Certaines fonctionnalités de ce site reposent sur l’usage de cookies.
Les services de mesure d'audience sont nécessaires au fonctionnement du site en permettant sa bonne administration.
ACCEPTER TOUS LES COOKIES
LES COOKIES NÉCESSAIRES SEULEMENT
CONNEXION
Valider
Mot de passe oublié ?
ENERGIE

ÉNERGIE Comment secouer l'inertie des copropriété tés

LA RÉDACTION, LE 1er OCTOBRE 2013
Archiver cet article
Newsletters
Toute l'information de cette rubrique est dans : Environnement Magazine
C'est l'histoire d'une copropriété pas comme les autres. Au printemps dernier, saison à laquelle se tiennent traditionnellement les assemblées générales (AG) de copropriétaires, tandis que d'autres s'étrillaient joyeusement pour des histoires de digicode ou d'ascenseur, la poignée de copropriétaires d'un petit immeuble du IXe arrondissement parisien relevaient le niveau en lançant un audit en vue d'une réhabilitation énergétique. « Dans les petites copropriétés, c'est encore rare, applaudit Renaud Dhont, responsable énergie à l'Association des responsables de copropriété (ARC). Un mouvement s'amorce, mais lentement. Nous l'accompagnons en proposant des outils aux conseils syndicaux de ces immeubles, constitués d'habitants bénévoles, qui en manquent cruellement. Or, ce sont eux qui peuvent changer la donne. Ils sont les seuls maîtres à bord pour faciliter le passage à l'acte des copropriétaires vers la rénovation énergétique. » Direction donc ce petit immeuble sans prétention, où deux retraités dynamiques nous accueillent. « C'est en réalisant un examen critique de l'immeuble que nous avons repéré des fenêtres obsolètes, des lampes à changer dans la cage d'escalier, des courants d'air s'infiltrant partout… De fil en aiguille, nous est venue l'idée de réaliser un bilan énergétique simplifié, sorte de sondage où chaque voisin remplit dans un tableau ses charges des trois dernières années », raconte Else Knudsen, membre du conseil syndical. Les idées les plus simples sont souvent les meilleures : chacun ayant constaté l'envolée de ses dépenses, l'argument de l'isolation du bâti a soudainement fait sens. « Après des réunions en petit comité, pour que le sujet soit mûr et documenté lorsqu'il arrive en AG, nous sommes parvenus à faire voter un fond travaux, une décision réputée difficile à décrocher en copropriété. » Provisionné à hauteur de 4 800 euros par trimestre (en moyenne 100 euros par mois et par logement), il leur permettra de mieux maîtriser l'entretien et de ne pas être pris au dépourvu face aux changements à venir. Ces changements, c'est l'audit commandé pour cet automne au tandem composé de l'entreprise de maîtrise d'œuvre et du thermicien, en l'occurrence Reanova et Pouget Consultants, qui en dictera les grandes lignes. « Nous verrons dans quel ordre ils préconisent de réaliser les travaux et comment, en les échelonnant sur sept ou huit ans. Ces scénarios de rénovation peuvent être votés en AG, en veillant à ne forcer la main d'aucun voisin », complète Philippe Hardy, président du conseil syndical. Affaire à suivre donc, mais sous l'œil des deux comparses, qui endossent le rôle de ce que les experts dénomment des « leaders de la rénovation énergétique », des travaux devraient être engagés dès 2015. Convaincre sans forcer, rénover sans se ruiner : c'est à cette condition que les choses changeront. L'enjeu est de taille : les quelque 8 millions de copropriétaires français, dont les trois quarts habitent des immeubles construits avant la première réglementation thermique de 1974, sont dans le flou complet. Pour en mesurer l'ampleur, il suffit d'assister à une AG (ce que, facteur de compli ca tion supplément aire, b e au-coup ne font pas) : ce qui relève d'une obligation réglementaire, par exemple un diagnostic du plomb dans les parties communes ou la mise aux normes des ascenseurs, est souvent repoussé le plus tard possible. Alors ce qui ne l'est pas… L'inertie est si forte « qu'il n'y a qu'en cas d'usure ou d'urgence que des travaux sont programmés », confirme Raphaël Slama, président de l'association pour la qualité du logement Qualitel. Aux difficultés de prise de décision liées au système des voix en copropriété (majorité absolue requise pour des travaux de rénovation), aux divergences d'intérêts des copropriétaires, aux clivages générationnels et sociaux (propriétaire à la retraite face au primo-accédant surendetté) et à ce mode de fonctionnement en vase clos s'ajoute une carence d'information. Les syndics, second acteur clé et organe d'administration de l'immeuble (désigné par les copropriétaires), alertent sur le fait qu'en devenant un produit de consommation courante, le logement en copropriété est souvent acheté en vue de faire, à terme, une plus-value, mais en méconnaissance des règles qui fondent la vie en copropriété. La question se pose dès l'achat : banques, notaires et agents immobiliers insistent peu sur le fait que l'acquéreur achète aussi des parties communes à gérer avec ses voisins. Si certains syndics s'évertuent à sensibiliser les nouveaux venus, là n'est pas leur cœur de métier. « Ils ont une culture comptable, juridique et non de gestionnaire, précise Philippe Hardy. Ils font appliquer les normes et réglementations. Lorsqu'on a un projet, c'est à nous de les pousser et d'exiger d'eux, sans les harceler, un appui pour le mener. » Pour cela, il faut restaurer la confiance parfois érodée entre ces deux parties. Le conseil syndical doit être à l'écoute et le moins arc-bouté possible sur ses positions. Et le syndic de copropriété, force de proposition, risque de voir les copropriétaires le débarquer en cas de position trop directive. A la Fnaim Ile-de-France, on a enfin pris la mesure du problème en lançant en septembre une plateforme d'information destinée aux syndics adhérents. « Elle les outille et apporte une méthodologie qui était jusque-là artisanale pour accompagner des copropriétés dans un projet de rénovation thermique », vante Myriam Maestroni, présidente d'Économie d'énergie SAS et conceptrice de l'outil. Dans l'immédiat, l'essentiel est de lever le blocage qui pèse sur les gros travaux. Car il est lourd de conséquences et ne conduit, selon l'ARC, qu'à « fragiliser un peu plus des copropriétés déjà en difficulté et risque d'entraîner des pans entiers de quartiers dans une spirale de dégradation ». Un constat que partage localement l'agence de maîtrise de l'énergie brestoise Ener'gence. Audrey Cousquer y suit une douzaine d'immeubles des années 1950 à 1970, notamment dans le cadre d'opérations programmées d'amélioration de l'habitat (Opah). Elle explique qu'il est d'autant plus difficile de convaincre les habitants de la nécessité de rénover que ce bâti est « en bon état structurel, sans pathologie mais déperditif en énergie ». Son cachet architectural rend difficile son intégration en Opah. « Si on n'y prend pas garde, vu l'augmentation du coût des énergies, il se trouvera vite en précarité énergétique. Cela deviendra difficilement supportable de chauffer de grands appartements nécessitant parfois plus de 300 kWep/m²/an pour atteindre un certain niveau de confort. À cela s'ajoute un risque de dévaluation immobilière dans des quartiers en renouvellement urbain, où des immeubles aux normes RT 2012 seront bientôt voisins. » Alors, que faire ? Les professionnels ont bien des pistes. François Vallet, un thermicien qui a travaillé avec une vingtaine de copropriétés en région lyonnaise, soutient, « qu'au-delà de la technique, priment la pédagogie et les aspects humains. Parfois, les échanges avec le conseil syndical et le syndic sont fructueux. Ils connaissent leur immeuble et transmettent les informations nécessaires au bilan thermique imposé depuis peu. Dans d'autres cas, il faut recréer de toutes pièces un conseil syndical quasi inexistant ». Ce qui n'est pas dans les cordes d'un thermicien. Mais pour lui, pas de doute, le seul moyen d'avancer implique de « se fondre dans le rythme si particulier des copropriétés, avec ses AG annuelles et ce long travail en amont. En moyenne, il se passe cinq ans entre les premiers contacts avec les habitants, les audits, leur présentation, à soigner, et la réception des travaux ». Des travaux qui restent classiques : isolation des toitures, planchers et façades, ventilation, remplacement de la chaufferie et des fenêtres… « Seule leur combinaison diffère selon l'immeuble, ajoute-t-il. Réhabiliter une copropriété raccordée à un réseau de chaleur conduit à renégocier le contrat de fourniture. Il faut voir avant si c'est possible. Quand les contrats de maintenance n'ont pas évolué depuis un demi-siècle, un toilettage aussi s'impose. » Autre conseil : ne pas se focaliser sur le thermique. Mieux vaut imaginer un bouquet de travaux. Et soigner leur déroulement. Pour Florent Loussouarn, chef de projet chez Pouget Consultants, bureau d'études thermiques positionné « par militantisme » sur le créneau des copropriétés, il est crucial de « rassurer les propriétaires, en leur répétant que rien ne sera abîmé, qu'en quelques jours un isolant peut être posé sans grignoter de précieux mètres carrés ou déranger leur éventuel locataire et, qu'au final, leur patrimoine gagnera en durabilité ». Rodées après des décennies d'intervention en logement social, les entreprises savent faire. À condition d'être bien encadrées. C'est là qu'interviennent les architectes de copropriété. Peu connue, cette profession a tout à gagner à mieux se positionner car elle bénéficie d'une forte notoriété auprès des copropriétaires. « Nous apportons une vision globale du bâtiment et pouvons accompagner un projet, confie anonymement l'un d'eux. Ce qui n'empêche pas d'être chahuté en AG. » Monter sur la scène de ce petit théâtre entre voisins, où fusent des remarques parfois triviales, n'est pas donné à tout le monde. « Un bon thermicien peut être nul en AG. L'exercice nécessite d'être patient, communicatif et de savoir braver les mauvaises volontés », prévient Delphine Agier, directrice adjointe de l'association Pact Arim du Rhône. Pionnier, ce territoire rhônalpin a prouvé qu'un autre levier, la puissance publique, peut contribuer efficacement à cet effort de rénovation. Les collectivités y ont pris le relais et soutenu de grandes copropriétés particulièrement exposées. À Grenoble et Voiron, ce fut dans le cadre d'une opération programmée d'amélioration thermique et énergétique des bâtiments (OPATB). Vénissieux explore une variante, le programme d'intérêt général énergétique (PIG). Outre la complexité de ces montages se pose un autre casse-tête, celui des conditions d'attribution de deniers publics à des propriétaires privés. « L'important, tranche Delphine Agier, c'est d'impulser une dynamique qui conduit les professionnels à affiner leurs offres en ciblant les copropriétés. » Notamment les petites, qui sont les plus nombreuses et demandeuses. Le dernier frein à lever est économique. À plus de 8 000 euros de travaux par logement, un blocage se crée. Or, en rénovation énergétique, la barre des 30 000 euros est vite atteinte. « Un temps de retour sur investissement de vingt à trente ans ne parle pas aux copropriétaires, insiste Florent Loussouarn. Mieux vaut voir, à l'horizon de cinq ou dix ans, ce qu'il y a à faire en termes d'entretien de l'immeuble et embarquer dans le scénario retenu la rénovation énergétique. En rénovation BBC, la pilule passe mieux en présentant un coût de 100 euros par mois pour des travaux étalés sur dix ans, en intégrant les aides et les prêts. » Le must ? Faire de la rénovation énergétique sans trop le dire, en mettant surtout en avant l'embellissement de l'immeuble, son confort acoustique, sa fraîcheur l'été, sa chaleur douillette l'hiver et le gain en étiquette énergie qui le revalorisera à la revente. « Bref, vendre du rêve et non des contraintes. » D'où la nécessité, dès les premiers audits, qui tendent à devenir gratuits grâce à l'appui d'acteurs de l'habitat et de l'énergie, de convier non seulement un architecte voire un thermicien, mais aussi un spécialiste de l'ingénierie financière pour rassurer et dénicher des aides. Pour la rénovation d'une copropriété du XIIe  arrondissement parisien souvent citée en exemple, la Fontaine d'Aligre, une passoire thermique de dix étages où, après quatre ans d'effort, le conseil syndical a réussi, en s'entourant bien, à réaliser des travaux qui ont divisé par deux la facture énergétique des habitants, ces aides ont apporté plus d'un tiers du budget global. l


PARTAGER :
À LIRE ÉGALEMENT
EMR : 10 co-exposants de Nouvelle-Aquitaine au salon Seanergy
EMR : 10 co-exposants de Nouvelle-Aquitaine au salon Seanergy
MAN et Enedis donnent accès à la recharge électrique
MAN et Enedis donnent accès à la recharge électrique
En Belgique, Veolia transforme les eaux usées d’une brasserie en biogaz
En Belgique, Veolia transforme les eaux usées d’une brasserie en biogaz
Carcassonne Agglo et SUEZ inaugurent une unité de méthanisation
Carcassonne Agglo et SUEZ inaugurent une unité de méthanisation
TOUS LES ARTICLES ENERGIE
Les plus lus
L'essentiel de l'actualité de l'environnement
Ne manquez rien de l'actualité de l'environnement !
Inscrivez-vous ou abonnez-vous pour recevoir les newsletters de votre choix dans votre boîte mail
CHOISIR MES NEWSLETTERS