Les usines d'épuration s'adaptent-elles à leur époque ? La première évolution fut d'ordre technologique. Bien que les procédés à boues activées constituent encore la majorité du paysage de l'épuration, avec une part de 59 % dans le bassin Seine-Normandie, les technologies plus compactes se sont imposées. Les villes furent les premières à les adopter du fait de la pression foncière. Et, à ce titre, l'évolution des cinq stations d'épuration du Siaap, traitant aujourd'hui 72 % des eaux usées collectées en Île-de-France, est emblématique. Si la boue activée de la première tranche de la station de Seine-Aval, déclinée et améliorée sur les autres tranches, voire appliquée en 1973 à Marne-Aval, représentait cette logique d'un traitement extensif, elle ouvrit en 1987 sur Seine-Amont la voie de la dénitrification concomitante au traitement du carbone. Il fallut cependant attendre le début des années 1990 pour voir s'installer les premiers traitements intensif des eaux. Si Marne-Aval inaugurait l'ère des biofiltres, ce n'est qu'en 1998 à Seine-Centre que le procédé fut pleinement exploité pour les traitements du carbone et de l'azote sur trois étages. Située dans la zone industrielle, l'usine a donné ses lettres de noblesse à l'architecture de l'assainissement. Les bâtiments furent couverts pour éviter une dispersion des odeurs au gré du vent et les procédés empilés pour limiter l'emprise foncière. Neuf ans après, les inaugurations de l'unité de nitrification-dénitrification à Seine-Aval et celle de Seine-Grésillons à Triel-sur-Seine marquent une nouvelle étape. Les usines sont de véritables bijoux architecturaux. Elles sont pilotées par les agents du Siaap à l'aide de systèmes informatiques perfectionnés, tandis que l'exploitation devient plus aisée dans les zones les plus critiques, où par exemple la prise d'air vicié avant le prétraitement y limite les teneurs en H2S. En parallèle, l'hygiène, l'ergonomie et la sécurité s'imposent sous l'égide d'une normalisation contraignante. Et, les nouvelles réalisations placent l'humain au coeur du process. L'usine se conçoit désormais en matière d'ergonomie et de condition de travail de l'exploitant, en privilégiant sa santé et sa sécurité. Demain verra de nouvelles tendances s'affirmer. Le développement durable a déjà été initié sur Seine-Aval, le site historique de notre syndicat. Seine-Aval est aussi la seule station française soumise aux quotas de CO2. La modernisation de l'usine Marne-Aval à Noisy-le-Grand permettra d'aller plus loin avec des panneaux solaires et le turbinage des effluents. Et la réutilisation des eaux pourrait faire un retour au Siaap avec, à Seine-Aval, 150 m3/h pour les besoins d'exploitation, et à Seine-Morée dont l'ouverture est prévue en 2010, des membranes de microfiltration. Le public est désormais le bienvenu pour visiter l'usine. La demande d'informations est forte et l'usine se dote d'outils pédagogiques (parcours, ateliers pour les écoliers), voire de réalisations artistiques.Enfin, l'exploitant ne peut pas ignorer ses riverains. Le débat public sur la refonte de Seine-Aval mené en 2007 sous l'égide de la Commission nationale du débat public montre que les résistances locales sont loin d'être abolies. Aujourd'hui, les populations réclament à juste titre que tout soit fait pour que les usines, qu'ils ont reçues en héritage, respectent leur cadre de vie et leur environnement : une nécessité industrielle dont la vocation est de protéger l'environnement en réduisant les nuisances qu'il génère.