L'idée du portrait ne l'enchante pas. « C'est l'entreprise et ses produits qui sont intéressants. Pas celui qui en est à l'origine. » De fait, Marc Bouchut reste discret sur sa vie privée, mais est intarissable quand il s'agit de Mesures et Signaux. Il a fondé cette start-up en février 2008, à 49 ans, pour concevoir et fabriquer des bouées de mesures autonomes, capables de transmettre en temps réel les données collectées. En 2007 pourtant, il travaillait encore dans une société spécialisée dans l'électronique et les télécommunications sur l'approche financière des produits.
Mais l'un de ses amis, qui vend des machines à laver industrielles, lui parle un jour des difficultés que rencontrent certains de ses clients pour mesurer les paramètres physico-chimiques des eaux de lavage enfermées dans des réservoirs. « J'ai commencé à réfléchir sur un concept de métrologie sans fil et en temps réel. Je ne connaissais rien à ce domaine. Mais la première chose qui m'est venue à l'esprit, c'est de savoir si cela correspondait à un marché. » Les débouchés industriels sont assez limités, mais l'ostacle ne l'arrête pas. « Dans l'eau de lavage, vous enlevez lavage et il reste l'eau. Le pas n'était pas difficile à franchir. » D'autant que la directive-cadre sur l'eau devrait motiver bien des acteurs du secteur à suivre de plus près l'état écologique des eaux souterraines et superficielles.
Son idée en tête, ce Briviste d'origine monte la société Mesures et Signaux à Limoges. En parallèle, il démarche les gestionnaires de bassins de traitement, « avec beaucoup d'humilité ». Il apparaît rapidement que les stations d'épuration n'ont pas besoin de nouveaux instruments de mesure. Mais les réseaux d'assainissement et les captages, si. « J'aime jouer aux échecs et je suis adepte des diagrammes PERT. J'ai avancé en parallèle sur plusieurs fronts, mais toujours avec une stratégie en tête. » Les efforts ont payé : six mois après sa naissance, la petite société a déjà trouvé son marché.
Au fil des discussions avec les clients potentiels, les idées s'affinent. « Nous pensions qu'ils allaient nous attendre sur la partie radio, mais ce sont les sondes qui les préoccupaient le plus. » Aujourd'hui, Mesures et Signaux emploie neuf salariés et commercialise sa gamme AquaMésus de points de mesures radio autonomes. Pas plus grosses que des bouteilles d'eau de 2 litres, ces bouées sont capables de mesurer plusieurs paramètres (pH, conductivité, température, oxygène dissous, turbidité dans des fluides industriels ou en eau douce) et de transmettre les données par radio ou par GPRS. Pour devancer le marché, la société travaille aussi à l'élaboration de bouées répondant à des exigences spécifiques, comme l'utilisation en milieu marin ou la mesure de nouveaux paramètres. Les idées sont nombreuses, et certaines ne tarderont pas à se concrétiser.
En juin, Mesures et Signaux a présenté à Oséo un « contrat passerelle » en partenariat avec le groupe Saur, pour qui la start-up met au point une bouée spécifique. Les raisons de ce succès ? « Nous proposons le bon produit, au bon prix et au bon moment, à un marché bien identifié », conclut Marc Bouchut. Stratégique, toujours.