« L'opération demande davantage de main-d'oeuvre, mais la valorisation des matériaux permet de s'y retrouver. » Technicien à la communauté urbaine de Dunkerque, Erik Dereeper rassure. « Déconstruire proprement un bâtiment ne coûte pas toujours plus cher. » L'objectif est simple : trouver des filières de recyclage pour les radiateurs, portes et autres cloisons, puis mettre à nu le bâtiment avant de le réduire en miettes. Dans la collectivité, le procédé tend à devenir la norme depuis le démantèlement, l'été dernier, du lycée Benjamin-Morel. L'exigence était stipulée dans le cahier des charges de l'appel d'offres soumis aux entreprises de démolition. « Nous leur avons imposé la visite du site pour qu'elles estiment précisément la quantité de déchets qu'elles étaient aptes à valoriser », raconte Erik Dereeper. L'analyse des méthodologies de déconstruction montre que l'usage n'est pas encore entré dans les moeurs chez les professionnels. « Nous avons vite écarté un des candidats qui proposait de tout démolir et de trier après ! » se rappelle le technicien. Laurent Chateau, spécialiste de la gestion optimisée des déchets à l'Ademe, applaudit la démarche : « Le plus important n'est pas ce que l'on fait sur le chantier. C'est ce que l'on anticipe. » Une fois le contrat signé, il est un peu tard pour exiger quoi que ce soit d'un maître d'oeuvre qui, sans moyens, cherchera à éliminer ses déchets à moindre coût. L'ingénieur estime néanmoins que le commanditaire doit faire encore plus. « Attention à ne pas se défausser, analyse-t-il. C'est au propriétaire de l'objet sur lequel portent les travaux que revient le soin de préciser de quoi son bâtiment est composé et de dire ce qu'il attend exactement. L'audit préalable de déconstruction doit être une pièce du marché. » Avec la loi Grenelle 2, le diagnostic devient obligatoire sur les chantiers de plus de 1 000 mètres carrés (un chiffre à confirmer par décret). Pour Laurent Chateau, c'est un travail à réaliser même en deçà de ce seuil. La communauté d'agglomération de Cergy-Pontoise a expérimenté la méthode pour déconstruire l'ancienne caserne Bossut. L'audit, réalisé début 2008, a pris en compte les documents disponibles, puis des relevés sur site ont été effectués. L'Ademe recommande ensuite au maître d'ouvrage de chercher lui-même des débouchés locaux. Car si certaines filières sont matures, comme le recyclage des ferrailles orientées vers les aciéries ou des bétons concassés transformés en graves, la valorisation des bois traités, du plâtre ou des PVC est nettement plus complexe : les filières existent, mais pas uniformément sur le territoire. À Dunkerque, la forte quantité de fenêtres en PVC a justifié leur transport jusqu'à l'entreprise de valorisation située à 200 km. Mais la distance trop importante, l'inexistence de réseaux de collecte ou le coût de l'opération limitent parfois l'intérêt du recyclage. « Nous préconisons enfin d'intégrer dans l'appel d'offres la possibilité de faire une réception intermédiaire du chantier pour vérifier que tout est bien enlevé avant l'abattage », précise Laurent Chateau. Pour avoir la garantie que tout s'est déroulé dans les règles de l'art, reste à exiger un bilan des déchets effectivement générés.