Sans être à cheval sur les principes, il faut reconnaître qu'en matière d'environnement, ils sont quasiment entrés dans le langage courant. Ainsi du principe pollueur-payeur. Il fonde aujourd'hui le calcul de nombreuses taxes et redevances, sur l'eau et les déchets en particulier. Certes, on peut discuter de ses cibles, mais il a le mérite d'être compris et accepté. Dans la même logique, le principe utilisateur-payeur est tout aussi incontestable. Vous utilisez un service, il est normal de contribuer à son bon fonctionnement.
C'est dire que le report sine die de l'écotaxe, rebaptisé péage poids lourds, est incompréhensible. D'une part, parce qu'elle actait un coût d'usage des infrastructures routières et accessoirement compensait les impacts environnementaux et sanitaires du transport de marchandises par camions. Elle incitait aussi à des pratiques plus vertueuses en encourageant le recours à des véhicules moins polluants et en finançant des projets de transports collectifs. D'autre part, parce qu'elle a été votée à une écrasante majorité par nos députés et sénateurs, il n'y a pas si longtemps, puisque c'était… en 2009. Enfin, parce que la remise en cause du contrat signé par l'État avec l'entreprise Ecomouv atteindrait un coût total d'environ 3 milliards selon les calculs de France Nature Environnement. S'y ajoute une perte d'emplois dans une région déjà sinistrée, la Lorraine, et de crédibilité pour le gouvernement.
Dernier principe attaqué : le principe de précaution. Longuement discuté lors de l'adoption de la Charte de l'environnement en 2005, il avait été qualifié de « principe d'action et d'expertise » par Nicolas Sarkozy, celui-là même qui en conteste aujourd'hui la pertinence. Une énième offensive après une proposition de loi qui veut lui enlever sa portée constitutionnelle et une autre qui veut lui adjoindre « un principe de l'innovation ». Une charge bien curieuse alors que le principe de précaution n'a pas suscité la vague de contentieux annoncée à son inscription dans la Constitution.
Toutes ces contestations montrent une fois de plus combien en période de crise la protection de l'environnement et de la santé reste fragile. Et que malgré les discours qui déclament que la croissance verte est au cœur des priorités, c'est bien une croissance sans couleur qui est privilégiée à n'importe quel prix.