Le marché des services autour des certificats d'économies d'énergie se fait de plus en plus concurrentiel. En perspective, l'ouverture de la troisième période prévue par la réglementation.
Cet automne s'achève la phase de concertation lancée en mai sur les certificats d'économies d'énergie (CEE). Dans la foulée, les règles du jeu pour la troisième période du dispositif, courant de 2014 à 2016, seront arrêtées. « Si des mesures législatives sont nécessaires, elles seront intégrées à la loi sur la transition énergétique à venir pour que tous les textes soient prêts d'ici au 1 er juillet 2013 », promet Yann Ménager, chef du bureau Économies d'énergie et chaleur renouvelable à la DGEC (direction générale de l'Énergie et du Climat) du ministère de l'Écologie. L'enjeu est de taille. Il s'agit, d'une part, de définir les acteurs concernés et, d'autre part, l'objectif d'économies pour chacun. « Il nous tient aussi à cœur de contribuer à la lutte contre la précarité énergétique », ajoute-t-il.
Copeo, Ceelium, Leyton… Ces perspectives aiguisent l'appétit d'un nombre croissant d'entreprises de services, à l'affût de ce marché émergent. Preuve de l'engouement, la deuxième phase a débuté le 1 er janvier 2011 pour trois ans, avec un objectif de 345 térawattheures d'économies. À mi-route, les deux tiers sont déjà réalisés. Du pionnier Certinergy, fondé en 2008, au plus jeune Valoenergie, créé au début de l'année, le marché des CEE devient de plus en plus concurrentiel. Cette myriade de sociétés se positionne pour accompagner la réalisation des travaux et le montage des dossiers administratifs. Elles béné ficient de la possibilité de créer des structures collectives. Concrètement, la réglementation a listé une série d'obligés, des distributeurs d'énergie ayant à générer des économies chez le consommateur final. Parmi eux, figure notamment une multitude de petits fioulistes domestiques.
Pour créer une structure collective – et décrocher ainsi le statut d'obligé –, il suffit d'obtenir le transfert des obligations d'au moins deux d'entre eux. Le volume d'économies à générer reste minime, mais il ouvre le droit de demander des certificats à l'administration… pour mieux les revendre aux plus gros obligés. Le volume réalisé par Certinergy atteint ainsi plus de 150 fois son obligation légale.
Mi-2012, ce sont 26 structures collectives qui coexistaient en France. Ajoutez-y quelques so ciétés ayant choisi de ne pas acquérir ce statut. « Notre philosophie est plutôt d'être un intermédiaire indépendant », justifie Sylvain Lagarde, directeur associé de Ceelium. Idem pour la société Copeo, qui a démarré en 2009 en remportant un appel d'offres de la Caisse des dépôts et consignations pour un outil facilitant le recours aux CEE. Au final, le dispositif attise les convoitises d'un ensemble toujours plus hétérogène d'acteurs. « Il est surprenant de voir les différences entre les offres. Pour une même économie d'énergie, il peut y avoir un écart d'un à cinq entre les primes versées », constate François Amadei, fondateur de Nr-pro, une plateforme numé rique qui se rémunère comme intermédiaire facilitateur entre les obligés et les maîtres d’ouvrage. « L’offre d’accompagnement est très variée. C’est plutôt une bonne chose, car les besoins le sont aussi, abonde Emmanuel Goy, délégué adjoint énergie de l’association Amorce. Tout l’enjeu est de s’y retrouver et de tirer le meilleur parti du dispositif. »
Lorsqu’ila été lancé, des entre prises spécialisées se sont d’abord emparées du sujet. « Le monde de l’énergie est un secteur où l’innovation est très lente. D’où le besoin de nouveaux acteurs pour passer d’une logique industrielleà une logique orien tée client », décrypte Myriam Maestroni, présidente de la startup Économie d’énergie. Mais, depuis peu, une autre typologie de prestataires fait son appari tion. Comme le cabinet Leyton, expert depuis quinze ans de la réduction des coûts opération nels des entreprises (charges sociales, financement de l’ in novation, taxes foncières...). Ou encore de Valoenergie, qui n’est autre qu’une filiale des banques Caisses d’épargne.
Comment s’y retrouver dans ce foisonnement ? D’abord, par la nature des consommateurs finaux chez lesquels seront réalisés les tra vaux (entreprises, collectivités, particuliers, copropriétés…). Ensuite, par le détail de l’offre. « Notre priorité est de maximiser les financements possibles pour le compte de nos clients », pointe Stee ve B eni st y, directeur du département énergie de Leyton. Il est néanmoins recommandé d’affiner la sélection du presta taire au-delà du seul prix. « Il faut aussi regarder jusqu’où va l’accompagnement », préconise Emmanuel Goy. Dans tous les cas, « trois critères sontà étudier de près », conseille François Amadei, de Nr-pro. L’offre – en termes de prime financière comme d’accompagnement– et la complexité de la procédure, mais également le moment où la prime sera versée :à la fin des travaux ou après validation du dossier par l’administration ?
Attention, « beaucoup de petits acteurs promettent monts et merveilles, sans avoir la surface financière suffisante pour respec ter leurs engagements, prévient Frédéric Uztmann, président de Certinerg y. Ilya une sécurité à travailler avec quelqu’un qui s’est positionné sur les CEE depuis un certain temps. » Parce que la qualité de la prestation n’est pas à négliger, Certinergy vient de lancer un dispositifà destina tion de ses partenaires inter venant sur les chantiers. Il les encourage financièrementà être reconnus « Grenelle de l’environ nement », pour s’assurer qu’ils seront préparésà l’évolution de la réglementation.
Faceà cette concurrence crois sante, chaque prestataire dégaine sa spécificité commerciale. « Nous offrons un service com plet : l’audit énergétique, le mon tage du dossier mais aussi, en tant que filiale des Caisses d’épargne, le financement », illustre Daniel Oriol, directeur général de Valo-energie. Leyton, lui, propose la réalisation de bilans carbone et du conseil en achat d’électricité et de gaz. La société Économie d’énergie développe des solu t ions numériques sécurisées et convivialesà destination du consommateur final. Ceelium travaille pour 2013 ou 2014 sur des services autour des comp teurs évolués. Chez Copeo, « une base réunissant les équipements disponibles en France donne une information neutreà nos installa teurs », pointe Olivier Gene, son directeur général délégué. Copeo délivre aussi de l’information sur mesure sur les prêts éco-PTZ. Il se murmure que les conditions pour devenir une structure col lective pourraient être durcies pour la troisième période. Un moyen d’opérer un écrémage et amener définitivement le dispo sitifà maturité.l