Réduire le coût énergétique du captage du CO2 : c’est le pari relevé par l’équipe Mélusine, qui réunit EDF R&D et le Laboratoire Réactions et Génie des Procédés (CNRS/Université de Lorraine). Leurs travaux, publiés dans la revue Industrial & Engineering Chemistry Research, montrent qu’il est possible d’améliorer l’efficacité d’une technologie clé pour lutter contre le changement climatique : le captage direct du CO2 atmosphérique par absorption dans un solvant.
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Aujourd’hui, la technique la plus avancée repose sur un solvant chimique, la monoéthanolamine (MEA). Le CO2 y est d’abord absorbé dans une colonne (l’absorbeur), puis libéré dans une autre en chauffant le solvant (le strippeur). En pratique, la régénération du solvant est énergivore et coûteuse, freinant toute adoption à grande échelle.
C’est là qu’intervient la thèse CIFRE de Paul de Joannis, sous la direction de Christophe Castel (LRGP) et Olivier Authier (EDF R&D). Objectif : adapter le procédé d’absorption à l’air ambiant et, surtout, réduire drastiquement sa consommation énergétique.
25 % d’économie énergétique
Les chercheurs ont exploré deux variantes inspirées du principe de la pompe à chaleur. La première, appelée compression de vapeur pauvre (Lean Vapor Compression, LVC), consiste à récupérer la chaleur contenue dans la vapeur résiduelle pour la réinjecter dans le cycle. La seconde, la compression en tête de colonne (Stripper Overhead Compression, SOC), exploite la chaleur disponible au sommet de l’unité de régénération. Dans les deux cas, le procédé repose sur des cycles de compression et de détente qui permettent de valoriser une énergie jusque-là perdue.
Ces scénarios ont été testés par simulation, intégrant un modèle physico-chimique de référence spécialement conçu pour le solvant à base de MEA et déjà éprouvé sur des unités pilotes. Verdict : ces ajustements permettent de réduire de plus de 25 % l’énergie nécessaire à la régénération du solvant par rapport au procédé classique, un gain énergétique significatif, qui marque une avancée importante pour le captage direct du CO2.
Mais tout n’est pas encore gagné. Le coût du captage reste très élevé : entre 1 100 et 1 300 euros par tonne de CO2 captée, car les équipements nécessaires représentent près des deux tiers du coût total. En outre, le procédé entraîne l’évaporation de grandes quantités d’eau et de MEA « environ 5 tonnes d’eau et 1,5 kg de solvant par tonne de CO2 ».
Malgré ces défis, la piste est jugée prometteuse. En développant des colonnes plus économiques et en validant ces résultats par des expérimentations à grande échelle, cette approche pourrait rapprocher le DAC d’une solution industrielle viable.