Recyclage Récupération : Y a-t-il un enjeu ou des intérêts particuliers à organiser cette année la convention au cœur de l'Europe centrale ? Alexandre Delacoux : Notre présence en Europe est régulière et nécessaire : 50 % de nos membres sont européens. Il y a deux ans, le BIR posait ses valises à Varsovie. Au printemps prochain, ce sera à Berlin. Ce n'est pas un hasard. Le marché européen produit beaucoup de matières et a besoin de les écouler. L'Europe centrale se situe à un carrefour pour le marché des scraps. À la fois proche de la Russie et de l'Orient, cette région est une zone de transit mais aussi de consommation et de transformation. On sait ainsi que certains territoires jouent ce rôle de plateforme. Tel est le cas du Moyen-Orient – où nous étions en mai dernier –, passerelle privilégiée pour le marché indien. Aujourd'hui, il n'existe plus de marchés émergents porteurs comme la Chine, il y a quinze ans. Pourtant, malgré les difficultés économiques et politiques actuelles dans le monde, le recyclage s'inscrit dans une dynamique. Pour des questions de prix, de transport et de proximité avec les sources des gisements, Prague et sa région représentent donc des territoires privilégiés pour les recycleurs et les négociants de matières secondaires.
RR : Quelles seront les thématiques traitées cet automne ? Y a-t-il des sujets que vous voulez aborder en particulier ?
A. D . : La convention automnale se distingue par cette ambiance de travail et de business. Par comparaison, le BIR de printemps est plus politique avec ses grandes assemblées et ses annonces officielles. Fort de ce constat et pour renforcer ce lieu d'échanges, nous allons mettre en œuvre, pour la première fois cette année, une application mobile pour tous les inscrits. De cette façon, ils pourront se retrouver aisément pour faire des affaires. Par ailleurs, plusieurs présentations auront trait à l'évolution législative qui concerne l'industrie du recyclage. Le Conseil international de l'environnement joue par exemple un rôle important en invitant la Confédération européenne des industries du recyclage (Euric) pour parler de l'économie circulaire. Place également aux invités de marque pour élargir le débat et éclairer notre réflexion sur le métier et l'avenir du marché. C'est le cas de la division ferrailles qui fera ses projections 2016 et apportera, grâce à Becky E. Hites de Steel Insights (voir encadré), un peu d'espoir à ce secteur malmené.
RR : En qualité d'organisation internationale, quelle est votre vision sur l'évolution du marché et la place de l'industrie du recyclage ? A. D. : On observe en effet qu'en dépit du ralentissement économique, du recul de la Chine et des contraintes environnementales, le recyclage est devenu une activité centrale. La préservation des ressources et l'économie circulaire sont des thèmes qui encouragent notre industrie à se développer. Même si 2016 ne s'annonce guère meilleure que 2015, nous aurons toujours besoin d'écouler la matière collectée. Avec le temps, nous voyons aussi les orientations des flux évoluer. Pour prendre un exemple particulièrement prégnant, nous constatons, depuis plusieurs années, que la prédominance du transport des gisements de DEEE allant du Nord vers le Sud s'est érodée au bénéfice d'une croissance des échanges Sud-Sud.
Notre activité doit par ailleurs continuer à se moderniser en utilisant les nouvelles technologies et en investissant dans l'innovation. Autre sujet sur lequel notre vigilance va s'attarder à Prague : les vols de déchets. Que ce soit pour les DEEE ou les textiles, notre organisation défend les intérêts des membres du BIR et de la profession au plus haut niveau international (OCDE, Nations unies, Interpol, International Maritime Bureau). Notre activité est complétée par le travail des associations nationales membres du BIR à leur niveau. Par exemple depuis deux ou trois ans, l'Isri s'est rapproché de la police fédérale américaine pour lutter contre les trafics organisés. À ce sujet, nous avons tous à cœur de garder à l'esprit des services publics que le recycleur fait avant tout partie de la solution et non pas du problème. n