La collecte pneumatique n'est pas nouvelle. La société suédoise Centralsug, qui deviendra Envac, a mis au point son premier système d'aspiration par dépression des déchets au sein de l'hôpital de Stockholm voilà plus d'une cinquantaine d'années ! Depuis, Envac a équipé plus de 1 500 quartiers dans le monde entier avec ses systèmes, fixes ou mobiles. Comment fonctionne la collecte pneumatique ? « Très simplement », indique Bruno Martin, le directeur commercial Envac France. « Pour le système fixe, cela consiste à déposer les déchets dans des points de collecte, pour les acheminer par aspiration dans des conduites souterraines jusqu'à un terminal dans lequel est installée une centrale d'aspiration. Ces déchets sont ensuite expédiés vers les filières de gestion des déchets appropriés », résume-t-il. Pour ses partisans, la mise en place d'un tel système ne présente que des avantages : optimisation de l'hygiène et de la sécurité pour les habitants et le personnel ; suppression du risque d'incendie des conteneurs ; suppression des charges de précollecte ; réduction des nuisances sonores et olfactives ; diminution du nombre de camions de collecte… Ses détracteurs pointent néanmoins du doigt son coût d'investissement élevé, et le fait que, pour alimenter le réseau d'aspiration, le système est gourmand en énergie. « Durant toutes ces années, de nombreuses avancées ont été faites en la matière, réduisant considérablement la consommation énergétique », assure cependant Bruno Martin.
Outre les centrales fixes, Envac a développé, dès la fin des années 1980, un système mobile, le Movac, « adapté à la collecte de volumes plus modestes pour des zones aux typologies particulières (petits quartiers à circulation difficile, et/ou très éloignés les uns des autres…) », explique-t-il. Concrètement, les habitants déposent leurs déchets dans des bornes de collecte qui les stockent temporairement dans des réservoirs enterrés. Des camions « aspirants » viennent ensuite se brancher sur des points d'aspiration, placés en périphérie. Il en résulte une réduction très importante des poids lourds sur la zone à collecter, une intervention plus rapide, ainsi qu'une diminution de la main-d'œuvre… En France, la collecte pneumatique, fixe ou mobile, reste peu répandue. « Le premier système (une centrale fixe) a été installé par Envac à Grenoble, dans le quartier de la Villeneuve, en 1972 », rappelle Bruno Martin. « Mais faute d'entretien pendant de longues années, ce réseau connaissait des dysfonctionnements importants et les élus locaux ont finalement décidé son abandon », regrette-t-il. D'autres installations tournent avec succès à Monaco, mais aussi à Montpellier. Ces dernières années, Envac a également remporté, avec Veolia, plusieurs marchés en Île-deFrance. Une première centrale a ainsi été installée à Romainville, en octobre 2011. Elle concerne 2 600 logements situés dans six quartiers rénovés. Depuis, trois autres installations ont vu le jour : deux à Issy-les-Moulineaux (Hauts-de-Seine) qui a investi à la fois dans une centrale fixe et un système mobile sur l'éco-quartier du Fort-d'Issy, une première en France, et un réseau fixe à Batignolles (Paris VII) (cf. : utilisateurs). Deux autres marchés ont été décrochés en région parisienne par le groupement composé de l'entreprise espagnole Ros Roca et de l'opérateur Sita, concurrents directs de Envac : à Vitry-sur-Seine (Val-de-Marne), et sur l'éco-quartier des Docks à Saint-Ouen (Seine-Saint-De-nis). À noter que, dans le long conflit qui opposaient Envac et Ros Roca sur l'utilisation de la technologie développée par Envac, et protégée par un brevet européen (portant notamment sur la réduction des coûts énergétiques), la Cour suprême de Barcelone a confirmé, fin 2012, qu'Envac est « la seule titulaire du brevet européen nº 1212246 protégeant cette méthode de gestion des ordures ». Enfin, un troisième acteur, Marimatic, société spécialisée dans les déchets industriels, a fait connaître, en 2013, son intention de se positionner sur ce créneau avec son dispositif nommé le M-Taifun (un système à vis), mais n'a, à ce jour, remporté aucune affaire à notre connaissance…
Une solution intermédiaire entre porte-à-porte et PAV
Une collecte « mitoyenne, à la fois proche et citoyenne » : c'est le concept porté par Lionel Rousset, fondateur et dirigeant de la société Biloba Environnement (Vénissieux) spécialisée dans la conception et la vente de conteneurs. Un concept basé sur la collecte latérale pratiquée en Italie ou en Espagne, que Biloba a remis à plat, amélioré, et espère voir se développer en France. Sa solution technique repose sur les Bilobac, des conteneurs développés spécifiquement en interne. Outre leur design moderne, leurs volumes utiles – de 2 à 6 m3 – sont plus importants que ceux des poubelles utilisées par nos voisins espagnols et italiens (3 200 l maximum). Déclinés en six modèles, ils peuvent être implantés partout, hors sol ou entresol : « À 640 mm de profondeur maximum, de façon à éviter les réseaux en sous-sol, ce qui génère des gains importants en matière d'installation et de logistique », précise Lionel Rousset. L'idée novatrice est « de mailler finement l'espace, en implantant des Bilobac (pour les OMR et la collecte sélective) tous les 170 m environ, ce qui permet d'obtenir de bons ratios de collecte de la part des usagers ». Le vidage des Bilobac s'effectue ensuite par un camion à chargement latéral, entièrement automatisé. Pour tester grandeur nature sa solution, Lionel Rousset a travaillé en partenariat avec Farid France, une société implantée à ses côtés à Vénissieux, filiale du groupe italien Farid Industrie qui, depuis plus de trente ans, conçoit, fabrique et commercialise une large gamme de BOM. Le véhicule utilisé est un modèle de la série FMO, l'un des fleurons du constructeur. Pour ses concepteurs, cette solution ne présente que des avantages : la capacité des contenants la rend bien moins onéreuse et plus simple à mettre en œuvre (arrêts moins fréquents des bennes…) que le porte-à-porte. La collecte latérale offre en outre plus de sécurité pour le personnel : le chauffeur ne sort pas de son camion ; de plus, le temps de collecte est très rapide : toute manœuvre comprise, l'opération ne nécessite que 45 secondes pour des conteneurs de 5 m3 . Pour rappel, il faut 5 à 6 minutes – quand tout se passe bien – pour vider des conteneurs classiques en points d'apport volontaire à l'aide des camions-grues, avec les risques que l'on connaît. Point de crispation : la crainte de voir disparaître des postes d'équipiers de collecte… « Il ne s'agit pas de supprimer des emplois, mais de réaffecter ces personnes à d'autres prestations, qualitatives, telles que des missions de propreté », avance Lionel Rousset.
Les déchetteries mobiles, au plus près des usagers…
Il y a vingt ans, avec sa Moving'Tri (brevet déposé en 1993 !), Aymar de Seroux, fondateur et dirigeant de la société Sepra Environnement, dans la Loire, inventait un nouveau mode de collecte, destiné aux collectivités: la déchetterie mobile. Cet outil, toujours unique sur le marché, se compose d'une remorque transportant 5 bennes de 6 m3 . Un camion, équipé d'une benne de 30 m3 et d'une grue, tracte la Moving'Tri et procède à son installation sur un emplacement prévu (400 m² minimum). À l'instar d'une déchetterie fixe, Moving'Tri collecte les différents types de déchets ainsi que les encombrants (matelas, meubles, luminaires, etc.). Les utilisateurs, à bord de leur véhicule, empruntent la rampe d'accès, stoppent sur la plateforme pour décharger et trier leurs déchets. En fin de journée, les bennes sont vidées dans une déchetterie fixe. Cet équipement vient combler l'absence d'infrastructures dans certaines zones reculées, mais représente également une solution complémentaire aux déchetteries fixes déjà installées par les collectivités. Ces dernières l'utilisant pour améliorer leur taux de collecte. À ce jour, plus de 20 Moving'Tri ont été achetées par des collectivités, en métropole comme à la Réunion, la Guadeloupe, la Martinique. Très récemment, Sepra Environnement a lancé « le premier service de location de déchetterie mobile », avec comme premier client la communauté de commune du canton de Marcigny (Saône-et-Loire – 71, cf. : utilisateurs). « Ce service souple et réactif, sans limitation dans le temps, devrait trouver de nombreux débouchés à l'heure où de nombreuses déchetteries fixes doivent être relookées et mises aux normes », analyse Aymar de Seroux.
Les grands opérateurs de la collecte et du tri se sont eux aussi engouffrés sur ce segment de la déchetterie de proximité… En janvier 2012, Veolia Propreté Île-de-France lançait ainsi sa Proxitri, « déchetterie de proximité en milieu urbain ». Ce concept « al-liant souplesse et bon sens » permet aux habitants des communes concernées de déposer, chaque semaine, sur l'un des lieux identifiés, les déchets habituellement acceptés en déchetterie. Sita propose également un système similaire, avec de grandes bâches déployées à même le sol et repliées en fin de journée pour être évacuées par camions… Ce dispositif est complété par des déchetteries fluviales qui peuvent être mises en place sur un quai facile d'accès pour les particuliers, pour une courte durée : une à deux journées. Les déchets seront chargés chaque soir sur une péniche…
L'impact de l'informatique sur la collecte
Les outils informatiques au service de la collecte se sont multipliés ces dernières années… sans véritablement révolutionner les pratiques traditionnelles bien ancrées. Cela est particulièrement vrai pour les solutions de planification et d'optimisation puisque, au sein des collectivités, la plupart des tournées continuent de se faire, à l'ancienne, avec un crayon et du papier ! Seule une poignée d'acteurs sont présents en France sur ce segment comme Eurobios (Paris), pionnier en la matière, avec son Waste Optimiser développé en 1999 et sans cesse amélioré depuis, ou le bureau d'études et éditeur ancré au Pays basque, Exeo Solutions, qui a mis au point deux logiciels de cartographie destinés spécifiquement à la collecte des déchets. Ils doivent rivaliser avec de gros acteurs comme Ortec, très actif dans le monde du transport/logistique et de la distribution, entré dans l'univers des déchets en 2010, et de nouveau entrants comme l'éditeur généraliste allemand PTV Group qui, avec sa solution PTV Smartour, a décroché ses premiers contrats l'an dernier. Les solutions de géolocalisation suscitent davantage d'intérêt de la part des prestataires de collecte comme des collectivités. Novacom Services, Sabatier Géolocalisation ou encore Masternaut proposent des solutions éprouvées… Et de nouvelles apparaissent régulièrement. Les solutions (puces, dispositifs de pesage, logiciels d'identification et de traitement des données), destinées à répondre aux enjeux de la tarification incitative (facturation au poids, à la levée, au volume…), se commercialisent au rythme du développement de celles-ci : autrement dit, lentement ! Ce qui n'empêche pas l'innovation… Ainsi, la société strasbourgeoise RF Conception a récemment développé une solution utilisant la communication à ultra haute fréquence (UHF) destinée à simplifier le passage à la tarification incitative pour les collectivités. Contrairement à la RFID à basse fréquence, elle n'exige pas le renouvellement du parc de bacs pour les équiper de puces, selon ses concepteurs, qui annoncent un « coût d'équipement divisé par trois ». Le système a déjà été adopté à Molsheim (Bas-Rhin) et Dole (Jura). n