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Rien n'arrête les microstations

LA RÉDACTION, LE 1er AOÛT 2009
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Les fabricants de microstations sont dans les starting-blocks, prêts à se lancer dans la course au marché français de l'assainissement non collectif (ANC), dès que la réglementation française aura enfin intégré ce type de systèmes. Certains ont déjà provoqué des faux départs, poussant Spanc et particuliers à s'équiper de ces nouveaux produits en annonçant, sans pouvoir la garantir, leur autorisation prochaine. La tentation est forte, en effet, pour les fabricants disposant d'un marquage CE, de se placer rapidement sur un marché qui, dès qu'il leur sera officiellement ouvert, concernera 3 à 4 millions d'installations et plus de 50 % du marché européen de l'ANC. Il est essentiel de rappeler que, jusqu'à la publication de l'arrêté technique sur l'ANC, les microstations et autres techniques alternatives comme les filtres à roseaux ou les toilettes sèches n'y sont pas autorisées en tant que traitement épuratoire, conformément à l'arrêté de 1996 qui reste en vigueur. Rappelons aussi que le marquage CE signifie que le système répond à la norme européenne pour ce type d'installation, sans qu'il soit pour autant autorisé sur le marché français ; mais ce marquage sera indispensable, à terme, pour y être accepté. La norme fixe d'ailleurs des critères que de nombreux spécialistes - y compris des fabricants de microstations - jugent insuffisants pour garantir leur efficacité dans des conditions réelles d'usage. LES LEÇONS DE L'ÉTUDE VEOLIA EAU Il existe plusieurs types de microstations pour l'ANC. Une sélection d'entre elles a été récemment testée sur une plate-forme installée au CSTB, à Nantes, à l'initiative de Veolia Eau, avec la participation d'un certain nombre d'acteurs (fabricants, agences de l'eau, Cemagref). Différentes techniques compactes d'épuration ainsi que des approches plus anciennes (fosse, filtre à sable) ont été observées pendant plusieurs années. Pour Veolia Eau, l'objectif est d'identifier les systèmes fiables, robustes, avec des performances pérennes et un coût de fonctionnement le plus bas possible, ce qui permettra à l'opérateur privé de s'engager à terme dans une activité d'exploitation des dispositifs d'ANC. Parmi les équipements testés, se trouvent tout d'abord les systèmes à cultures libres. Les micro-organismes qui épurent les matières organiques sont brassés avec les eaux usées et s'y multiplient. « Cela génère des boues importantes qui doivent être évacuées fréquemment, indique Alain Liénard, ingénieur en traitement des eaux usées au Cemagref. Ces installations peuvent bien fonctionner, mais, en cas de pointe de débit - lors d'une fête par exemple - il peut être difficile de retenir les boues parce que le courant ascensionnel est trop rapide. Le stockage des boues est souvent trop petit car, comme en collectif, il faut retenir un taux de 800 g de matière sèche par kilogramme de DBO5 éliminée. Et les vidanges fréquentes peuvent se révéler coûteuses. » Certaines microstations (SBR, pour Sequencing Batch Reactor) fonctionnent de façon séquentielle, avec une phase d'arrêt pendant laquelle le brassage est interrompu pour permettre la décantation des boues sans avoir à passer par un décanteur séparé. Il est également possible, pour éviter l'étape de décantation gravitaire, d'avoir recours à une filtration membranaire, gourmande en énergie car il faut pousser les boues à travers des membranes très fines. Le nettoyage des membranes doit être bien maîtrisé et la question du stockage des boues reste entière. « L'exemple des SBR montre bien qu'il est difficile de dresser des généralités vis-à-vis d'une technique et que les performances sont liées à chaque produit. À Leipzig, nous avions trois SBR : l'un s'est révélé bon, un autre moyen et le dernier franchement mauvais, souligne Christian Vignoles, responsable des questions d'ANC chez Veolia Eau. De nombreux constructeurs ne savent pas exactement ce que sait faire leur système, bien souvent conçu loin du terrain sur la base d'un principe de fonctionnement. » Il est également possible d'épurer les eaux usées sur des cultures fixées. Dans ce cas, les micro-organismes restent en place sur un support poreux et épurent les matières organiques dans l'eau qui arrive jusqu'à ce support. Lorsque les cultures sont immergées, un surpresseur permet de leur apporter de l'air sous forme de fines bulles. Son efficacité doit être surveillée avec attention pour garantir la qualité de l'épuration par le renouvellement de certains éléments. « La production de boue est assez faible, le biofilm qui se forme sur le support reste assez fin et, sur la plate-forme de Nantes, ce type d'installation n'a dû être vidangé qu'au bout de trois ans. Par ailleurs, ces installations résistent bien aux à-coups hydrauliques et elles ne nécessitent que peu de dénivelé car le rejet se fait au fil de l'eau », rappelle Alain Liénard. Leur inconvénient majeur reste la consommation d'électricité, de l'ordre de 60 W/h pour l'aération, qui doit être maintenue en permanence, avec le risque de voir certains utilisateurs couper le courant pendant la nuit ou les vacances. Les cultures fixées à l'air libre ne nécessitent pas d'aération, les micro-organismes se maintiennent sur divers supports (sable, zéolithe, textile ou encore fibres de coco), sur lesquels les eaux usées s'écoulent. Il est important de s'assurer que les eaux usées sont bien réparties sur tout le filtre pour garantir une bonne épuration et éviter un éventuel colmatage. « Avec un système d'auget basculant, l'installation à fibres de coco s'est révélée efficace, avec une importante surface développée et un biofilm bien aéré pour un dénivelé d'un mètre », ajoute Alain Liénard. L'entretien consiste essentiellement à enlever la surface de la fibre de coco pour la mettre sur le côté, une fois par an. CULTURES FIXÉES ET FILTRES À SABLE Les premiers résultats significatifs de l'étude Veolia Eau ont été présentés lors des Assises de l'ANC de 2007 et 2008. L'expérience se poursuit pour certains dispositifs et Veolia Eau présentera des résultats sous une forme plus générale au cours de l'édition 2009 des Assises de l'ANC, à Évreux, en donnant des indications pratiques pour l'utilisation de ces systèmes. « Les cultures fixées semblent les moins risquées et le système qui a posé le moins de problème a été le filtre à sable », résume Alain Liénard. Le filtre à sable, technique la plus traditionnelle, confirme donc son intérêt, même si le remplacement du sable peut poser problème, car il est difficile de trouver du sable de qualité. Le colmatage précoce est en effet un écueil majeur de cet outil, le plus souvent à cause d'une mauvaise répartition des eaux à traiter. « D'une manière générale, les cultures fixées semblent mieux répondre aux objectifs et nécessitent moins d'entretien. De leur côté, les cultures libres nécessitent légèrement moins de surface, mais il est rare que cela soit nécessaire de réduire la taille à ce point », précise Jérôme Lopez, président de l'Artanc. Au final, Veolia Eau a testé dix-huit techniques dans deux cadres culturels différents, en Allemagne et en France. L'Allemagne a plutôt une culture de microstations, alors que la France, dont l'habitat rural est plus dispersé avec des parcelles plus grandes, a favorisé la fosse toutes eaux suivie d'un épandage. « Notre banc d'essai repose sur des critères beaucoup plus durs, mais bien plus réels, que ceux du marquage CE. Cela ne sert à rien de prévoir des protocoles de quarante semaines si l'on fait des essais mous ; il devrait être possible d'avoir des résultats plus rapidement en y allant plus fort, insiste Christian Vignoles. C'est intéressant d'obtenir un résultat nominal, mais il faut aussi voir comment le fonctionnement se dégrade. Cela n'est visible que si l'on secoue l'outil. » Il est ainsi essentiel de savoir si les systèmes saturés, membranes ou filtres, posent d'autres questions sur des durées plus longues et notamment sur le temps d'apparition du colmatage en fonction des modes d'utilisation. La nature des tests imposés aux dispositifs d'ANC est aussi au coeur de la réflexion du ministère de l'Écologie, qui a demandé à l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail ( Afsset) de mettre au point un protocole de test. Ce dernier est désormais inclus dans la réglementation qui, au jour où nous écrivons, est encore en cours de validation auprès de la Commission européenne (lire encadré p. 27). « Certains industriels critiquent le protocole de l'Afsset car il ne reprend pas l'annexe B de la norme, souligne Alain Liénard. Mais celle-ci a été établie par et pour les fabricants qui ne poussent pas leurs systèmes. Le seul moyen de bien les évaluer, c'est de les pousser à 200 % et d'augmenter le nombre d'échantillons pour garantir l'efficacité dans toutes les situations. » D'autres plates-formes de tests ont été mises en place par Veolia Eau depuis le début de l'année, dans le Tarn (avec l'agence de l'eau Adour-Garonne) et dans les Alpes, afin de tester en situation réelle une large gamme de dispositifs d'ANC, avec un suivi sur cinq ans qui devrait apporter de nombreuses réponses, y compris sur les techniques agréées qui n'ont jamais fait l'objet d'études de cette nature. GUERRE COMMERCIALE Certaines microstations présentent des atouts indiscutables, permettant notamment de résoudre des situations d'assainissement parfois difficiles, mais, comme le rapportent plusieurs interlocuteurs de ce dossier, les arguments de vente utilisés à l'heure actuelle reposent rarement sur de véritables critères techniques. En présentant parfois les filtres à sable comme des « bombes à retardement », qui se bouchent après dix ans et obligent à tout retourner pour les renouveler, ou en soulignant qu'une installation classique constituée d'une fosse, d'un poste de relevage et d'un tertre d'infiltration coûte autour de 13 000 euros alors que leur coût est de 6 000 euros, certains commerciaux n'ont guère besoin de présenter les critères liés à l'épuration elle-même. Ils vont parfois jusqu'à prétendre - en toute mauvaise foi ou par ignorance ? - que la France est hors la loi en interdisant des produits normalisés à l'échelle européenne. Ce type de pratiques commerciales choque de nombreux spécialistes, surtout lorsqu'il y a une volonté délibérée d'exclure le Spanc de la démarche. « De plus en plus de commerciaux passent du temps à faire du porte-à-porte, pour convaincre les usagers directement, en leur expliquant que les Spanc n'interviennent pas dans les réhabilitations et ne regardent que les installations neuves, regrette Jérôme Lopez. Il y a un manque de transparence délibéré, qui apparaît également dans les données fournies par les fabricants qui n'offrent que des pourcentages d'épuration sans indiquer quelles sont les charges de départ. » Les Spanc aimeraient pourtant pouvoir accompagner les usagers, qui sont souvent convaincus de faire un investissement pour l'environnement, mais ils sont trop souvent exclus de la démarche ou n'ont pas la formation nécessaire pour bien guider les utilisateurs. Malgré les indications claires de la réglementation actuelle, la majorité des microstations sont utilisées pour le traitement, notamment car les plus petits Spanc ont du mal à résister à la pression commerciale des fabricants, relayée par les particuliers ou les élus. « Il faut vraiment insister sur le fait que les usagers pourront se retourner contre un Spanc qui aurait donné son accord pour une microstation en traitement si un dysfonctionnement se produit. Il faut tenir bon en attendant la nouvelle réglementation », souligne Benoît Mouline, secrétaire de l'Ansatese. Et les défaillances des microstations peuvent arriver si l'installation a été trop approximative, ou par défaut d'entretien (vidanges trop espacées, interruption intempestive des systèmes d'aération, mauvaise gestion des pics d'usage, etc.). De fait, les contraintes d'entretien ne sont pas toujours évoquées par ces commerciaux et, parfois, les systèmes se mettent à dysfonctionner au bout de quelques mois seulement. « Les particuliers se tournent alors le plus souvent vers l'entreprise qui a fait l'installation et non vers le fabricant. Certains de ces installateurs ont aujourd'hui décidé de ne plus poser de microstations et proposent à nouveau des filtres à sable », raconte Jérôme Lopez. CRITÈRES DE CHOIX Pour évaluer la qualité d'un système, les questions essentielles à se poser sont : un volume suffisant de stockage des boues afin de pouvoir espacer les vidanges ; une consommation d'énergie acceptable ; des contraintes d'exploitation réduites, avec un contrat de maintenance sérieux. Pour Alain Liénard, il est important que les Spanc soient informés des avantages et inconvénients des divers systèmes et qu'ils restent à l'interface entre consommateurs et commerciaux. En ce sens, la mise en place par le ministère de l'Écologie d'un plan d'action pour l'ANC (voir encadré p. 28) pourrait aider les Spanc. « Ils ont besoin d'être soutenus et renforcés. Les agents des Spanc n'ont pas reçu de formation spécifique et les jeunes agents sont souvent confrontés d'emblée aux délicats problèmes de démarrage d'un Spanc, sans y être nécessairement bien préparés », précise Michel Desmars, responsable de l'Eau et assainissement à la FNCCR. Ce plan d'action pourrait donner une ligne directrice claire, avec des informations validées au niveau national. « Attention cependant à ne pas aller à l'encontre des initiatives qui se sont mises en place localement, faute d'initiative nationale, et qui sont essentielles aux techniciens locaux. Un petit Spanc se tournera toujours plus facilement vers un intervenant géographiquement proche et bien informé sur les conditions locales de fonctionnement », souligne Aurélien Tauzin, en charge des questions d'ANC au conseil général de Gironde. Quelles que soient les questions que l'on se pose sur les microstations, elles devraient bénéficier d'un avantage commercial majeur par rapport aux installations classiques qui n'ont pas bénéficié de travaux de recherche pour évaluer précisément leurs performances, qui ne sont soutenues par aucune entreprise commerciale et ne sont protégées par aucun brevet. « Pourtant, j'ai la conviction que chaque type de filière a sa place, pour s'adapter à chaque contexte local et favoriser les solutions les plus rustiques et les moins coûteuses en investissement et fonctionnement. Il serait d'ailleurs souhaitable que l'ouverture du marché s'accompagne d'un effort de recherche et développement public afin d'améliorer et de rendre plus compactes les filières classiques », conclut Benoît Mouline.


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