Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, il a été décidé de retirer de la vente trente produits contenant les cinquante-trois molécules les plus dangereuses d'ici à la fin 2008. La moitié des pesticides devraient être interdits d'ici à dix ans, car ils représentent des risques sérieux pour l'homme (reproduction, cancers, etc.). Pour les exploitants agricoles, qui utilisent 75 000 tonnes de substances actives par an, il faudra donc trouver des solutions alternatives.
L'objectif d'Agrauxine, société de biotechnologies créée en 2002 à Quimper (Finistère), est justement de se passer des molécules chimiques et des pesticides. Cette entreprise, positionnée sur la recherche, le développement, la fabrication et la commercialisation de solutions naturelles, conçoit des produits fertilisants ou phytosanitaires à base de micro-organismes qui s'adressent aux viticulteurs, aux horticulteurs comme aux collectivités locales.
DES RECETTES À BASE
DE CHAMPIGNONS...
Face aux attaques des champignons pathogènes qui déclenchent la maladie du bois de la vigne, par exemple, les chercheurs ont lancé une contre-attaque menée par un autre champignon. But : répondre à l'attaque d'un champignon par un autre.
« Quand on parle de maladie aujourd'hui, il s'agit le plus souvent de traitement préventif. Tous les moyens ont été mis sur la génétique (OGM), mais on s'aperçoit que les plans résistants au départ ne le sont plus au bout de quelques années. Le biocontrôle permet de développer des solutions curatives en respectant la nature », explique Jean Parat, ingénieur chez Agrauxine et représentant de la France à l'International Biocontrol Manufacturers Association (IBMA). Cette association regroupe les producteurs de substances naturelles, de micro- et macro-organismes, ainsi que de phéromones.
Suite à l'interdiction de l'arsénite de sodium en 2001, la maladie du bois de la vigne s'est développée et a engendré des pertes économiques de l'ordre de 500 à 750 euros/an/ha en moyenne. Six ans de travail et de recherches, en collaboration avec l'Inra notamment, ont permis de mettre au point un produit efficace et inoffensif pour l'homme et son environnement, selon Agrauxine. L'Esquive WP a obtenu toutes les homologations nécessaires et il est désormais commercialisé en Europe et aux États-Unis. « Le marché est en augmentation de 15 % par an, précise Jean Parat. En revanche, la législation actuelle d'homologation adaptée aux substances chimiques ne l'est pas du tout pour nos produits et nous essayons de la faire évoluer. Mais nous sommes encore rarement consultés. »
... OU D'ALGUES
Parallèlement, le projet Innovargalgue, porté par la PME Goemar à Saint-Malo et l'Institut régional des matériaux avancés (Irma),
développe également des produits capables de se substituer aux pesticides, mais cette fois à partir d'algues. Plusieurs labora-
toires (BBV, Inra, Inh, université) ainsi que
deux comités écono-miques des fruits et légumes sont associés à ce projet, qui a été labellisé par les pôles de compétitivité Valorial (Bretagne) et Végépolys (Pays de la Loire). La phase actuelle, financée à la fois par l'État et les collectivités locales, consiste à sélectionner les meilleurs produits inoffensifs pour l'homme et son environnement. Le domaine de recherche vise les maladies de la vigne, ainsi que les attaques fongiques et bactériennes des légumes, des pommiers et des poiriers. Après trois ans d'étude, le nouveau produit devrait être commercialisé d'ici à cinq ou six ans.