Cette source ne se situe encore qu'à un stade ultra-embryonnaire. Mais la production de biométhane à partir de micro-algues pourrait constituer d'ici à 2050 le véritable « chaînon manquant » de la filière du biométhane. Au point d'envisager, à cette échéance, que 80 à 90 % du gaz naturel distribué en France proviennent de sources renouvelables.
C'est en tout cas ce qu'indique une étude réalisée par le Crigen de GDF Suez pour le compte de GRDF. Les micro-algues représenteraient ainsi, pour la France, un potentiel annuel de production de bio-méthane de 1,1 à 9,3 TWh en 2020 et de 19,3 TWh à l'horizon 2050. Un potentiel complémentaire de 3,5 TWh serait même envisageable. Surtout s'il apparaît que cette activité, qui s'inscrit très largement dans une logique de coproduction à haute valeur ajoutée, peut être étendue à des secteurs industriels autres que ceux auxquels ses promoteurs la réservent habituellement. C'est-à-dire la production de matières premières pour les industries de la nutrition humaine ou animale, les cosmétiques…
La culture à des fins énergétiques est rendue possible par des rendements, et notamment par des rendements surfaciques, en moyenne 10 à 20 fois supérieurs que d'autres cultures terrestres, réduisant d'autant la compétition avec les terres arables à destination alimentaire. Pour autant, de nombreux facteurs techniques et économiques minimisent encore la portée de cette technologie. Pour qu'elle s'épanouisse, il est néces-saire que les sites de culture disposent de place et soient proches des apports d'eau et de CO 2 . Mais également que les technologies encore expé-rimentales se rodent et, surtout, que le modèle d'affaires de multivalorisation soit suffisamment probant pour que les acteurs s'engagent.
Naturellement, comme pour d'ailleurs l'ensemble de la filière du biométhane, ce développement ne sera soutenable qu'à condition que soit maintenue la politique de soutien public actuelle. Elle passe notamment par des tarifs d'achat du gaz produit, et réinjecté dans le réseau, très favorables. Rappelons qu'aujourd'hui, le gaz naturel « vert » correspond à un tarif d'achat de 81 euros le mégawattheure (pour les installations industrielles de plus de 2 MW), à comparer aux 25 euros pour le gaz produit à partir de sources fossiles. « Pour autant, ce différentiel, certes important, devrait s'atténuer dans les années à venir. Et il ne tient pas compte de toutes les externalités, notamment du coût pour la collectivité d'une moindre valorisation des déchets et du différentiel des impacts liés au carbone », plaide-t-on chez GRDF.
L'opérateur gazier maintient, par ailleurs, les objectifs d'injection de biométhane dans le réseau qui devraient, toutes filières confondues, s'élever à 20 TWh en 2020. À comparer à une production de gaz na turel qui s'établit aujourd'hui au total à 500 TWh. Ces prévisions intègrent les perspectives de la filière traditionnelle (déchets), des sources de seconde génération (biomasse lignocellulo-sique) ainsi que la – très hypothétique à cette date – filière dite de troisième génération (micro-algues). À ce jour, seule la filière de production par méthanisation de déchets organiques est opérationnelle sur le plan industriel. La deuxième génération (biomasse forestière, produits connexes de scierie, coproduits agricoles et d'industrie agroalimentaires) ne devrait rentrer dans une phase industrielle qu'à l'horizon 2020, note une seconde étude du Crigen. Selon les scénarios envisagés, elle pourrait représenter à elle seule un potentiel compris entre 100 et 250 TWh par an.