Vingt ans après les inondations du 3 octobre 1988, qui ont causé la mort de neuf personnes et provoqué des dizaines de millions d'euros de dégâts, Nîmes (Gard) compte sur des outils d'analyse en temps réel permettant de réagir en cas de fortes intempéries. Suite à cette catastrophe, la ville s'est tout d'abord engagée dans une série d'aménagements hydrauliques pour se protéger : bassins de rétention, élargissement des canalisations... Elle s'est aussi dotée d'un dispositif d'anticipation allant au-delà de la prévision météorologique.
C'est ainsi qu'en 2004, Espada est né. Cet outil de gestion de crise récupère en temps réel des données de Météo-France sur les lames d'eau observées par radar, qui sont actualisées toutes les cinq minutes. À cela s'ajoute une trentaine de stations de mesures pluviométriques et limnimétriques sur les retenues d'eau et dans les bassins versants environnants, dont les mesures parviennent au système central par diffusion radionumérique.
En complément, Nîmes a équipé les points sensibles du centre-ville de caméras. Toutes ces données ainsi que les éléments fournis par les agents municipaux présents sur le terrain parviennent en temps réel à une cellule de crise, installée dans un local dédié autonome en électricité. À l'aide de seuils et d'abaques (graphiques d'anticipation des dépassements des seuils), l'équipe peut ainsi rapidement organiser la gestion de crise. Pour aller plus loin, les autorités municipales ont confié au bureau d'études Egis Eau la réalisation d'un modèle hydraulique. Les données pluviométriques permettent de calculer les débits dans chacun des exutoires et d'indiquer quand il y aura débordement. En y ajoutant le ruissellement urbain, le modèle détermine l'ampleur de l'inondation.
La comparaison de ces informations avec la cartographie des inondations survenues par le passé (une telle cartographie a été réalisée pour tous les événements depuis 1988) « indique dans quel scénario d'inondation nous nous trouvons et permet d'adapter immédiatement les actions de sauvegarde à la gravité de la situation, note André Martin, responsable du service pluvial de la Ville de Nîmes. Nos bassins versants étant extrêmement courts, la durée d'anticipation de la crue ou du débordement est brève (au maximum une heure). Ce suivi reste néanmoins de première importance dans la gestion de crise car il permet de fonder les décisions à prendre sur une connaissance précise de la situation et de son évolution à court terme ».
TROIS NIVEAUX DE GRAVITÉ
Le plan communal de sauvegarde définit trois niveaux de gravité inondation. À chaque niveau correspond une série de mesures, telles que barrer des rues, dégager des exutoires, prévenir les établissements sensibles ou la population. L'un des autres outils dont la ville s'est dotée dans le cadre du programme Espada est un automate d'appels : deux cents établissements recevant du public sont prévenus par un appel automatique, fait au nom de la mairie, du passage d'un niveau de risque à l'autre.
Malgré tous ces automatismes, André Martin rappelle que « la décision de passer d'un niveau du risque inondation à l'autre n'est pas automatique. Elle est prise par les élus ou leurs représentants sur les conseils de l'équipe de la cellule de crise, composée de spécialistes en hydrologie, en météorologie et en gestion de crise. Espada repose avant tout sur leur compétence ».