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Des envahisseurs dans nos lacs et rivières


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PUBLIÉ LE 1er AVRIL 2009
LA RÉDACTION
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Très jolie en apparence, la Jacinthe d'eau est redoutable. En conditions écologiques favorables, sa biomasse double en dix à quinze jours et elle peut rapidement couvrir un étang. D'après une étude menée en 2006 par Thomas Le Bourgeois et Gérard Lebreton, chercheurs au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement ( Cirad), cette plante « empêche la navigation, bloque les barrages, gêne l'accès à l'eau pour le bétail et les populations ainsi que la pêche, bloque les pompes, intercepte la lumière, réduit le taux d'oxygène, augmente de 2 à 8 fois l'évaporation d'une surface d'eau libre, bouleverse l'équilibre minéral, émet un fort dégagement d'H2S. » Elle a envahi les étangs littoraux de l'île de la Réunion, tout comme la Laitue d'eau, qui présente les mêmes enjeux et se révèle être un « hôte préférentiel pour différentes espèces de moustiques vecteurs du paludisme, de l'encéphalomyélite et de la filariose ». IMPACTS MULTIPLES Les conséquences de la propagation d'espèces à ce point dynamiques touchent en premier lieu la biodiversité. « Les espèces envahissantes sont la deuxième cause de perte de la biodiversité, après la destruction des habitats. D'où une inquiétude croissante des syndicats de rivières, de plus en plus nombreux à nous demander un inventaire faunistique et floristique », rappelle Florence Agasse, responsable technique chez Éco-Environnement Ingénierie. Les usages humains sont aussi fortement impactés. Les risques d'inondation augmentent en raison de l'encombrement des canaux et des étangs par les plantes ; la pêche, le tourisme, le commerce sont incommodés : « Différentes espèces invasives peuvent impacter l'activité de Voies navigables de France (VNF) en causant des gênes pour la navigation, en dégradant les aménagements et les ouvrages, et nécessitant une intervention de maintenance coûteuse », détaille Claire Pérard-Albin, chargée de l'environnement chez VNF. UN TRAVAIL DE FOURMI Le coût d'entretien est d'autant plus grand que la lutte contre les plantes s'oriente vers des techniques douces. Par exemple, l'arrachage manuel est la seule action vraiment efficace contre la Jussie, l'une des plantes les plus menaçantes dans de nombreuses régions. « Il faut que les chantiers manuels soient extrêmement soigneux pour ne pas disséminer les boutures en arrachant les plantes. Et il faut aussi de la persévérance pour venir à bout même d'une petite zone d'infestation : le chantier durera quelques années », remarque Thierry Rigaux, responsable du département patrimoine naturel à la Direction de l'environnement du conseil régional de Picardie. Autre forme d'action possible : la lutte biologique. Des prédateurs de l'espèce à éliminer sont introduits dans le milieu. Mais l'espèce prédatrice ne doit pas devenir, à son tour, invasive... « Il est primordial que les agents de lutte biologique soient spécifiques de l'espèce envahissante à détruire et ne puissent s'attaquer à d'autres espèces. C'est le cas des trois agents sélectionnés pour détruire la Jacinthe et la Laitue d'eau sur l'île de la Réunion. Ils sont déjà utilisés depuis de nombreuses années dans plus de trente pays de par le monde », précisent les chercheurs du Cirad. Les outils chimiques, herbicides et pesticides, sont quant à eux peu à peu abandonnés. « La lutte chimique contre les Ragondins et les Rats musqués a provoqué des dégâts collatéraux, sur des espèces protégées notamment ; quant à l'usage de glyphosate contre la Jussie, je pense que c'est jouer avec le feu, puisque cet herbicide est diffusé directement dans l'eau... », s'inquiète Xavier Baron, chargé de mission environnement auprès du parc interrégional du Marais poitevin. AUTORÉGULATION Enfin, la non-intervention est un mode de gestion pour de nombreuses espèces animales aquatiques : « Nous attendons que la population d'Écrevisses de Louisiane, qui a explosé depuis son apparition dans les années 2000 dans le Marais poitevin, diminue d'elle-même. Ces crustacés s'attaquent à toute la végétation, puis aux oeufs et aux larves d'autres espèces, entraînant une stérilisation du milieu. Mais aucune action humaine n'est efficace », analyse, fataliste, Xavier Baron. Nicolas Poulet, responsable du dossier « espèces invasives » à l'Onema, est convaincu « qu'il existe des phénomènes d'autorégulation des populations : dans de nombreux cas, le milieu a une capacité d'accueil limitée qui restreint naturellement la population. En intervenant, l'homme peut entretenir la dynamique de croissance de la population ». D'une approche privilégiant l'éradication, les spécialistes passent donc de plus en plus à une approche gestionnaire de contrôle des populations. PRÉVENTION Cependant, bien souvent, les espèces végétales invasives ne s'autorégulent pas. La méthode la plus efficace reste alors la prévention et la réaction immédiate. « Notre politique repose sur une veille permanente, menée par des spécialistes et un réseau de correspondants du conservatoire botanique de Bailleul [Nord], ainsi que des agents de l'Onema et des personnels des syndicats de rivières dont nous finançons la formation. Il est en effet essentiel d'intervenir le plus tôt possible. Si la plante s'installe, nous ne pouvons plus rien faire. Il faut alors accepter de vivre avec elle, les coûts de contrôle et les dommages permanents qui en résultent », raconte Thierry Rigaux. En parallèle, un fort engagement de l'État est attendu en matière de réglementation. Les plantes invasives proviennent très fréquemment des pépiniéristes et des aquariums. Or aucune espèce n'est actuellement interdite à l'importation, et seules deux espèces de Jussie sont interdites à la vente. « Il y a pourtant beaucoup plus d'espèces dangereuses. L'État ne prend pas ses responsabilités », estime Thierry Rigaux, qui relate qu'en Picardie, « une action de sensibilisation a été menée auprès des jardineries et des pépiniéristes pour retirer de la vente les espèces les plus problématiques. Mais cela n'a, pour l'instant, pas été suivi d'effet ». Face à des problèmes de cette ampleur, les connaissances sont encore parcellaires. « Le premier objectif de notre réunion du 26 janvier était d'identifier les attentes des gestionnaires de milieux aquatiques », rappelle Nicolas Poulet. L'une des missions que s'est donné le groupe a été de recenser la littérature scientifique pour combler des connaissances encore très parcellaires. Pour rendre la lutte plus efficace, plus de coordination serait en outre souhaitable. « Trois organismes interviennent sur les plantes aquatiques dans le territoire du Marais poitevin. La lutte contre les Ragondins y est gérée par une quatrième organisation...», relate Xavier Baron. L'un des rôles du parc interrégional est d'harmoniser et de coordonner les actions de lutte, pour que leur calendrier ne dépende pas des limites départementales ; ailleurs, cet échelon n'existe cependant pas et l'harmonisation est encore plus difficile. D'autre part, le financement, qui est assuré par les agences de l'eau dans le cadre de contrats-restauration-entretien et par les collectivités locales, reste trop souvent non pérenne. Xavier Baron rappelle que « toutes les mesures techniques imposent des financements durables ; mais en raison du mode de financement actuel à très court terme, les postes ne sont pas permanents. Il vaudrait mieux créer un emploi à temps plein pour piéger les Ragondins, arracher les Jussies et entretenir les berges, que trois postes précaires à temps partiel... C'est ce que le parc interrégional s'attache à développer sur le Marais poitevin ».
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