« Notre objectif n’est pas de réaliser un énième démonstrateur. Nous voulons contribuer au déploiement à grande échelle des smart grids », lance Marielle Dhainaut, conseillère technique du président de la métropole lilloise en charge de l’énergie. Avec You & Grid, la collectivité a été lauréate mi-mars de l’appel à projets « réseaux électriques intelligents » lancé par les ministères de l’Environnement et de l’Industrie. Comme la Région Provence-Alpes-Côte d’Azur avec Flexgrid et la Bretagne avec Smile. Les objectifs restent les mêmes : trouver de nouveaux équilibres de réseau et des mécanismes de flexibilité et de sécurité pour répondre à la croissance de la production renouvelable décentralisée et à l’émergence de nouveaux usages énergivores comme les recharges de véhicules. En revanche, plus question de se focaliser sur les barrières techniques à lever. Les trois projets doivent aider les solutions matures à passer le cap de l’industrialisation.Pour générer des facteurs d’échelle, le cahier des charges des ministères imposait d’englober une unité urbaine de plus de 125?000 habitants et de couvrir au moins une zone rurale de 8 000 km². Le choix des régions ne s’est pas fait par hasard. Paca et la Bretagne sont présentées de manière récurrente comme les deux péninsules énergétiques hexagonales et elles abritent d’ores et déjà plusieurs démonstrateurs. « On a un problème d’adéquation entre l’offre et la demande d’électricité à l’échelle microdépartementale. Nous devons développer de nouveaux systèmes de gestion locale », explique Dominique Ramard, conseiller régional de Bretagne, délégué à la transition énergétique. Côté solutions, le Syndicat départemental d’énergies du Morbihan (SDEM) a déjà prouvé avec Kergrid que l’on pouvait concevoir un bâtiment pour qu’il s’efface durant les pointes de consommation, évitant ainsi les renforcements de réseau inutiles et les moyens de production d’appoint souvent fossiles. De même, les véhicules électriques ou les installations photovoltaïques dotés d’équipements de stockage peuvent s’adapter aux capacités du réseau, voire lui fournir de l’électricité. Mais à quelles conditions ? Avec quel intérêt ? Autant de questions qu’il est temps de résoudre. « Nous devons identifier les valeurs ajoutées des différents services, par exemple avec des analyses coût/bénéfices », explique Marielle Dhainaut.Autre priorité pour la filière : se positionner sur les marchés internationaux. « Nous possédons un écosystème d’entreprises qui estime que son offre est mature, mais qui a l’impression de ne pas avoir accès au marché », regrette Dominique Ramard. Lancé dans le cadre de la Nouvelle France industrielle, l’appel à projets doit étudier la manière dont les expérimentations actuelles pourront demain se généraliser et s’exporter. Outre les investissements privés des nombreux partenaires de ces projets, deux efforts financiers seront consentis pour y arriver. Le premier ne concernera que Paca et la Bretagne. Les opérateurs RTE et ERDF y investiront 80 millions d’euros pour moderniser les réseaux de transport et de distribution avec davantage d’automatismes. Le second se résume à une enveloppe de 50 millions d'euros réservée aux trois projets dans le cadre des investissements d’avenir. Seul hic, « ce dispositif est plutôt conçu pour la R &D, souligne Dominique Ramard. Si le but est de sortir de l’expérimentation, on a besoin d’être accompagné dans le déploiement, en suivant l’exemple de la fibre optique ou de la 3 g ».Olivier Descamps