Les initiatives se multiplient pour compléter les dispositifs d'aide au paiement de la facture d'eau par les plus démunis. Le système actuel repose sur le Fonds solidarité logement (FSL), dont le volet « eau » est financé par les distributeurs d'eau, les collectivités, l'État et les agences de l'eau. Les entreprises de l'eau sont actives sur ce sujet et s'engagent sur les montants dans des conventions avec les départements. Selon la Fédération professionnelle des entreprises de l'eau (FP2E), le nombre de conventions signées par ses adhérents avec les départements est de 73, alors que 18 autres sont en négociation. Dans chaque convention, les entreprises affectent au fonds 0,2049 euros par abonné et par an, ce qui fait un total de 2,8 millions d'euros pour 2008. Mais ce montant n'est pas directement versé au FSL : lorsqu'un dossier est accepté par les services départementaux, les entreprises procèdent à l'abandon des créances. En 2008, l'ensemble des dossiers traités représente un montant inférieur : 2,2 millions d'euros.
AIDE AU NIVEAU LOCAL...
Comme le souligne le sénateur du Val-d'Oise Christian Cambon, dans le cadre du dispositif FSL, seules les personnes abonnées directement à un service de distribution d'eau peuvent présenter leurs demandes de prise en charge de la facture d'eau. Cela signifie que les autres ménages, par exemple résidant en logement collectif, ne sont pas éligibles à cette aide. Le sénateur a donc déposé le 16 juin une proposition de loi pour « replacer les communes au centre du dispositif de solidarité locale » ; elle s'inspire du dispositif « solidarité-eau » consacré par la loi Oudin-Santini. Si cette proposition était adoptée, elle permettrait aux services publics d'eau et d'assainissement de « participer, dans la limite de 1 % des recettes réelles de fonctionnement qui sont affectées aux budgets de ces services et sur le territoire qu'elles desservent, au financement des aides accordées ». Les sommes mobilisées pourraient être attribuées directement par les communes, ou via leurs centres communaux ou intercommunaux d'action sociale (CCAS ou CIAS), aux personnes en difficulté afin de payer en partie ou en totalité leurs factures d'eau et d'assainissement (lire aussi Hydroplus n° 185, p. 70).
... OU NATIONAL
De son côté, l'Observatoire des usagers de l'assainissement d'Île-de-France (Obusass-IDF) rappelait lors d'une conférence de presse, le 12 juin, qu'en Île-de-France, un ménage pauvre peut consacrer près de 10 % de son revenu à l'eau. Il regrette que dans le cadre du FSL, « les aides dépendent des décisions des politiques locales et départementales ».
Après avoir mené des rencontres avec les acteurs concernés par ce dossier, l'Obusass-IDF propose une aide sociale dont les règles seraient fixées au niveau national, et qui serait distribuée par les caisses d'allocation familiales (CAF) sur conditions de revenus.
L'aide serait financée par un fonds régional créé ad hoc, alimenté par les distributeurs, les syndicats d'eau et d'assainissement, les collectivités territoriales et l'État dans le cadre de la solidarité nationale. Le coût de cette mesure représenterait environ 27 millions d'euros pour la région Île-de-France, d'après l'Obusass-IDF. Karina Kellner, secrétaire générale de l'association, ajoute : « Si cela représente une dépense supplémentaire importante, rappelons que la facturation totale du service de l'eau s'est élevée à 11,8 milliards d'euros en 2007, soit plus de 2 milliards pour l'Île-de-France ».
L'allocation eau proposée par l'association représente 1,35 % de cette somme. L'allocation serait fixée en fonction des données sociales dont disposent les CAF et du prix de l'eau facturé. Son attribution se ferait selon le même principe que d'autres allocations comme l'allocation personnalisée au logement. L'aide compenserait les dépenses des ménages liées à l'eau, sur la base de 40 m3 par personne et par an, afin que ces dépenses ne dépassent pas 3 % de leur revenu. Ce niveau correspond aux recommandations et études faites par l'OCDE et le Programme des Nations unies pour le développement. « Le système d'aide sociale lancé en 2004 dans le cadre du FSL est surtout curatif : il soutient les personnes qui ont du mal à payer leur facture d'eau. Nous sommes tout à fait favorables aux propositions de M. Cambon et de l'Obusass, qui complètent le dispositif avec des aides préventives fondées sur des critères sociaux», note Bernard Jigleau, président de la commission clientèle de la FP2E.