Les chiffres justifient à eux seuls un changement des pratiques : la France produit chaque année environ 260 millions de tonnes de déchets du BTP, dont quelque 20 millions de tonnes de déchets de béton. Sur ce dernier flux, 80 % finissent en techniques routières et 10 % sous forme de granulats recyclés. Or, les déchets de béton sont recy-clables en boucle grâce à des techniques de séparation et de préparation performantes mais aussi en faisant évoluer la législation française. C'est ce que veut prouver le projet Recybéton (mené entre 2012 et 2016), qui rassemble 47 partenaires pour un budget de 5 millions d'euros, soutenu par l'Ademe, le ministère de l'Écologie et l'ANR avec le projet Ecoreb (Éco-construction par le recyclage du béton).
Depuis trois ans, Recybéton a tiré plusieurs enseignements à partir d'études de caractéri-sation des granulats et des bétons recyclés et de trois chantiers expérimentaux. Le premier a été lancé en 2013 à Chaponost (Rhône) pour réaliser un par-king de véhicules d'entreprises. En n'utilisant que des granulats recyclés, ce premier chantier a montré que l'emploi du béton
recyclé à l'échelle industrielle était fiable. Résultats concluants également pour la construction d'une passerelle dans le cadre du contournement ferroviaire Nîmes-Montpellier, incluant 20 % de granulats recyclés. Le dernier chantier a démarré en février en Seine-et-Marne, avec l'emploi de bétons composés de 30 % de sable recyclé et de 50 % de gravillon recyclé dans la construction d'un bâtiment d'archivage. Les différentes études sur les formulations ont montré qu'il fallait surtout être attentif au comportement du béton (rétraction, élasticité) et à la présence ou non de plâtre, très préjudiciable à la solidité du matériau final.
En parallèle, Recybéton continue d'étudier les techniques de séparation mécaniques et optiques des matériaux. Un gros enjeu pour la filière qui nécessitera des investissements et le déploiement de plateformes de tri au plus près des sites de production, tels les cimenteries ou les producteurs de granulats. Au terme de ces travaux, la filière espère la diffusion, à partir de 2017, de guides pratiques et de recommandations pour recycler davantage. Des propositions seront également émises pour faire évoluer la réglementation française. Si la matière recyclée ne peut totalement couvrir les besoins en matériaux, elle peut contribuer à minimiser l'emploi de granulats naturels. Un enjeu important, quand le seul projet du Grand Paris devrait en faire croître la consommation de 5 millions de tonnes par an en Île-de-France. l