En juillet dernier, a été créée la nouvelle direction de l'eau et de la biodiversité (DEB) du Meeddat, qui regroupe les anciennes directions de l'eau (du ministère de l'Écologie) et de la Nature (du ministère de l'Agriculture). À sa tête, Judith Jiguet, dont le parcours témoigne de la volonté de relier deux mondes à priori ennemis : l'agriculture et l'eau. Son diplôme d'ingénieur agronome-Engref en est la preuve. D'autant qu'elle a fait partie de la première promotion que le ministère de l'Agriculture
a accepté de laisser partir dans les Diren.
Une petite révolution...
À trois années dans une Diren succèdent trois autres dans la DDAF de la Vienne, où elle est en charge des questions d'irrigation : « Nous avons remis à plat toutes les autorisations des exploitants pour plafonner le volume global autorisé, préfigurant ainsi ce qui allait devenir la gestion par quotas dans la Lema. » Un programme qui va la conduire, avec une équipe de gardes-pêche et de gardes-chasse, à réaliser des contrôles les samedis et dimanches. « La mise en place d'un tel système n'est crédible que si elle est vérifiée sur le terrain », appuie-t-elle. Une logique qu'elle mettra en oeuvre sur un programme d'action sur les zones vulnérables. « En 1999, la Vienne a été le premier département à rendre obligatoires les bandes enherbées », se félicite-t-elle. Elle mise aussi sur une étroite collaboration avec le procureur, pour éviter l'effet dévastateur des classements sans suite : « Je ne crois pas aux idées parfaites sur le papier, mais plutôt aux idées simples qui sont suivies de contrôle. »
Après un passage à la Datar où elle prend goût au travail interministériel, elle rejoint en 2004 le ministère de l'Écologie pour s'occuper de la création du service unique de la police de l'eau. Elle intègre ensuite le cabinet du ministre
de l'Agriculture, Dominique Bussereau, pour suivre le vaste chantier de la réforme de la PAC. Dans les rapports de force avec les agriculteurs, le fait d'être une femme l'a en partie aidée. « ça a parfois vraiment chauffé, reconnaît-elle. Mais cela m'a donné goût à la négociation
et appris à écouter. »
Changement de cap en 2007 : elle part chez Veolia Eau pour découvrir le monde du privé, et travaille sur le renouvellement du contrat avec le Sedif. Mais lorsque Michel Barnier devient ministre de l'Agriculture, trois mois plus tard, et l'appelle pour porter son projet (environnement, réorganisation du ministère, PAC) en tant que directrice adjointe de cabinet, elle rempile aussitôt. Et à peine un an après, on lui propose le poste qu'elle occupe aujourd'hui.
Sa première mission est de « construire la direction et créer une culture commune, en développant des sujets et des modes de fonctionnement plus horizontaux. » Elle veillera aussi au suivi
du Grenelle, avec les lois Grenelle 1 (prévues pour fin 2008) et Grenelle 2 (début 2009), à la mise en oeuvre de la Lema, à asseoir l'Onema et à participer à la présidence française de l'Union européenne.
Elle est consciente qu'elle et son équipe sont attendues, car cette direction est la plus retouchée du Meeddat. Et aussi parce qu'elle est une femme et l'une des plus jeunes directrices de l'Administration centrale. Un sourire au coin des lèvres, elle avoue : « Ce genre de défi n'est pas pour me déplaire ».