La directive-cadre eau (DCE) a révolutionné les orientations de la recherche sur les bio-indicateurs, organismes utilisés pour révéler une pollution. « Désormais, il ne s'agit plus d'évaluer la pollution, mais l'état écologique des milieux par rapport à une référence naturelle », note Jean-Gabriel Wasson, chercheur au Cemagref. Avec, comme première mission confiée à cet institut de recherche, référence pour la conception
de méthodes de bio-indication : définir le « bon état », puis classer les masses d'eau.
étude de variations
La classification s'est faite en 2004 avec les moyens disponibles : des indicateurs chimiques bien connus (DBO5, DCO...), mais aussi certains indicateurs biologiques. Pour cela, les biologistes évaluent les variations subies par une population de référence : diminution de la population, accumulation de polluants dans certains tissus, altération des fonctions naturelles. Les bio-indicateurs utilisés dans le cadre de l'application de la DCE sont ceux liés aux diatomées (algues unicellulaires), aux invertébrés et aux plantes. Une analyse des masses d'eau fondée sur « l'indice poissons » est encore en cours. Cet indice se fonde sur les traits biologiques des espèces caractéristiques du milieu étudié. « Si l'on trouve de plus en plus d'espèces omnivores, nous savons que nous sommes face à une perturbation », explique Didier Pont, chercheur spécialiste du sujet.
Quant à l'écotoxicologie, elle fait l'objet de beaucoup d'espoirs, mais n'est pas encore appliquée directement à la classification des masses d'eau. Elle se concentre sur le devenir et l'effet des micropolluants sur les milieux. Elle s'intéresse aux organismes, mais aussi au comportement des polluants dans le milieu aquatique, en étudiant si un polluant est capable de franchir les barrières biologiques des organismes. Centrée sur l'analyse des milieux réels, cette science « est confrontée à des milieux multicontaminés à faibles doses, qui rendent l'analyse très difficile », remarque la chercheuse Catherine Gourlay.
De la recherche à l'action
Ayant défini l'état des milieux, la recherche doit indiquer les voies d'action aux pouvoirs publics. « Pour cela, nous devons affiner nos outils pour qu'ils prennent mieux en compte les diverses perturbations du milieu : pollution toxique, eutrophisation mais aussi dérèglements physiques, affirme Didier Pont. Cela permettra de hiérarchiser les causes de troubles et d'éclairer les décideurs publics sur les réponses à donner. »
Enfin, les chercheurs européens dialoguent pour définir des instruments communs. De fait, sur un continent où l'état des masses d'eau est très inégal et les populations aquatiques variées, les critères de bon état des milieux et le choix des bio-indicateurs sont difficiles à harmoniser.