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TERRITOIRES

[Tribune] L’arbre, ou la forêt de la revitalisation urbaine

PUBLIÉ LE 16 DÉCEMBRE 2019
PASCAL MONIER, ADJOINT AU MAIRE D'ANGOULÊME POUR LES QUESTIONS D'URBANISME
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[Tribune] L’arbre, ou la forêt de la revitalisation urbaine
Cette semaine, Pascal Monier, adjoint au maire d’Angoulême pour les questions d’urbanisme, revient sur la tendance au déploiement de plan arbre dans les communes française. Il estime que l’arbre ne représente qu’une partie de l’enjeu de renaturation de la ville.

Prévenir et s’adapter, tels sont les deux mantras de l’action territoriale en matière de dérèglement climatique. Si la prévention est évidemment l’affaire de tous, les acteurs de proximité (citoyens, communes) restent encore en attente d’impulsions fortes de nature législatives, réglementaires, financières ou même d’usage au niveau supra-local. L’adaptation est, elle, largement question de terrain. C’est une demande pressante de nos concitoyens, qui plébiscitent partout la végétalisation des villes. Ce thème sera au cœur de la prochaine élection municipale.

A cet égard, chacun y va de son plan arbre, que l’on pare de toutes les vertus : climatiseur naturel, ombrière à la bonne saison, capteur de CO2 ou encore mobilier urbain au pouvoir apaisant. Et qui de vanter les mérites des canopées urbaines, d’annoncer la cartographie et la protection de ses arbres remarquables, de promouvoir un comité local de l’arbre, de créer ses micro-forêts dans les dents creuses urbaines. Autant d’arbres plantés que de naissances, de décès ou de nouveaux habitants, c’est selon, l’imagination est fertile ! Bref, la ville doit devenir une forêt, cela suffira à notre bonheur.

Une politique de renaturation de la ville

Attention toutefois à ce que la frénésie sylvicole ne tourne au fiasco du green washing. La réintroduction massive de l’arbre dans nos villes demande technicité et acceptabilité, donc expertise et concertation. Il n’est qu’à voir les difficultés de réintroduction des arbres dans les cours d’école pour le comprendre, entre sécurisation, entretien et techniques d’enracinement.

Plus généralement, la politique de l’arbre doit s’articuler à une politique de renaturation de la ville, qui appelle par exemple à penser ou repenser l’agriculture urbaine, la gestion naturelle des espaces privées (80 % de l’espace urbain), la végétalisation des bâtiments dans leur horizontalité comme dans leur verticalité, la protection des espaces non encore urbanisés, la restitution à la nature des espaces aujourd’hui imperméabilisés.

Dimension systémique de la nature

Sur ce dernier point, prenons avec Jean-Marc Bouillon, président d’honneur de la fédération française du paysage, qui intervenait récemment aux 4ème rencontre du paysage urbain de La Rochelle, l’exemple des espaces de stationnement. Un meilleur remplissage des véhicules, et la réduction de leur nombre avec la voiture autonome non statique, tous deux rendus possibles par les techniques d’intelligence artificielle, devraient demain libérer de très nombreuses places de stationnement. Qu’en faire ? Il faut d’évidence les rendre à la nature, végétaliser donc. Mais on peut aussi en profiter pour s’éviter le très couteux redimensionnement de nos réseaux d’assainissement sous-adaptés aux pluies potentiellement diluviennes, en créant des noues paysagères.

Ceci renvoie à une dimension systémique de la nature vue aujourd’hui comme infrastructure, nous dit encore Jean-Marc Bouillon. La nature devient donc écosystémique, après avoir remplie des fonctions ornementales, paysagères, ou écologiques. Elle est donc aussi un système technique. Elle doit ainsi être pensée pour aider à lutter contre la pollution, ou le bruit, ou les écoulements d’eau excessifs, ou les ilots de chaleur, ou que sais-je encore. Et cela tombe bien, souvent, elle le peut ! L’expérimentation menée par le Cerema avec la ville et agglomération de Metz pose les premières pierres de ce type d’approche.

Les entreprises doivent monter en gamme

On est donc assez loin de l’idée de planter quelques rangées d’arbres en bordure d’un boulevard urbain pour rafraîchir le passant et donner faussement à croire que l’on lutte efficacement contre le réchauffement climatique. Ceci demande une bonne compréhension des enjeux de la part des élus, et un accompagnement des services techniques, ce dont on dispose assez peu. A cet égard, si les agences d’urbanisme des métropoles peuvent être un soutien précieux, les villes petites et même moyennes apparaissent assez démunies en compréhension et en savoir-faire. En parallèle, ceci demande aussi sans doute une montée en gamme et en compétence des entreprises de conception du paysage. Penser la nature comme système n’est pas proposer un aménagement paysager de rond-point.

Au final, l’adaptation de la ville au réchauffement climatique ne doit pas se baser sur la seule politique de l’arbre, qui ne saurait cacher la forêt de la nécessaire revitalisation urbaine basée sur la nature.
Pascal Monier, adjoint au maire d'Angoulême pour les questions d'urbanisme
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