L'enjeu est de taille : le programme-cadre Horizon 2020 de l'Union européenne va attribuer environ 80 milliards d'euros entre 2014 et 2020 pour la recherche et l'innovation, dont les deux tiers devraient être alloués aux projets d'énergies renouvelables ou d'efficacité énergétique. C'est la raison pour laquelle l'Association européenne pour l'électricité solaire thermique (Estela) a dévoilé un agenda stratégique 2020-2025. Elle y présente les innovations à développer pour le secteur. L'objectif : motiver les décideurs politiques européens à soutenir la filière en lui accordant notamment une partie des fonds d'Horizon 2020. Le premier axe à privilégier concerne la réduction des coûts – d'opération et de maintenance – et l'amélioration du rendement des centrales thermodynamiques. Pour cela, l'agenda propose plusieurs pistes de recherche : l'amélioration des miroirs, grâce par exemple à des revêtements antipoussières, ainsi que le perfectionnement des huiles actuellement utilisées comme fluide caloporteur ou leur remplacement par des mélanges de sels fondus, des gaz sous pression ou de la vapeur. Et, sur ce point, la France s'est déjà bien positionnée. « Les industriels français ont certes commencé à investir dans l'héliother-modynamique avec du retard par rapport à d'autres pays comme l'Espagne ou l'Allemagne, mais ils ont, en revanche, très bien anticipé les développements futurs », note Roger Pujol, président de la commission solaire thermodynamique du Syndicat des énergies renouvelables.
La filière tricolore travaille ainsi sur la génération directe de vapeur, qui pourrait augmenter le rendement des centrales. Mais aussi à améliorer l'impact environnemental des installations, les huiles chimiques n'étant plus utilisées, et faciliter l'hybridation, puisque les centrales conventionnelles ont toujours besoin de vapeur.
Améliorer l'hybridation avec des centrales à vapeur, turbines à gaz ou à cycle combiné, ou encore des centrales à biomasse : cet axe constitue d'ailleurs la deuxième priorité de l'Estela. L'association vise en effet à augmenter la disponibilité de l'énergie produite. La seconde partie à perfectionner sur ce point est le stockage, pour lequel les innovations porteraient tant sur la mise au point de réservoirs uniques que l'optimisation des transferts de chaleur entre fluides caloporteurs et matériau de stockage.
Enfin, l'agenda d'Estela insiste sur la nécessité pour la filière d'améliorer son profil environnemental. Cela implique notamment de chercher des solutions alternatives aux huiles utilisées comme caloporteurs, rejoignant ainsi les recommandations pour la réduction des coûts, mais aussi de développer des centrales plus économes en eau ou mieux adaptées à la désalinisation. Le message final de l'agenda est clair : pour concrétiser toutes ces recommandations, il faut poursuivre la R & D, la construction de démonstrateurs, l'augmentation de la capacité installée... et tout ceci nécessite une volonté politique. « Il y a approximativement 200 GW d'éolien et 100 GW de photovoltaïque installés dans le monde... et seulement 2 GW d'héliother-modynamique, compare Roger Pujol. Il est donc normal que la filière soit moins compétitive. » Reste à savoir si les conclusions d'Estela inciteront les décideurs à lancer de nouveaux appels d'offres.