mécanique.
Un principe vieux de 250 ans
Il exploite un phénomène physique mis en évidence par Daniel Bernoulli, savant suisse du xvie siècle, selon lequel l'augmentation de la vitesse d'un fluide s'accompagne localement d'une chute de pression. Ici, l'eau circulant entre un disque monté sur cylindre pneumatique et le panier filtrant subit une forte accélération. La dépression ainsi créée aspire et décroche les particules retenues sur le filtre et le nettoie.
En parallèle, une vanne de chasse permet d'évacuer cette eau de lavage et d'éviter tout colmatage et saturation. Rapide, cet autonettoyage n'interrompt pas la filtration et consomme peu d'eau. Le système s'adapte à des débits de 10 à plus de 6 000 m3/h et ses seuils de filtrations vont de 100 µ à 2 mm. Ses coûts varient selon les débits traités, mais, pour Bernard Delhoume, « il se révèle compétitif par rapport aux technologies existantes ».
Le premier filtre mis en service (en 1990, en Norvège) traite en continu quelque 500 m3/h d'eau de mer. Le procédé se distingue par sa grande sécurité de fonctionnement, un nettoyage simple et une maintenance réduite.
Sa vocation première était la protection des échangeurs à plaques.
Des applications variées
L'usine de Sanofi Aventis à Vitry-sur-Seine utilise ce procédé depuis 2003 pour protéger ses échangeurs, alimentés en eau de Seine. Aujourd'hui, il est aussi utilisé en tant que préfiltration pour systèmes de stérilisation UV, ultrafiltration ou osmose inverse, pour réduire l'encrassement des tours de refroidissement et les risques de pollution générés. Il sert aussi aux réseaux de froid.
À Paris, le dispositif Climespace (Suez) apporte la climatisation via six centrales de production. Celles qui utilisent l'eau de Seine sont équipées de filtres Bernoulli.
Ces filtres peuvent aussi fonctionner en stations de traitement d'eaux résiduaires ou d'eaux usées afin de protéger les échangeurs. Ils sont adaptés aux stations de pompage de réseaux d'irrigation (serres, cultures céréalières, parcours de golf). Le système s'applique aussi au dessalement d'eau de mer, en préfiltration en amont des procédés à membranes, ou en production d'eau douce par distillation. Un usage, qui « constitue un énorme marché en devenir », estime Bernard Delhoume. Mais la technologie reste confidentielle : en France, les filtres Bernoulli ne traitent que quelques dizaines de milliers de mètres cubes d'eau brute naturelle.