Une première ! Le 8 janvier 2014, entre 8 et 10 heures, un industriel (le papetier Norske Skog Golbey) a réduit sa consommation électrique de 30 MW à la demande de RTE. A priori, rien d'inédit. Le gestionnaire du réseau fait appel aux effacements de consommation depuis une décennie pour gérer les aléas de court terme. À travers le mécanisme dit « d'ajustement », les effacements contribuent à maintenir l'équilibre entre l'offre et la demande électrique. Mais l'opération du 8 janvier fut la première dans le cadre de l'expérimentation « Nebef ». Un acronyme à retenir. Pas tant pour son obscure définition – il signifie « notifications d'échanges de bloc d'effacement » – que pour l'évolution structurelle qu'il sous-tend. À terme, il s'agit d'ouvrir l'ensemble du marché de l'électricité, et non le seul mécanisme d'ajustement, aux effacements. Les kilowattheures seront alors valorisés qu'ils soient consommés ou non, dans la mesure où ils concourent à l'équilibre du réseau. Il y a un an, la loi Brottes instaurait cette évolution. Après la théorie, l'heure de la pratique a sonné.
Le processus s'est accéléré fin 2013. Le 28 novembre, la Commission de régulation de l'énergie a approuvé des règles du jeu provisoires. Le 18 décembre, RTE a lancé l'expérimentation pour douze mois. Le 31, il a dévoilé les sociétés retenues pour opérer les effacements. Et le 8 janvier donc, la première opération a été réalisée par Smart Grid Energy. Cet exercice n'est qu'un début. Pour convaincre, le dispositif expérimental devra remplir au moins deux conditions. D'abord, offrir un cadre dans lequel des acteurs indépendants des fournisseurs puissent valoriser les effacements sur le marché. Ce n'est pas garanti. L'Autorité de la concurrence a déjà tiré la sonnette d'alarme. À cause des informations dont il dispose sur ses clients, la position d'ancien monopole d'EDF, par exemple, pourrait fausser la concurrence. Surtout, il faudra garantir les bénéfices des effacements pour la collectivité. Si le dispositif se contente de générer des reports de consommations, dans le temps ou vers d'autres sources d'énergie, sans contribuer à la baisse de la demande ou des émissions de gaz à effet de serre, une occasion aura été manquée.