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Tribune | « Matériaux biosourcés et géosourcés : une révolution au coeur du secteur de la construction »

PUBLIÉ LE 21 DÉCEMBRE 2023
YASSINE EL MENDILI, PROFESSEUR ET RESPONSABLE DE L’ÉQUIPE MATÉRIAUX POUR LA CONSTRUCTION DURABLE DE L’INSTITUT DE RECHERCHE DE L’ESTP.
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Tribune | « Matériaux biosourcés et géosourcés : une révolution au coeur du secteur de la construction »
Yassine El Mendili / Crédits : ESTP
Dans cette tribune, Yassine El Mendili, professeur et responsable de l’équipe matériaux pour la construction durable de l’Institut de recherche de l’ESTP, défend le recours aux matériaux biosourcés et géosourcés pour décarboner la filière.

La construction représente aujourd’hui 43 % de la consommation énergétique annuelle française et génère 23 % des émissions de gaz à effet de serre (GES)[1], ce qui en fait un des secteurs les plus impactants sur le changement climatique. Face à l’urgence de la transition écologique, il est donc impératif d’innover pour décarboner la filière. Pour les experts, une solution se dégage : faire reposer les systèmes constructifs sur les bio et géomatériaux, bien moins polluants que les matériaux traditionnels, qui révolutionnent déjà aujourd’hui notre façon de construire.
 
Les écomatériaux au service d’une construction décarbonée

Les matériaux biosourcés sont issus de la biomasse et des animaux (bois, laine, chanvre, lin, etc), là où les géosourcés proviennent du sol, comme la terre crue. À l’inverse des matériaux en béton traditionnel, dont la fabrication nécessite de grandes quantités d’énergies carbonées (broyage et traitement thermique), celle des biomatériaux mobilise des quantités d’énergies marginales, permettant même leur utilisation comme “puits de carbone” du fait de leur capacité à stocker le CO2 émis dans l’air durant leur cycle de vie. Ainsi, certains bâtiments sont en capacité aujourd’hui d’absorber plus de CO2 qu’ils n’en rejettent.
 
La filière doit cependant répondre à une problématique de fond : certains matériaux cimentaires sont difficilement remplaçables par des alternatives 100 % biologiques. C’est notamment le cas du béton, sans lequel il est encore aujourd’hui très complexe de dresser des bâtiments de plus de cinq étages. Tout l’enjeu réside dans l’intégration de ces biomatériaux à des structures en béton traditionnel, en prenant en compte de nouvelles fonctionnalités mécaniques et hygrothermiques, tout en prenant soin de la préservation des ressources naturelles utilisées.
 
Pour les experts, l’utilisation des biomatériaux doit s’inscrire dans une démarche architecturale plus vaste et plus globale : l’architecture régénérative, au-delà du recyclage des matériaux de déconstruction en fin de vie des bâtiments. En biologie, la régénération fait référence à la capacité à se renouveler, à reconstituer des tissus. Appliquée à l’architecture, elle implique d’inverser les dommages écologiques pour avoir un impact positif sur l’environnement naturel, biologique, social et économique. C’est finalement aller plus loin que la durabilité en passant de “faire le moindre mal” à “faire du bien” à l’environnement. L’avantage des matériaux biosourcés et géosourcés est qu’ils se recyclent réellement à l’infini, soit en les réutilisant, soit en les réinjectant dans un cycle naturel (grâce au compostage par exemple)
 
Un cadre réglementaire favorable

Depuis quelques années, le gouvernement français renforce ses dispositifs réglementaires afin d’accélérer le développement des biomatériaux. En 2012, le label “Bâtiment biosourcé” a ainsi permis d’attester de la conformité des nouvelles constructions intégrant des matériaux biosourcés. La Réglementation environnementale (RE) 2020 est venue compléter ce dispositif  un peu plus tard, telle que prévue par la loi Évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (Elan) issue du Grenelle de l’environnement. Entrée en application en janvier 2022, elle prévoit de poursuivre l’amélioration de la performance énergétique et la baisse des consommations des bâtiments neufs par l’intégration de matériaux biosourcés, de diminuer l’impact sur le climat des bâtiments neufs et de permettre aux occupants de vivre dans un lieu de vie et de travail adapté aux conditions climatiques futures.
 
En complément de cette réglementation, il existe de nombreuses incitations à destination des professionnels et des particuliers. Le plan de relance exceptionnel que l’État a déployé à la suite de la crise du Covid-19 bénéficie fortement au secteur, à travers deux axes : le volet “rénovation énergétique”, qui implique l’utilisation des matériaux biosourcés en rénovation, et le volet “transition agricole, alimentation et forêt”, prévoyant des aides aux investissements face aux aléas climatiques, le reboisement des forêts françaises et le soutien à la filière bois.
 
Une révolution également en cours dans l’enseignement supérieur

Ainsi, la construction durable ne consiste plus seulement aujourd’hui à construire des bâtiments écologiques. Il faut aller plus loin en tenant compte de l’expérience future des utilisateurs, des coûts énergétiques des bâtiments, de l’utilisation des déchets industriels, du recyclage des matériaux après le démantèlement et du développement économique des filières locales dans un modèle d’économie circulaire et régénérative. Cette nouvelle approche pousse plusieurs écoles à inclure aujourd’hui dans leurs cursus d’ingénieurs une place de choix aux bios et géomatériaux, comme c’est le cas à l’ESTP dès la première année.
 
Car le constat fait désormais consensus dans le secteur : les matériaux bio et géosourcés s’imposent comme une innovation incontournable de la construction durable. Intégrée à une approche d’architecture régénérative, cette vision, maintenant largement partagée, participera à l’accélération de la décarbonation de notre société.
 

[1] Source : Construction et performance environnementale du bâtiment (octobre 2022) / Ministère de la transition écologique et de la Cohésion des territoires

 
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