L'intercommunalité du Woigot, dans le département de la Meurthe-et-Moselle, ne manque pas de rebondissements au niveau de sa gestion de l'eau « avant et après-mine ». De ce gisement lorrain exploité épisodiquement depuis le XIIIe siècle et de façon régulière depuis le début du XVIIIe, découle un réseau hydrographique très perturbé. Pendant l'exploitation minière, le niveau piézométrique de la nappe était très bas car des puits de pompage évacuaient les eaux souterraines vers les cours d'eau, le Woigot et un de ses affluents, le ruisseau de la Vallée. Pour maintenir les travaux miniers à sec, il fallait à l'époque sortir entre 5 et 20 m3 d'eau pour une tonne de minerai extrait.
DES EAUX POLLUÉES, UN ÉQUILIBRE PERTURBÉ
L'année 1994 marque la fin de l'exploitation du dernier site minier sur cette vallée. S'ensuit un ennoyage irréversible des galeries et, en parallèle, une diminution forte du débit d'étiage dans les cours d'eau puisque ceux-ci n'étaient désormais plus alimentés artificiellement. Les communes du bassin versant ont alors découvert le Woigot sous un autre visage : une eau nauséabonde enrichie majoritairement par les rejets des eaux usées du bassin, désormais non dilués par les eaux souterraines.
Une étude de synthèse environnementale a montré alors les enjeux sanitaires et écologiques nécessitant le maintien artificiel des débits d'étiage des deux cours d'eau afin d'en assurer la pérennité. Parallèlement, s'est engagé un vaste programme de mise aux normes de l'assainissement. Depuis 1998, 21 millions d'euros ont été investis pour la reconquête du milieu. « Depuis dix ans, on est parti de zéro au niveau de l'assainissement. Avant, les cités minières avaient leur propre réseau, et les communes le leur, sachant que tous ces rejets se retrouvaient sans traitement particulier dans la rivière », raconte Claude Lauer, directeur du syndicat Contrat Rivière Woigot (CRW). Une autre difficulté s'est ajoutée à cela : « Ici, les terrains bougent, le plan de zonage d'assainissement n'a autorisé que peu d'installations de type individuel », commente Claude Lauer. Le bassin est également concerné par un Plan de prévention des risques miniers, PPRM (voir encadré). La topographie du secteur étant accidentée, un grand nombre de relevages est alors nécessaire ; c'est la société Salmson qui a été choisie pour les équipements d'une grande partie du réseau qui alimente la station d'épuration de Briey (16 000 EH).
En plus de la mise aux normes de l'assainissement, le CRW a dû tenir compte des travaux réalisés par leurs aïeux en 1929. Les mineurs avaient en effet bétonné une partie du cours d'eau sur plus de 3 kilomètres : le sous-sol étant karstique, des fuites émanant du cours d'eau alimentaient à nouveau les galeries minières. Un aménagement spécifique comprenant des plantations (création de ripylsive) et la pose d'une géomembrane a permis de colmater les fuites du lit bétonné pour ainsi retrouver l'écosystème initial. Cette opération a fait l'objet d'un site pilote avec l'agence de bassin. Mais tout cela coûte cher : l'intercommunalité possède un prix de l'eau des plus élevés de France, près de 6 euros le mètre cube, en comptant le traitement obligatoire de l'eau potable contaminée en ions sulfates du fait de leur passage dans les anciennes mines.
Aujourd'hui, les cours d'eau sont encore alimentés artificiellement par les puits de pompage pour garantir la qualité du milieu, mais les l/s ont remplacé les m3/min prélevés. Pour autant, cela ne coulait pas de source. Lorsque l'activité minière a cessé, c'est l'État qui a pris en charge le fonctionnement des installations de soutien des débits d'étiage. En 2001, il a demandé aux collectivités de prendre le relais. Aujourd'hui, seulement quatre rivières en France sont maintenues artificiellement comme le Woigot, « mais cela ne durera pas éternellement », conclut Claude Lauer.