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n vingt ans, on est passé de la locomotive à vapeur au TGV », image Alban Kieffer, chef du service génie climatique et gestion de l'énergie à la direction du bâtiment de la mairie de Reims. Comme les constructions auxquelles il participe à la conception, la rénovation ou l'exploitation, les rôles et missions de l'ingénieur thermicien ont récemment beaucoup évolué. « Historiquement, il s'occupe des systèmes de production de chaud ou de froid, des “tripes” du bâtiment. Aujourd'hui, performance énergétique oblige, il doit prendre en compte la construction dans son ensemble, se poser la question de la réduction des besoins, de l'orientation du bâtiment, de son isolation… Malheureusement, une partie de la profession n'a pas encore compris cela », regrette André Pouget, fondateur en 1982 de Pouget Consultants. Là où classiquement l'ingénieur se dépatouillait en bureau d'études pour faire tenir la création de l'architecte dans le cadre des réglementations thermiques successives, la construction sobre demande un échange permanent dès l'amont entre les deux professions. Un dialogue que le développement attendu de la maquette numérique devrait faciliter.
Mais l'ingénieur thermicien du bâtiment n'exerce pas qu'en cabinet d'ingénierie ou dans une collectivité. Il peut aussi apporter ses lumières directement à une entreprise de construction, un contrôleur technique ou encore à un exploitant ou un gestionnaire de patrimoine qui font tous deux de plus en plus appel à ce profil.
Rédaction d'un programme, audits, suivi de projets, exploitation, vérification réglementaire, etc., son rôle varie selon la nature et la taille de la structure qui l'emploie. Et se complexifie. « L'ingénieur doit intégrer davantage de variables dans son équation, telles que la performance énergétique réelle ou le comportement et le confort des utilisateurs, avec des facteurs comme la qualité de l'air intérieur ou l'apport de lumière naturelle qui peuvent entrer en complète contradiction avec les objectifs de performance énergétique », observe Gaëtan Rémond, directeur bâtiment, énergies et climat du bureau d'études Inddigo et ingénieur formé à l'Insa de Lyon. La formation continue n'est ainsi pas à négliger. « Un de nos ingénieurs s'est récemment formé, à mi-temps durant un an, sur le thème de la santé et du bâtiment », illustre André Pouget.
Autres transformations en cours ou à venir liées à des demandes de plus en plus nombreuses des maîtres d'ouvrages : le besoin de compétences en suivi de chantier ou la prise en compte de l'exploitation future dans la conception. « Pour que les gens empruntent l'escalier plutôt que l'ascenseur, encore faut-il que l'accès à celui-ci soit visible », note Gaëtan Rémond. Une évidence souvent oubliée. l