Entre 2007 et 2012, la puissance électrique appelée en période de pointe a augmenté de 14 %. En hiver, en particulier, chaque degré en moins fait bondir la consommation de 2 300 MW. Dans un avis qu'elle a présenté, l'Ademe souligne le rôle croissant que pourraient jouer les ménages grâce à l'effacement diffus.
Cette brique des réseaux intelligents consiste à coordonner de brèves interruptions d'alimentation de radiateurs, de chauffe-eau ou de climatiseurs pour détendre le réseau. Mis bout à bout, ces petits gestes pourraient « se substituer à la mise en route de centrales électriques polluan tes », pointe l'avis. Pour faciliter l'effacement, la ministre de l'Énergie a justement signé, fin 2012, le décret mettant en place le mécanisme dit « de capacité » pour le marché de l'électricité. Il vise formellement à stimuler la réduction de la consommation d'électricité aux heures de pointe. Dans son étude, l'Ademe apporte des éléments qui pourraient inciter les ménages à participer à l'effort collectif.
L'Agence de l'environnement et le CSTB ont réalisé une campagne de mesures en conditions réelles (en hiver) et ont prouvé que la démarche garantissait à l'usager des économies de chauffage non négligeable : 10,9 % lorsqu'il est coupé quinze minutes par heure, 13,2 % lorsqu'on passe à vingt minutes. Une évidence ? Pas tant que ça. À l'issue d'une période d'effacement, remettre le logement à la température souhaitée génère un surplus de consommation qui aurait pu s'avérer rédhibitoire. Malgré des effacements, la production d'eau chaude sanitaire par cumulus requiert toujours la même quantité d'électricité. Mais la question la plus sensible pour l'usager restait l'impact de ces coupures sur son confort. Difficile pour le moment d'y répondre. « Nous avons misé sur une étude en trois temps », détaille David Marchal, chef adjoint du service réseaux et ENR à l'Ademe.
Cet avis porte sur la première phase. Les calculs ont été effectués sur un panel de 2800 clients de l'opérateur d'effacement Voltatis. Premier indice, aucun utilisateur témoin ne s'est plaint… Ce qui pourrait indiquer que les températures restent à peu près constantes dans les logements, ou que les chutes interviennent principalement quand ils sont inoccupés. Avec les deuxième et troisième phases de l'étude, l'Ademe et le CSTB ont l'intention d'approfondir la question. Un travail de modélisation va d'abord évaluer l'impact thermique des coupures dans différents types de logements et sous plusieurs climats. Si l'effet sur la température est limité, une généralisation de l'effacement diffus pourrait être envisagée.
Encore faudra-t-il trouver un modèle économique favorable à tous. Aujourd'hui, c'est l'opérateur d'effacement qui investit dans le dispositif et se rémunère sur le service rendu au gestionnaire de réseau. L'usager, lui, profite des économies qu'il réalise sur sa facture, économies non proportionnelles à la réduction de la consommation du fait de l'abonnement, des taxes… « Défricher les modèles éco nomiques est l'un des objectifs des démonstrateurs de réseaux intelligents », rappelle David Marchal. L'Ademe souligne un dernier casse-tête. Pour éviter les chutes de tension sur le réseau national, il ne faudrait pas « entraîner des déséquilibres locaux du réseau de distribution ». Déployer massivement le dispositif sur un territoire, oui. Mais en prenant en compte la réalité des réseaux locaux. l