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[Tribune] La réversibilité : un alignement des planètes ?

PUBLIÉ LE 3 MAI 2021
MICHÈLE RAUNET, NOTAIRE ASSOCIÉ CHEUVREUX.
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[Tribune] La réversibilité : un alignement des planètes ?
Michèle Raunet, notaire associé Cheuvreux. Crédits : DR
Pour faire face à la crise des logements et aux défis environnementaux du secteur du bâtiment, certains acteurs préconisent la transformation des bureaux en logements. Michèle Raunet, associé Cheuvreux Notaires, évoque les enjeux de la réversibilité de bâtiments capables de s’adapter aux différents usages.

La question de la réversibilité est un sujet qui intéresse le monde de l’urbanisme et de l’immobilier depuis déjà longtemps. Il y a presque 30 ans, la loi « Méhaignerie » du 21 juillet 1994 relative à l’habitat avait notamment pour objectif d’inciter à la transformation de bureaux en logements pour remédier à la crise du logement en instaurant le changement d’usage temporaire. Ce mécanisme n’a pas eu l’effet escompté et a été supprimé en 2005.

A la fin des années 2010, de nombreux locaux de bureaux sont vacants et obsolètes, les besoins en logement sont importants notamment en zone tendue ; le sujet redevient prégnant dans le débat public. Plusieurs textes interviennent. la loi Macron en 2015 réinstaure le changement d’usage temporaire. Les évolutions apportées par la réforme du contenu du PLU entrée en vigueur le 1er janvier 2016 sécurisent et favorisent l’utilisation de règles plus souples et favorables à la réalisation de bâtiments évolutifs, telles que notamment la réforme des destinations, l’utilisation de règles qualitatives basées sur des objectifs de résultats et non de moyens, l’utilisation des Orientations d’Aménagement et de Programmation (OAP).

Enfin, la fin de l’urbanisme de « zoning » qui privilégiait le regroupement de certaines fonctions dans des secteurs de la ville va aussi dans le sens d’une plus grande adaptabilité de la ville et de ses bâtiments.

Un enjeu urbain et environnemental

La loi Elan en 2018 contient un chapitre consacré à la transformation des bureaux en logements avec l’instauration de bonus de constructibilité ou la création de la catégorie des immeubles de moyenne hauteur qui disposent de règles de sécurité adaptées. L’objectif est d’assurer la viabilité économique de ces transformations. Toutefois la volonté politique ne suffit pas et encore récemment les transformations de bureaux en logements étaient plutôt rares, même si de nombreuses initiatives existaient.

Certes, le discours des professionnels architectes et maîtres d’ouvrage changent. L’évolutivité des bâtiments devient un enjeu urbain et environnemental, car elle participe à la réduction de l’artificialisation des sols et la revitalisation de certains quartiers de ville en facilitant la réutilisation de bâtiments existants. Toutefois, des obstacles techniques, économiques et politiques persistent. En effet, les élus de nombreuses communes ne souhaitent pas voir l’activité économique disparaitre au profit du logement nécessitant la réalisation d’équipements publics. Il y a en revanche peu d’obstacles juridiques, ces transformations portant la plupart du temps sur des immeubles mono propriétaires et les PLU pouvant évoluer pour permettre ces évolutions.

L’urgence climatique et surtout la crise sanitaire vont donner à cette question l’impulsion nécessaire en l’embrassant beaucoup plus largement. La crise a deux conséquences importantes : d’une part, le logement devient le produit immobilier « phare » devant tous les autres. La gestion du stock de bureaux est devenue un enjeu tant pour les pouvoirs publics que les investisseurs. L’institut d’épargne immobilière (IEIF) prévoit que la montée en puissance du télétravail dans la seule Île-de-France conduira dans les dix prochaines années à un excès de 3,3 millions de m2 de bureaux, soit 6,5 % du parc. D’autre part, la crise a accentué la prise de conscience de l’importance des enjeux de réduction de la consommation de matière tout au long de la vie d’un bâtiment.

Simplification des transformations de bureaux en logements

Depuis le début de l’année 2021, les initiatives tant des pouvoirs publics que des professionnels s’enchaînent. La ministre du Logement a réuni le 08 février dernier les acteurs signataires de la charte d’engagement pour la transformation de bureaux en logements en Ile-de-France de 2018. Emmanuelle Wargon souhaite accélérer le mouvement et a donc présenté une nouvelle feuille de route, visant à une meilleure connaissance du parc de bureaux et de son évolution, et à la mise en place de mesures de simplification pour améliorer le modèle économique de la transformation de bureaux en logements et à faciliter les opérations.

Le 09 février, c’est la ville de Paris qui annonçait un nouvel appel à projets urbains innovants pour la transformation de six sites de bureaux. Elle a également des objectifs ambitieux en ce sens tant dans son futur PLU bio climatique que dans son Pacte pour la Construction.

Avec le projet de loi Climat, une nouvelle étape est franchie. Outre la question du traitement du stock, l’article 54 du projet souhaite inciter les opérateurs à construire réversible ou à ne plus démolir les constructions si ces dernières peuvent être rénovées. En effet, ce texte vise à imposer une étude du potentiel de réversibilité et d’évolution lorsqu’il est envisagé la démolition d’un bâtiment existant ou la construction de certaines catégories de bâtiments neufs afin d’identifier les solutions de changements d’usage possibles.

L’objectif de cette mesure est de fournir aux maîtres d’ouvrage un outil d’aide à la décision. Ce texte a pour ambition de passer d’une économie linéaire vers une économie circulaire dans le domaine de la construction permettant ainsi la limitation de la consommation des ressources ainsi que de l’émission de gaz à effet de serre.

Effet d’annonce ou réalité ? De toute évidence la réversibilité est un impératif ; la crise sanitaire a accéléré cette prise de conscience et c’est tant mieux. L’immobilier devient ou plutôt redevient durable, c’est un effet positif de ces derniers mois.
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