Votre livre1 paru fin 2013 propose une lecture écologique du droit de la propriété intellectuelle. De quoi s'agit-il ?
L'idée est d'analyser le droit de la propriété industrielle avec un prisme, celui de l'environnement. L'objectif est de voir si les règles actuelles sont efficaces pour accompagner la transition vers une économie durable, et d'identifier les réformes possibles. J'ai choisi de pratiquer cette analyse écologique du droit sur un indicateur d'envergure mondiale, celui des émissions de gaz à effet de serre (GES). Outre les règles du droit, j'ai analysé les rapports d'ONG, d'instituts scientifiques, d'économistes, de statisticiens...
Quelles pistes avez-vous identifiées ?
Pour accélérer la diffusion de technologies vertes, il existe dans certains pays des procédures accélérées, qui permettent de boucler le cycle dépôt-analyse-délivrance du brevet en huit mois pour une start-up en Grande-Bretagne, contre trois à cinq ans pour la procédure classique. Une telle procédure accélérée n'existe pas en France. Des mesures pourraient aussi être prises pour développer les licences. Par exemple, on pourrait explorer la possibilité d'augmenter la durée de protection en cas de licence, ou réfléchir à des incitations fiscales.
Comment se retrouver dans l'énorme quantité de brevets ?
Rien qu'en 2009, l'Institut national de la propriété intellectuelle (Inpi) – donc pour la France uniquement – a enregistré 5 000 demandes de brevets de technologies vertes, soit 37 % des dépôts. Face à cet enjeu, des bases de données commencent à se constituer. Par exemple, Wipo Green, une plateforme internet créée par l'Office mondial de la propriété intellectuelle (Ompi) : l'accès au résumé des technologies y est libre, et le titulaire doit s'inscrire pour décrire sa technologie et les conditions de son transfert. C'est une opportunité économique importante pour les entreprises françaises. Par ailleurs, l'Office européen des brevets, dont le référentiel compte 130 000 subdivisions, a créé le code Y02 intitulé « Technologies permettant de limiter les changements climatiques ». Cette nouvelle classe compte 1,5 million de brevets publiés en Europe et dans le monde entier.
Cette analyse écologique pourrait-elle être déclinée sur d'autres champs du droit ?
Bien sûr. Il faudrait maintenant mener le même travail dans d'autres matières, comme le droit de l'urbanisme, le droit fiscal, et même le droit de l'environnement. Je réfléchis à créer une association de juristes pour y travailler.