On rappelle souvent ces chiffres, sans prendre vraiment la mesure de la réalité qu'ils cachent : 884 millions de personnes n'ont pas d'accès à l'eau potable et salubre ;
2,6 milliards d'individus ne disposent pas d'une installation basique d'assainissement. Et puis un jour, on réalise que, chaque année, 1,5 million d'enfants meurent des suites d'une maladie hydrique. L'eau, source de vie, devient alors l'eau qui tue.
Tel est le quotidien des experts de l'eau, cadres aux vies confortables, mais confrontés à cette réalité implacable. Sans doute est-ce pour cela que monte dans les colloques internationaux l'envie de dépasser la simple identification des problèmes et de trouver des solutions concrètes (lire p. 6). En ce sens, la récente reconnaissance du droit à l'eau et à l'assainissement par l'assemblée générale des Nations unies (lire p. 14) est une avancée à noter. Cette prise de conscience est un prérequis pour mobiliser l'opinion publique et les pouvoirs politiques. Reste à trouver des réponses techniques et économiques adaptées au contexte local et à associer les populations concernées.
Ces questions ont été très présentes lors de la Semaine mondiale de l'eau qui vient de s'achever à Stockholm, notamment par rapport aux huit objectifs du Millénaire pour le développement (OMD). Un appel a été lancé pour que l'eau et l'assainissement soient mieux pris en compte et pour rappeler que de ces deux thématiques dépendait en grande partie l'avenir des sept autres OMD (lutte contre la pauvreté, la faim, l'éducation, l'égalité des sexes, etc.).
On sait déjà que l'objectif concernant l'assainissement ne sera pas atteint. Pire, la situation est en train de se dégrader. Une étude présentée par Aquafed*, à Stockholm, a montré que si l'accès à l'eau et à des services d'assainissement de base progresse en milieu rural, la tendance était à la régression en milieu urbain. L'urbanisation galopante va, en effet, plus vite que les efforts des services publics. Ainsi, en ville, le nombre de personnes qui n'ont pas accès à une source d'eau « améliorée » et à des toilettes a augmenté de 20 % en huit ans.
Et si la situation progresse en matière d'accès à l'eau, rendant réalisable cet engagement du Millénaire, il ne faut pas crier victoire, comme le souligne Gérard Payen, président d'Aquafed : « L'accès à l'eau « améliorée » signifie simplement l'accès à une eau protégée des contaminations animales. Le nombre de personnes qui n'ont pas d'accès permanent à une eau saine, à un coût abordable et à proximité, est bien plus élevé, probablement autour 4 milliards de personnes. »