Dans un train âgé d'une trentaine d'années, on trouve du pyralène dans les condensateurs des motrices, du blaxon dans les cloisons et de l'amiante un peu partout, notamment sous la forme d'un mastic enduit sur les parois internes. Dès 1986, la SNCF a exigé de ses fournisseurs la livraison de trains sans amiante. En 1998, elle arrête le ferraillage des vieux engins, stockés par milliers dans l'attente d'un exutoire. Dix ans plus tard, une filière de traitement est enfin arrivée à maturité. De 2000 à 2003, la première étape a consisté à inciter des ferrailleurs à investir dans le désamiantage. En retour, la SNCF leur garantit des approvisionnements réguliers. Trois entreprises jouent le jeu. À Culoz (01), la société métallurgique d'Epernay (SME) met l'un de ses bâtiments en dépression pour y filtrer l'air à 99,9 % lors du traitement des véhicules amiantés. Recylux fait de même à Baroncourt (55). Sur son site de Sotteville-lès-Rouen (76), le groupe Dupuy préfère s'allier avec Sogedec, un partenaire certifié pour le désamiantage. La SME et Recylux dominent depuis ce marché. Mais les approvisionner en matériel, une fois celui-ci recensé et réformé, ne fut pas si simple. D'où la création en 2005 d'une cellule de coordination à Saint-Jory (31). À sa tête, Philippe Lalanne pilote le déstockage des trains en coordination avec la direction des achats de Lyon, qui contractualise avec les recycleurs. « En cumulant stock historique et matériel annuellement radié, on traite en moyenne 1 400 engins par an, dont les deux tiers sont destinés au recyclage. D'ici à 2010, chaque véhicule amianté aura été traité », ajoute-t-il.
Sur le terrain, on fait dans le sur-mesure : « Chaque engin nécessite un inventaire, une dépollution préalable, l'extraction des batteries ou d'autres pièces en fonction des besoins de nos ateliers. Après démantèlement, le prestataire en restitue aussi certaines comme les bogies et les essieux », précise Philippe Lalanne. Stratégiquement, il a été choisi de s'attaquer « nid par nid » aux stocks prioritaires à traiter. Financièrement, les revenus de la revente de la ferraille ne compensent pas le coût du désamiantage.
Du dégarnissage de l'intérieur de la voiture au stockage des déchets en centre de classe 1, la prestation coûte en moyenne 15 000 euros pour une voiture voyageurs de 45 tonnes. Il reste alors 20 tonnes de ferrailles revendues entre 6 000 et 8 000 euros au prestataire. Donc plus les ferrailles ont la cote, moins la SNCF met la main à la poche. « On tend même à compenser nos dépenses grâce à la revente des ferrailles issues du démantèlement des locomotives et des wagons de fret », motive Pierre Borgnis, à la direction des achats. Peu amiantés, ces gros véhicules contiennent 95 % d'acier et même du cuivre. Autre exemple d'opération rentable, le démantèlement des rames en inox, un métal dont le cours atteint des sommets. Une poule aux oeufs d'or dont la SNCF compte bien profiter.